9C_591/2019 (f) du 05.03.2020 – Rapport de connexité temporelle entre l’incapacité de travail survenue à l’époque de l’affiliation et l’invalidité donnant droit à une rente entière AI / 23 let. a LPP

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_591/2019 (f) du 05.03.2020

 

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Rapport de connexité temporelle entre l’incapacité de travail survenue à l’époque de l’affiliation et l’invalidité donnant droit à une rente entière AI / 23 let. a LPP

 

Assuré, souffrant d’un trouble de la personnalité schizotypique depuis 1989, a travaillé pour le compte de la Poste, du 26.05.1999 au 30.06.2003, d’abord comme auxiliaire, à un taux d’activité variant entre 50% et 70%, puis en tant qu’employé d’exploitation à 50% dès le 01.01.2002. Dès mars 2003, il a exercé une activité lucrative pour le compte de B.__ SA avant d’être licencié pour le 30.11.2009. A ce titre, il a été successivement assuré pour la prévoyance professionnelle auprès de la Caisse de pensions Poste (ci-après: la Caisse de pensions), puis de la Caisse de Prévoyance des Associations Techniques (CPAT – PTV). Il a également été affilié à la Fondation institution supplétive LPP, à partir de février 2010, dans le cadre de l’assurance-chômage.

L’office AI a reconnu le droit de l’assuré à une rente d’invalidité du 01.11.1992 au 30.04.1993 (rente entière), du 01.12.2000 au 28.02.2007 (un quart de rente, puis une demi-rente dès le 01.01.2001, puis un quart de rente dès le 01.05.2005), puis dès le 01.04.2011 (rente entière). Le droit à la rente entière d’invalidité a été confirmé en 2013 et 2016.

A deux reprises, les 05.04.2012 et 28.04.2017, l’assuré s’est adressé à la Caisse de pensions en vue d’obtenir des prestations de la prévoyance professionnelle. L’institution de prévoyance a, à chaque fois, nié toute obligation de prester, au motif que l’incapacité de travail dont la cause était à l’origine de l’invalidité était apparue antérieurement à son affiliation auprès d’elle comme assuré.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a constaté que l’assuré, pendant son activité à la Poste, avait été incapable de travailler pour cause de maladie du 10.07.2000 au 09.10.2000, du 23.12.2000 au 27.12.2000 et à partir du 01.01.2002. Elle a considéré qu’il existait un lien de connexité matérielle et temporelle entre les troubles psychiques ayant conduit à la reconnaissance du droit à une rente entière d’invalidité du 01.11.1992 au 30.04.1993 et ces incapacités de travail. L’origine de ces incapacités de travail étant antérieure à l’affiliation de l’assuré à la Caisse intimée, celle-ci n’était pas tenue de prester. En outre, même si on pouvait admettre que des atteintes à la santé d’origine somatique étaient survenues pendant la période d’affiliation à la Caisse intimée (notamment des lombosciatalgies sur hernie discale), ces prestations étaient désormais prescrites. Pour ce qui est de la période postérieure à l’engagement à la Poste, les juges cantonaux ont considéré que les troubles psychiques dont souffrait l’assuré avaient connu une période significative de rémission, dans une mesure propre à lui permettre de reprendre durablement l’exercice d’une profession adaptée. En effet, l’intéressé avait exercé une activité, dès mars 2003, pour le compte de B.__ SA, à un taux d’occupation supérieur à 80% de 2005 jusqu’à son licenciement avec effet au 30.11.2009. Cette activité lui avait permis de réaliser un revenu excluant le droit à une rente de l’assurance-invalidité dès le 01.03.2007. L’assuré s’était par ailleurs inscrit au chômage en qualité de demandeur d’emploi pleinement apte au placement dès le 01.02.2010. Faute de lien de connexité temporelle, la juridiction cantonale a partant nié l’obligation de la Caisse de pensions intimée de verser les prestations dès le 01.08.2010, début de l’incapacité de travail à la base du droit à la rente entière d’invalidité versée depuis le 01.04.2011.

