9C_806/2016 (d) du 14.07.2017- proposé à la publication – Observation de bénéficiaires de l’AI : absence de base légale suffisante

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_806/2016 (d) du 14.07.2017

 

Arrêt du TF consultable ici : http://bit.ly/2uYfw4M

Communiqué de presse du TF du 02.08.2017 consultable ici : http://bit.ly/2uYGmcI

 

Observation de bénéficiaires de l’AI : absence de base légale suffisante

 

Il manque une base légale suffisamment claire et détaillée pour l’observation de bénéficiaires d’une rente de l’AI. L’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme en octobre dernier, selon lequel une base légale suffisante pour la surveillance secrète en matière d’assurance-accidents fait défaut en Suisse, vaut également pour l’assurance-invalidité. Dans le cas concret, les moyens de preuve recueillis au cours de l’observation peuvent toutefois être utilisés, parce que l’intérêt public est prépondérant.

 

En 2010, l’office AI du canton de Zoug avait fait surveiller le bénéficiaire d’une rente de l’AI pendant quatre jours en l’espace de deux semaines, chaque fois entre cinq et neuf heures par jour. Seuls des actes que la personne concernée avait effectués sur le domaine public avaient été enregistrés. Sur la base des résultats de la surveillance, une nouvelle expertise psychiatrique avait été mise en œuvre, à la suite de laquelle l’office AI avait supprimé le droit à la rente, décision confirmée par le Tribunal administratif du canton de Zoug.

Le Tribunal fédéral rejette le recours formé par l’assuré, parce que la décision de supprimer la rente de l’AI est, dans son résultat, conforme au droit. Toutefois, il arrive à la conclusion qu’il n’existe pas de base légale suffisante pour une observation de bénéficiaires de rentes de l’AI mise en œuvre par l’office AI. A défaut d’une réglementation étendue, claire et détaillée, figurant dans une loi, une telle surveillance secrète viole le droit fondamental au respect de la vie privée et familiale selon l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), respectivement l’article 13 de la Constitution. En octobre passé, la Cour européenne des droits de l’homme avait constaté qu’il n’existait pas de réglementation légale suffisamment claire et détaillée pour l’observation dans le domaine de l’assurance-accidents en Suisse. Les règles légales existantes sur des aspects partiels de la surveillance, en relation avec la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue à ce sujet (limitation de la surveillance au domaine public, interdiction de prendre contact avec la personne assurée pour s’immiscer dans sa vie privée), ne suffisaient pas à elles seules. Le Tribunal fédéral arrive à la conclusion que la situation juridique ne se présente pas de manière différente dans l’assurance-invalidité, de sorte que l’arrêt de la CEDH est également valable dans ce domaine.

Autre est la question de savoir si le matériel recueilli dans le cadre de l’observation illicite peut être utilisé en tant que moyen de preuve dans le cas concret. Pour y répondre, il est nécessaire de faire une pesée des intérêts entre les intérêts privés de la personne concernée et les intérêts publics. En l’occurrence, le bénéficiaire de la rente de l’AI a été surveillé seulement sur le domaine public et n’a pas été influencé. L’observation a été mise en œuvre en raison de doutes concrets, a été limitée à quatre jours en l’espace de deux semaines et a duré chaque fois entre cinq et neuf heures. La personne assurée n’a dès lors pas été soumise à une surveillance systématique ou constante et a subi sous cet angle une atteinte relativement modérée à son droit fondamental. A cet égard, l’intérêt public important et prépondérant à empêcher les abus dans l’assurance prédomine. C’est pourquoi le rapport d’observation, y compris les photographiques et la vidéo, peut être pris en considération dans l’appréciation des preuves.

 

 

Arrêt 9C_806/2016 consultable ici : http://bit.ly/2uYfw4M

Communiqué de presse du TF du 02.08.2017 consultable ici : http://bit.ly/2uYGmcI

 

 

 

Voir également :

L’assurance-invalidité renonce provisoirement à toute procédure d’observation

 

Motion 16.4065 Hess « Droit des assurances sociales. Il faut pouvoir poursuivre les observations » : avis du Conseil fédéral

 

CSSS-N : Régler rapidement la question de la surveillance des assurés

 

Base légale pour la surveillance des assurés

 

La Confédération veut autoriser les assurances à surveiller leurs assurés

 

Arrêt de la CrEDH Vukota-Bojić c. Suisse (en) du 18.10.2016 – Surveillance illicite d’une victime d’accident de la route par une compagnie d’assurances contraire à son droit à la vie privée

 

 

 

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.