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9C_241/2024 (f) du 21.10.2024 – Indemnité journalière LAMal / Epuisement partiel du droit aux prestations, surindemnisation et montant des primes d’assurance encore dues

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_241/2024 (f) du 21.10.2024

 

Consultable ici

 

Indemnité journalière LAMal / 67 ss LAMal

Epuisement partiel du droit aux prestations, surindemnisation et montant des primes d’assurance encore dues / 72 al. 4 LAMal – 72 al. 5 LAMal

 

Assurée, née en 1972, employée agricole pour le compte de l’Association B.__ du 01.01.2014 au 31.10.2020. À ce titre, elle était assurée dans le cadre d’un contrat d’assurance collective, pour des indemnités journalières en cas de maladie. À compter du 01.11.2020, elle a été assurée auprès du même assureur, à titre individuel. La prime mensuelle a été fixée à CHF 178.45, puis à CHF 190.35 dès le 01.01.2021.

L’assurée a connu deux périodes d’incapacité de travail : du 13.06.2019 au 21.07.2019, puis à partir du 07.01.2020. L’assureur-maladie a versé des indemnités journalières jusqu’au 15.12.2021, date à laquelle il a résilié la couverture d’assurance, estimant que l’assurée avait épuisé son droit aux prestations (730 indemnités journalières sur 900 jours ; décision du 16.12.2021).

Le 09.08.2022, l’office AI a accordé à l’assurée une rente entière d’invalidité à compter du 01.12.2020. En raison d’une surindemnisation, l’office AI a versé CHF 26’047.35 à l’assureur-maladie pour la période du 01.12.2020 au 15.12.2021.

A la suite de ce remboursement, l’assureur-maladie a révisé sa décision du 16.12.2021, « réactivant » la couverture d’assurance à partir du 16.12.2021 et reportant la date d’épuisement du droit aux prestations au 16.10.2027, sous réserve de modifications ultérieures de la situation de l’assurée (décision de révision du 21.11.2022, confirmée sur opposition).

 

Procédure cantonale (arrêt AM 17/23 – 8/2024 – consultable ici)

Par jugement du 19.03.2024, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
L’assurée fait en substance valoir qu’elle ne bénéficie plus d’une couverture d’assurance « au sens strict », étant donné qu’elle est en « incapacité de travail complète » et qu’elle s’est déjà intégralement acquittée de la prime d’assurance pour la période de perception des indemnités journalières de 730 jours prévue par l’art. 7 ch. 1 des CGA applicables (ouverte jusqu’au 15.12.2021 à la suite de son incapacité de travail survenue le 10.06.2019, puis le 07.01.2020). L’instance cantonale ne pouvait dès lors pas considérer qu’elle était tenue de s’acquitter d’une prime entière jusqu’à l’épuisement de son droit aux indemnités journalières, le 16.10.2027. Selon l’assurée, pareille conclusion reviendrait à ne pas respecter les règles d’équivalence prévues à l’art. 72 al. 5 LAMal, car les primes seraient complètement disproportionnées par rapport au montant des prestations et donc sans lien avec un risque assuré; autrement dit, l’assureur serait ainsi autorisé à facturer des primes sans contre-prestation adéquate.

Consid. 3.2.1
L’argumentation de l’assurée est mal fondée. Quoi qu’elle en dise, en cas d’épuisement partiel du droit aux prestations selon l’art. 72 al. 4 et 5 LAMal, la loi ne prévoit pas le droit de l’assuré de payer des primes réduites (cf. arrêt 9C_790/2018 du 9 avril 2019 consid. 3.4.4), comme l’a dûment exposé la juridiction cantonale. Certes, en cas de réduction des indemnités journalières pour cause d’incapacité partielle de travail (art. 72 al. 4 LAMal) et de surindemnisation (art. 72 al. 5 LAMal), la durée de l’indemnisation doit être prolongée jusqu’au moment où la personne assurée a perçu l’équivalent des indemnités journalières auxquelles elle aurait eu droit durant la période minimale de 720 jours (selon l’art. 72 al. 3 LAMal, respectivement de 730 jours selon les CGA applicables en l’occurrence), en fonction du taux de l’incapacité partielle de travail et à défaut de surindemnisation (cf. ATF 127 V 88 consid. 1d; 125 V 106 consid. 2b et 2c). Cela étant, la prolongation des délais relatifs à l’octroi des indemnités journalières en fonction de la réduction (conformément à l’art. 72 al. 4-5 LAMal) ne signifie pas que le montant des primes doit être diminué, voire qu’aucune prime ne doit plus être prélevée. Comme le fait valoir l’assureur-maladie, le rapport d’équivalence doit en effet être réalisé entre le montant de la prime (en l’occurrence CHF 190.35 dès le 01.01.2021) et le montant assuré (correspondant à 730 indemnités journalières complètes d’un montant de CHF 74.35 chacune).

