8C_465/2017 (f) du 12.01.2018 – publication prévue – Droit à l’indemnité chômage et retraite anticipée (à 50%) / 8 LACI – 13 LACI – 12 OACI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_465/2017 (f) du 12.01.2018, destiné à la publication

 

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Droit à l’indemnité chômage et retraite anticipée (à 50%) / 8 LACI – 13 LACI – 12 OACI

 

Assuré ayant travaillé pour un employeur du 01.02.2008 au 31.12.2015, date de l’échéance de son contrat de travail de durée déterminée. Au cours de l’été 2014, la Caisse de retraite anticipée a adressé à l’intéressé une formule de demande de prestations. L’assuré a retourné cette formule de demande en indiquant vouloir cesser son activité entre 60 et 61 ans et bénéficier d’une rente fondée sur un taux de 100%. Le 19.01.2015, la Caisse de retraite anticipée a indiqué qu’il aurait droit à une rente anticipée de 50% entre son 60ème et son 61ème anniversaire, et à une rente anticipée de 100% durant la période du 01.09.2016 au 31.08.2020. L’intéressé a bénéficié d’une rente de 50% dès le 01.01.2016.

L’assuré a requis l’octroi d’indemnités de chômage à compter du 01.01.2016. Par décision, confirmée sur opposition, la caisse de chômage a nié le droit de l’assuré à une indemnité de chômage à compter du 01.01.2016. L’intéressé a repris une activité au service de son employeur à partir du 25.04.2016.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 24.05.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 8 al. 1 let. e LACI, l’assuré a droit à l’indemnité de chômage s’il remplit les conditions relatives à la période de cotisation ou en est libéré. Celui qui, dans les limites du délai-cadre prévu à cet effet (art. 9 al. 3 [LACI]), a exercé durant douze mois au moins une activité soumise à cotisation remplit les conditions relatives à la période de cotisation (art. 13 al. 1 LACI). Afin d’empêcher le cumul injustifié de prestations de vieillesse de la prévoyance professionnelle et de l’indemnité de chômage, le Conseil fédéral peut déroger aux règles concernant la prise en compte des périodes de cotisation pour les assurés mis à la retraite avant d’avoir atteint l’âge de la retraite selon l’art. 21 al. 1 LAVS (RS 831.10), mais qui désirent continuer à exercer une activité salariée (art. 13 al. 3 LACI).

Faisant usage de cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a édicté l’art. 12 OACI, selon lequel, pour les assurés qui ont été mis à la retraite avant d’avoir atteint l’âge donnant droit aux prestations de l’AVS, seule est prise en compte, comme période de cotisation, l’activité soumise à cotisation qu’ils ont exercée après leur mise à la retraite (al. 1). D’après l’art. 12 al. 2 OACI, cette règle n’est toutefois pas applicable lorsque l’assuré a été mis à la retraite anticipée pour des raisons d’ordre économique ou sur la base de réglementations impératives entrant dans le cadre de la prévoyance professionnelle (let. a) et qu’il a droit à des prestations de retraite inférieures à l’indemnité de chômage à laquelle il a droit en vertu de l’art. 22 LACI (let. b). Dans ce cas, les périodes de cotisation antérieures à la mise à la retraite anticipée sont prises en considération par l’assurance-chômage.

L’art. 12 al. 1 OACI a pour but d’éviter que des personnes cumulent des prestations de vieillesse de la prévoyance professionnelle et des indemnités de chômage, voire qu’elle résilient leur contrat de travail à cette fin, sans être réellement disposées à accepter un emploi convenable (ATF 129 V 327 consid. 4 p. 329; 126 V 393 consid. 3 p. 396). D’après le texte clair de l’art. 12 al. 2 OACI, toute résiliation des rapports de travail qui – sans que l’assuré ait un choix – aboutit à une retraite anticipée ne tombe pas sous le coup de cette réglementation. Les personnes qui sont licenciées par leur employeur pour des raisons autres que des motifs d’ordre économique ou qu’en vertu de réglementations impératives ressortissant à la prévoyance professionnelle ne peuvent pas se prévaloir de l’art. 12 al. 2 OACI (ATF 126 V 396 consid. 3b/bb p. 398; arrêts 8C_839/2009 du 19 février 2010 consid. 3.4; 8C_708/2008 du 5 mars 2009 consid. 3.3). Peu importe la partie qui met fin aux rapports de travail ou le fait que le travailleur a résilié en butte à une certaine pression de la part de l’employeur. Le critère déterminant n’est pas le caractère volontaire du congé mais celui de la prise de la retraite pour raison d’âge (ATF 129 V 327 consid. 3.1 p. 329; arrêt 8C_839/2009, déjà cité, consid. 3.4).