Par jugement du 12.08.2019, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Le jugement entrepris expose de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs au droit à des prestations d’invalidité (art. 23 let. a LPP) ainsi qu’au début et à la fin de ce droit (art. 26 LPP), à la notion de survenance de l’incapacité de travail, en relation avec la double condition de la connexité matérielle et temporelle nécessaire pour fonder l’obligation de prester d’une institution de prévoyance (ATF 138 V 409 consid. 6.2 et 6.3 p. 419 s.; ATF 134 V 20 consid. 3.2.1 et 5.3 p. 22 s. et 27 et les références). Il rappelle en particulier les principes sur la diminution de la capacité fonctionnelle déterminante (d’au moins 20%), dans l’hypothèse où l’assuré a perçu un (plein) salaire durant la période en question, et à l’absence de recouvrement d’une capacité de travail de plus de 80% dans une activité lucrative adaptée durant plus de trois mois après la survenance de l’incapacité de travail dont la cause est à l’origine de l’invalidité (ATF 144 V 58 consid. 4.4 et 4.5 p. 62 s.; 134 V 20 consid. 3.2.2 p. 23). Il mentionne également la jurisprudence relative aux conditions dans lesquelles les décisions de l’assurance-invalidité lient l’institution de prévoyance compétente (ATF 144 V 72 consid. 4.1 p. 75; 138 V 409 consid. 3.1 p. 414; arrêt 9C_122/2017 du 20 décembre 2017 consid. 2.3 et les arrêts cités). Il suffit d’y renvoyer.

Dans la mesure où l’assuré conclut à l’octroi de prestations de prévoyance professionnelle dès le 01.04.2011 et qu’il ne conteste pas que l’exception de prescription puisse s’opposer aux prétentions antérieures, le Tribunal fédéral n’a pas à vérifier si le lien de connexité temporelle s’est interrompu entre l’incapacité de travail survenue en novembre 1991 (à l’origine de l’octroi de la première rente d’invalidité) et l’invalidité survenue en novembre 1999 (à l’origine de la rente de l’assurance-invalidité versée dès le 01.12.2000). De toute façon, cette question peut rester ouverte parce que, comme l’ont constaté les juges cantonaux, le lien de connexité temporelle s’est interrompu entre l’incapacité de travail survenue en novembre 1999 – lorsqu’il travaillait encore à la Poste – et l’invalidité qui s’est manifestée à partir du 01.08.2010.

 

Selon les constatations de la cour cantonale, après avoir quitté la Poste, l’assuré a disposé d’une capacité de travail de plus de 80% dans une activité adaptée pendant plusieurs années chez B.__ SA, qui lui a permis de réaliser un revenu excluant le droit à une rente. En se limitant à indiquer qu’il « n’a jamais retrouvé une pleine capacité de travail même lorsqu’il était employé chez B.__ SA de 2003 à 2009 puisqu’il travaillait à 75% », l’assuré ne démontre pas que les constatations des premiers juges quant au recouvrement d’une capacité de travail de plus de 80% de 2005 à fin novembre 2009, pour laquelle il a perçu un revenu excluant le droit à une rente d’invalidité, sont manifestement inexactes. Les affirmations de l’assuré sont au demeurant infirmées par les informations figurant dans la demande par laquelle il a requis le versement d’indemnités de chômage à compter du 01.02.2010. A la lecture de ce document, on constate que l’assuré a indiqué avoir travaillé à plein temps pour le compte de B.__ SA ; il y a également mentionné être pleinement apte au placement et a certifié disposer d’une capacité de travail équivalente.

En conséquence de ce qui précède, l’assuré n’a pas démontré ni même rendu vraisemblable que les premiers juges auraient établi les faits de façon manifestement inexacte en constatant l’absence d’incapacité de travail d’au moins 20% durant sa période d’emploi auprès de B.__ SA, à tout le moins de 2005 à 2009. A défaut d’un lien de connexité temporelle (cf. art. 23 let. a LPP), le droit aux prestations d’invalidité litigieuses a donc été nié à juste titre.

 

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_591/2019 consultable ici

 

 

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