Consid. 3.2.2
Dans ce contexte, on rappellera que le droit aux prestations d’un assureur-maladie est lié à l’affiliation (ATF 125 V 106 consid. 3) et que l’indemnité journalière n’est versée que si la prime a aussi été payée pour la période correspondante (cf. Évaluation du système d’assurance d’indemnités journalières en cas de maladie et propositions de réforme, Rapport du Conseil fédéral du 30 septembre 2009 en réponse au postulat 04.3000 de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national, du 16 janvier 2004, p. 12). Par ailleurs si le législateur a adopté des dispositions légales minimales impératives qui encadrent la pratique de l’assurance facultative d’une indemnité journalière (cf. art. 67 à 77 LAMal), notamment quant à la durée du droit à l’indemnité (art. 72 al. 3 LAMal), à la réduction de la prestation en cas d’incapacité partielle de travail (art. 72 al. 4 LAMal) et à la surindemnisation (art. 72 al. 5 LAMal), la réglementation d’autres aspects relève de la liberté contractuelle des parties (cf. arrêt K 74/02 du 16 avril 2004 consid. 2.1 et les références). Or s’agissant des primes des assurés, l’art. 76 LAMal prévoit que l’assureur en fixe le montant (al. 1 LAMal) et qu’une réduction doit intervenir si un délai d’attente est applicable au versement de l’indemnité journalière (art. 76 al. 2 LAMal). Une obligation de l’assureur de réduire le montant des primes d’assurance dans une hypothèse autre que celle visée à l’art. 76 al. 2 LAMal, notamment en cas de prolongation du versement des indemnités journalières par suite de surindemnisation selon l’art. 72 al. 5 LAMal, n’est ainsi pas prévue par la loi. Une telle obligation ne découle par ailleurs pas des CGA applicables en l’espèce. Sur ce point, on constate que l’art. 24 ch. 1 des CGA donne la possibilité à l’assureur d’adapter annuellement le taux des primes en fonction de l’évolution des sinistres, sans prévoir une telle adaptation dans le cas de la réactivation du versement d’indemnités journalières à la suite de surindemnisation. À cet égard, l’assurée ne saurait rien tirer en sa faveur de l’art. 24 ch. 2 des CGA. S’il réserve une adaptation immédiate du taux de prime lors de l’entrée en vigueur de nouvelles circonstances, celles-ci englobent les cas de fusion, de scission ou d’absorption, soit des circonstances qui concernent l’assureur. Ne sont donc pas visés les « cas de diminution importante du risque » comme il en va, selon l’assurée, lorsque la durée de versement des indemnités journalières a été prolongée conformément à l’art. 72 al. 5 LAMal.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_241/2024 consultable ici

 

Primes LAMal non payées : aide au désendettement plus efficace pour les mineurs et les assurés

Primes LAMal non payées : aide au désendettement plus efficace pour les mineurs et les assurés

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 22.11.2023 consultable ici

 

Les mineurs ne pourront plus être poursuivis pour les primes non payées par leurs parents. Lors de sa séance du 22 novembre 2023, le Conseil fédéral a fixé l’entrée en vigueur de la modification de la loi fédérale sur l’assurance maladie (LAMal), de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et faillites (LP) et de l’ordonnance sur l’assurance-maladie (OAMal) concernant l’obligation de payer les primes. Les assureurs pourront par ailleurs engager deux procédures de poursuite au maximum par année et par assuré. Quant aux cantons, ils pourront se faire céder les actes de défauts de biens et agir ainsi plus efficacement contre l’endettement des assurés.

