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8C_515/2024 (d) du 23.05.2025, destiné à la publication – Maxime inquisitoire – Principe de la libre appréciation des preuves / Rapport établi par une psychologue

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_515/2024 (d) du 23.05.2025, destiné à la publication

 

Consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Maxime inquisitoire – Principe de la libre appréciation des preuves / 61 let. c LPGA – 43 al. 1 LPGA

Rapport établi par une psychologue

 

Résumé
Le Tribunal fédéral rappelle que l’évaluation du droit aux prestations nécessite des bases médicales de décision fiables. En l’espèce, la cour cantonale s’est exclusivement fondée sur l’évaluation – sur dossier – du médecin orthopédiste du SMR, sans tenir compte du rapport circonstancié de la psychothérapeute traitante, ni des diagnostics antérieurs attestant d’un trouble psychique. Le Tribunal fédéral a jugé que ni l’office AI ni le tribunal cantonal n’ont satisfait à leur obligation d’instruire, en omettant d’évaluer de manière approfondie l’état psychique de l’assurée malgré des indices sérieux d’une atteinte à la santé psychique. Il a dès lors annulé l’arrêt cantonal et renvoyé la cause à l’office AI pour des mesures d’instruction complémentaire et nouvelle décision.

 

Faits
Assurée, née en 1965, a déposé en septembre 2014 une première demande de prestations de l’assurance-invalidité. Par décision du 09.11.2016, l’office AI lui a octroyé une demi-rente limitée au mois de mars 2015. Cette décision n’avait pas été contestée.

En mai 2021, l’assurée a déposé une nouvelle demande, invoquant des douleurs au genou ainsi qu’une dépression. L’office AI a procédé à une évaluation de la situation médicale et professionnelle. Après consultation du SMR, l’office AI a informé l’assurée de son intention de rejeter la demande. À l’issue de compléments d’instruction et notamment d’un nouvel avis du SMR, l’office AI a rejeté la demande (décision du 21.12.2023).

 

Procédure cantonale (arrêt VBE.2024.82 – consultable ici)

Par jugement du 25.06.2024, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Selon la cour cantonale, il convient de se fonder, comme base probante pour apprécier l’état de santé, le profil de capacité de travail exigible et les limitations fonctionnelles, sur la seule appréciation sur dossier du 18.07.2023 établi par le Dr B.__, orthopédiste et médecin du SMR. Selon celle-ci, il n’existerait, ni sur le plan somatique, ni sur le plan psychique, d’atteintes à la santé ayant une incidence sur la capacité de travail. Il convient dès lors d’admettre une pleine capacité de travail de la recourante pour toute activité au plus tard dès septembre 2021.

Consid. 3.2
Comme déjà lors de la procédure cantonale, l’assurée ne conteste pas l’appréciation du SMR sur le plan somatique. Il n’y a dès lors pas lieu d’aller plus loin sur ce point.

Consid. 3.3
Sur le plan psychique, l’assurée invoque une violation du principe inquisitoire (art. 61 let. c LPGA). Elle fait valoir que la conclusion de l’instance cantonale, selon laquelle il n’existerait pas même de doutes minimes quant à la prise de position interne à l’assurance du Dr B.__, est insoutenable. Elle invoque également une appréciation arbitraire des preuves par les juges cantonaux.

Consid. 4.1
La cour cantonale a constaté qu’aucune pathologie psychique n’est établie par un médecin spécialiste, ce que ne changeait pas non plus le rapport de la psychothérapeute traitante, lic. phil. C.__, du 18.04.2023. Il ne s’agissait en effet pas d’une évaluation médicale spécialisée. En outre, ce rapport ne contenait ni indications anamnestiques suffisantes ni une explicitation compréhensible du raisonnement diagnostique.

Consid. 4.3
Comme l’a reconnu à juste titre le tribunal cantonal, l’évaluation de la psychothérapeute ne constitue pas une appréciation médicale spécialisée. Il est également exact qu’une évaluation spécialisée de l’état de santé et de la capacité de travail ne peut en principe être remise en cause que sur la base d’une autre évaluation divergente émanant elle aussi d’un médecin spécialiste (arrêts 8C_584/2018 du 13 novembre 2018 consid. 4.1.1.2 ; 8C_450/2018 du 16 octobre 2018 consid. 5.1 ; 9C_139/2014 du 6 octobre 2014 consid. 5.2 et les références citées). On ne saurait toutefois en déduire qu’un rapport émanant d’une psychothérapeute serait d’emblée dépourvu de pertinence (cf. par ex. arrêt 8C_398/2018 du 5 décembre 2018 consid. 5.1 et 5.4). Le principe de la libre appréciation des preuves (art. 61 let. c LPGA) impose plutôt aux tribunaux cantonaux des assurances sociales d’examiner objectivement tous les moyens de preuve, indépendamment de leur origine, et de décider ensuite si les pièces disponibles permettent une évaluation fiable du droit litigieux.