Au mois de janvier 2015, l’assuré a retourné à la Caisse de retraite anticipée une formule de demande de prestations, dans laquelle il indiquait vouloir cesser son activité entre 60 et 61 ans et bénéficier à ce moment-là d’une rente fondée sur un taux de 100 %. Aussi n’existe-t-il aucun lien entre la décision de l’intéressé de bénéficier d’une rente anticipée de la prévoyance professionnelle et sa situation professionnelle à l’échéance du contrat de travail de durée déterminée, le 31.12.2015. Il apparaît ainsi que l’assuré a choisi librement de bénéficier de la retraite anticipée.

 

En tant qu’il a pour but d’éviter que des assurés cumulent des prestations de vieillesse de la prévoyance professionnelle et des indemnités de chômage, l’art. 12 al. 1 OACI vise les personnes qui désirent continuer de travailler après la mise à la retraite anticipée mais qui tombent au chômage ou ne retrouvent pas d’activité lucrative. Dans ces éventualités, les périodes de cotisation antérieures à la retraite anticipée ne sont pas prises en considération par l’assurance-chômage. L’art. 13 al. 3 LACI qui habilite le Conseil fédéral à déroger aux règles concernant la prise en compte des périodes de cotisations pour les assurés mis à la retraite avant d’avoir atteint l’âge de la retraite selon l’art. 21 al. 1 LAVS n’a toutefois pas pour but de faire obstacle purement et simplement à l’octroi simultané de prestations de la caisse de prévoyance et d’indemnités de chômage (ATF 123 V 142 consid. 4b p. 146; THOMAS NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Sécurité sociale, 3 ème éd., 2016, n° 224 p. 2331). Cette disposition légale vise à empêcher que la retraite anticipée corresponde à une décision de retrait définitif du marché du travail en ce sens que l’assuré n’est plus disposé à accepter un travail convenable (cf. FF 1980 III 565; BORIS RUBIN, op. cit., n. 32 ad art. 13 LACI).

En l’espèce, l’assuré a bénéficié d’une demi-rente anticipée à partir du 01.01.2016, soit à l’échéance du contrat de travail de durée déterminée. Toutefois, cela ne signifie pas qu’il désirait se retirer définitivement du marché du travail. Il avait d’autant plus intérêt à poursuivre une activité, serait-ce seulement à temps partiel, que la demi-rente perçue ne couvrait que la moitié du salaire déterminant réalisé avant la mise à la retraite anticipée. En outre, jusqu’à l’octroi d’une rente entière de la prévoyance à compter du 31.08.2016, on ne voit pas en quoi le cumul d’une demi-rente de la prévoyance et d’indemnités de chômage calculées en fonction d’une perte d’emploi correspondant à 50% d’un travail à plein temps serait injustifié et contreviendrait à l’art. 13 al. 3 LACI. A cela s’ajoute qu’au moment où il a déclaré vouloir mettre fin à son activité lucrative entre 60 et 61 ans et percevoir une rente fondée sur un taux de 100%, l’assuré est parti de l’idée erronée qu’il avait droit à une telle prestation à compter de son 60ème anniversaire. C’est seulement le 19 janvier 2015 que la Caisse de retraite anticipée l’a informé qu’il aurait droit à une rente anticipée de 50% entre son 60ème et son 61ème anniversaire, et à une rente anticipée de 100% durant la période du 01.09.2016 au 31.08.2020. Qui plus est, l’intéressé a satisfait à son obligation de diminuer le dommage en ce sens qu’en demandant à bénéficier de la demi-rente anticipée, il a renoncé à se prévaloir de son droit à une indemnité de chômage pleine et entière jusqu’à la naissance de son droit à la rente entière.

Dans ces conditions, et pour autant que les prestations de retraite soient inférieures à l’indemnité de chômage due en vertu de l’art. 22 LACI (cf. art. 12 al. 2 let. b OACI), il n’y a pas lieu de déroger à la règle générale de l’art. 13 al. 1 LACI pour examiner si l’assuré satisfaisait aux conditions relatives à la période de cotisation à partir du 01.01.2016 (échéance du contrat de travail de durée déterminée) et jusqu’au 01.09.2016 (naissance du droit à la rente entière de la prévoyance professionnelle) en ce qui concerne la perte d’emploi correspondant à 50% d’un travail à plein temps au sens de l’art. 10 al. 2 let. a LACI.

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et la décision de la caisse de chômage et renvoie la cause à la caisse pour nouvelle décision au sens des considérants.

 

 

Arrêt 8C_465/2017 consultable ici

 

 

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