Grâce à la modification de la LAMal, les mineurs ne pourront plus être poursuivis pour les primes et les participations aux coûts impayées par leurs parents. Ce changement mettra fin au régime actuel selon lequel chaque assuré, mineur ou majeur, est personnellement débiteur des primes d’assurance-maladie le concernant. Le Conseil fédéral a fixé l’entrée en vigueur de cette modification au 1er janvier 2024.

Afin de limiter les dépenses liées aux frais de poursuite, les assureurs pourront engager au maximum deux procédures de poursuite par année contre le même assuré. Les assureurs devant adapter leurs systèmes informatiques pour mettre en œuvre cette modification, sa mise en vigueur interviendra au 1er janvier 2025.

 

Reprise des actes de défaut de biens par les cantons

La modification de la LAMal donne aussi la possibilité aux cantons de reprendre les actes de défaut de bien des assurés et de leur offrir une aide au désendettement. Un canton pourra ainsi se faire céder les actes de défaut de biens s’il prend en charge 90% de l’ensemble des créances annoncées par l’assureur. Actuellement, les cantons doivent payer 85% des créances à l’assureur qui conserve l’acte de défaut de biens. Les cantons auront le choix entre une reprise annuelle ou trimestrielle des actes de défaut de biens. Les assurés pourront ainsi changer plus rapidement de caisse-maladie et s’affilier auprès d’un assureur avec des primes plus avantageuses. Actuellement, ce n’est pas possible tant que leurs créances envers un assureur n’ont pas été réglées. Cette modification entrera en vigueur au 1er juillet 2025 pour permettre aux cantons et aux assureurs d’adapter leurs systèmes d’échange électronique des données.

Le Parlement a également accepté une modification de la LP ayant pour objectif d’aider les assurés à sortir de la spirale de l’endettement. Les assurés faisant l’objet d’une saisie de revenus ont la possibilité de charger l’office des poursuites de payer leurs primes courantes. Cette modification entrera en vigueur au 1er juillet 2024.

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 22.11.2023 consultable ici

Modification de l’OAMal disponible ici

Rapport explicatif du 22.11.2023 sur la modification de l’OAMal disponible ici

Rapport sur les résultats de la consultation, juin 2023, disponible ici

 

Premi LAMal non pagati : un aiuto più efficace contro l’indebitamento dei minorenni e degli assicurati, communicato stampa disponibile qui

Krankenkassenprämien nicht bezahlt : effizientere Hilfe beim Schuldenabbau für Minderjährige und andere Versicherte, Medienmitteilung hier abrufbar

 

 

9C_654/2021 (f) du 11.08.2022 – Primes de l’assurance obligatoire des soins impayées – Débiteur qui a plusieurs dettes à payer au même créancier – 86 CO – 87 CO / Fin du droit au subside – Débiteur du montant total de la prime fixé par l’assureur

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_654/2021 (f) du 11.08.2022

 

Consultable ici

 

Primes de l’assurance obligatoire des soins impayées – Débiteur qui a plusieurs dettes à payer au même créancier / 86 CO – 87 CO

Fin du droit au subside – Débiteur du montant total de la prime fixé par l’assureur / 61 al. 1 LAMal – 65 LAMal

 

Madame A.__, née en 1987, est assurée pour l’assurance obligatoire des soins et pour l’assurance complémentaire. Ses deux enfants (nés en 2014 et en 2016) sont assurés pour l’assurance obligatoire des soins auprès de la même caisse-maladie et pour l’assurance complémentaire auprès d’une autre compagnie d’assurance.

Malgré les rappels de la caisse-maladie, A.__ ne s’est pas acquittée de la totalité du montant de ses primes d’assurance-maladie et de sa participation aux coûts depuis le 01.01.2014. La caisse-maladie lui a fait notifier, par l’office des poursuites, trois commandements de payer auxquels elle a fait opposition. La caisse-maladie a rendu diverses décisions au sujet de la mainlevée définitive des oppositions aux poursuites.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1152/2021 – consultable ici)

Par jugement du 12.11.2021, admission partielle des recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Est litigieux le point de savoir si l’assurée s’est acquittée du montant de 811 fr. 80, auquel s’ajoutent 100 fr. de frais et 14 fr. 65 d’intérêts (soit 926 fr. 45 au total), correspondant aux primes de l’assurance obligatoire des soins des mois d’octobre 2019 et novembre 2019, et du montant de 725 fr. 34, auquel s’ajoutent 100 fr. de frais, correspondant au solde de la participation aux coûts échus.

Consid. 3.2
A la suite des juges cantonaux, on rappellera que le débiteur qui a plusieurs dettes à payer au même créancier a le droit de déclarer, lors du paiement, laquelle il entend acquitter (art. 86 al. 1 CO); faute de déclaration de sa part, le paiement est imputé sur la dette que le créancier désigne dans la quittance, si le débiteur ne s’y oppose immédiatement (art. 86 al. 2 CO). Lorsqu’il n’existe pas de déclaration valable, ou que la quittance ne porte aucune imputation, le paiement s’impute sur la dette exigible; si plusieurs dettes sont exigibles, sur celle qui a donné lieu aux premières poursuites contre le débiteur; s’il n’y a pas eu de poursuites, sur la dette échue la première (art. 87 al. 1 CO).

Consid. 4
La juridiction cantonale a constaté qu’il lui était impossible d’attribuer un versement à une facture en fonction du numéro de référence, de sorte qu’elle allait vérifier les prétentions des parties en prenant en considération l’intégralité des versements. En ce qui concerne les primes échues, elle a d’abord constaté que la caisse-maladie avait réclamé de l’assurée un montant total de 30’698 fr. 50 entre le 1 er janvier 2014 et le 31 décembre 2019 (31’308 fr. 50 – 609 fr. 50 de crédits de primes), tandis que l’assurée avait établi s’être acquittée d’un montant de 28’886 fr. 45. Il en résultait un solde encore dû de 1812 fr. 05 comprenant non seulement les primes LAMal mais également les primes LCA, lesquelles ne faisaient pas partie de l’objet de la procédure. Dans la mesure où les derniers versements de l’assurée ne comportaient ni numéro de référence ni autre mention, ceux-ci devaient être imputés sur les dettes échues en premier. Partant, au vu du solde encore dû au titre des primes LAMal, l’assurée était encore tenue de s’acquitter des primes pour les mois d’octobre et novembre 2019. Aussi, la caisse-maladie avait considéré à juste titre que l’assurée était encore débitrice des primes d’octobre et novembre 2019 pour un montant de 811 fr. 80, auquel s’ajoutaient 100 fr. de frais et 14 fr. 65 d’intérêts.

Consid. 5.2
L’assurée ne remet tout d’abord pas en cause le fait qu’elle n’a pas systématiquement indiqué à quelle échéance se référaient ses paiements. Il en résulte qu’en vertu de l’art. 87 CO, les paiements non référencés ont éteint les créances échues en premier et que, par conséquent, les créances demeurées impayées sont celles échues en dernier. C’est ainsi en vain que l’assurée essaie d’établir un lien de connexité entre la date de ses versements (respectivement que ses paiements auraient « mystérieusement disparu »), notamment ceux effectués entre septembre et novembre 2019, et les dernières primes dues. Si elle entendait s’acquitter des primes des mois d’octobre et novembre 2019, il lui eut appartenu de le déclarer expressément au moment des versements, ce qu’elle n’a pas fait selon les faits constatés par la juridiction cantonale. Il en va de même en ce qui concerne la participation aux coûts échus.

Consid. 5.3
Ensuite, à l’inverse de ce que soutient l’assurée, dès que le droit au subside prend fin, l’assuré redevient débiteur du montant total de la prime fixé par l’assureur (art. 61 al. 1 LAMal, en relation avec l’art. 65 LAMal). S’il s’avère a posteriori qu’un subside a été bonifié par erreur à un assuré, l’assureur subit un préjudice financier et est tenu, dans les limites du délai légal de prescription (art. 24 LPGA), de recouvrer le montant de primes demeuré impayé auprès de l’assuré (arrêt K 13/06 du 29 juin 2007 consid. 4.2 et 4.5; sur le délai de prescription de cinq ans, voir arrêts K 99/04 du 21 janvier 2005 consid. 2.1.2, SVR 2006 KV n° 4 p. 9). […]

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_654/2021 consultable ici