Consid. 4.4
L’évaluation du droit aux prestations relevant du droit des assurances sociales nécessite des bases médicales de décision fiables (ATF 134 V 231 consid. 5.1; SVR 2018 UV Nr. 27 p. 94, 8C_830/2015 consid. 5.2). Tant la procédure administrative que le procès cantonal en matière d’assurances sociales sont régis par la maxime inquisitoire (art. 43 al. 1 et art. 61 let. c LPGA). Selon ce principe, l’administration et le tribunal cantonal doivent établir d’office les faits juridiquement pertinents. Cette obligation d’instruction s’étend jusqu’à ce que les faits nécessaires à l’examen des prétentions en cause soient suffisamment élucidés (SVR 2013 UV Nr. 9 p. 29, 8C_592/2012 consid. 5.1 et les références ; cf. également ATF 144 V 427 consid. 3.2 et les références). La maxime inquisitoire présente des liens étroits avec le principe de la libre appréciation des preuves, applicable tant au niveau administratif que judiciaire (cf. consid. 4.3 supra).

Si les investigations menées d’office conduisent, dans le cadre d’une appréciation des preuves complète, correcte, objective et matérielle (ATF 132 V 393 consid. 4.1), l’assureur ou le tribunal est convaincu que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante (ATF 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2) et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu de rechercher d’autres preuves. Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu (appréciation anticipée des preuves ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 124 V 90 consid. 4b). En revanche, si des doutes sérieux subsistent quant à l’exhaustivité et/ou l’exactitude des constatations de fait établies jusqu’ici, il convient de compléter l’instruction de la cause, pour autant que l’on puisse attendre un résultat probant des mesures d’instruction entrant en considération (arrêt 8C_676/2023 du 22 mai 2024 consid. 3.2 et la référence).

Consid. 4.5
Selon les constatations non arbitraires de l’instance cantonale, l’expertise bidisciplinaire rhumatologique et psychiatrique du 27.11.2015 n’a pas attesté d’incapacité de travail en raison d’une atteinte psychique. Toutefois, l’experte psychiatre y a posé le diagnostic d’un épisode dépressif léger (CIM-10 F32.0). Comme l’a également relevé la cour cantonale, le rapport des services psychiatriques du 21.10.2015 mentionnait le diagnostic d’un épisode dépressif modéré à sévère. Ces indications médicales ne concernent certes pas la période déterminante de la nouvelle demande. Elles montrent néanmoins qu’une atteinte à la santé psychique avait été diagnostiquée par un médecin spécialiste dans le passé. Il ressort en outre du rapport de lic. phil. C.__ du 18.04.2023 que l’assurée se trouve depuis plusieurs années en traitement psychothérapeutique prescrit par un médecin.

Consid. 4.6
Comme le fait valoir à juste titre l’assurée, le médecin orthopédiste du SMR ne s’est absolument pas penché sur le contenu des indications fournies par lic. phil. C.__. Il s’est contenté d’écarter de manière générale aux psychologues la qualification professionnelle nécessaire à l’évaluation de l’état de santé psychique. Lui-même ne dispose toutefois ni d’un titre de spécialiste en psychiatrie, ni n’a jamais examiné personnellement l’assurée. Il convient également de relever que, selon l’art. 50c OAMal en vigueur depuis le 1er juillet 2022, les psychologues-psychothérapeutes sont, sous certaines conditions, reconnus comme fournisseurs de prestations dans l’assurance obligatoire des soins (voir à ce sujet les conditions d’autorisation à l’exercice de la psychothérapie à l’art. 11b de l’Ordonnance du DFI du 29 septembre 1995 sur les prestations de l’assurance des soins [OPAS ; RS 832.112.31] ; voir également l’art. 24 de la loi fédérale du 18 mars 2011 sur les professions de la psychologie [LPsy ; RS 935.81]). Ce seul fait ne rend certes pas superflue une évaluation par un médecin spécialiste. Toutefois, en raison des constatations psychopathologiques établies par la psychothérapeute (cf. consid. 4.2 supra), il existe en tout cas des indices sérieux d’une atteinte psychique significative. En ce sens, la conclusion du tribunal cantonal selon laquelle il n’existerait aucun indice d’un tableau clinique de maladie psychique apparaît insoutenable.

Consid. 4.7
Au vu de ce qui précède, il demeure incertain si la capacité de travail de l’assurée est ou non limitée pour des raisons psychiques. Il manque donc, sur le plan psychique, une base médicale fiable pour la décision. En renonçant à procéder à des investigations complémentaires concernant l’état de santé psychique de l’assurée, le tribunal cantonal a constaté les faits juridiquement pertinents de manière incomplète et en violation de la maxime inquisitoire (art. 61 let. c LPGA ; cf. consid. 4.4 ci-dessus). De son côté, l’office AI n’a pas non plus satisfait à son obligation d’instruire (art. 43 al. 1 LPGA), de sorte que la cause doit lui être renvoyée afin qu’il examine de manière suffisante l’état de santé psychique de l’assurée et vérifie si une modification notable de son état de santé est intervenue depuis la dernière évaluation matérielle. Il devra ensuite rendre une nouvelle décision sur le droit aux prestations.

 

Le TF admet le recours de l’assurée.

 

Arrêt 8C_515/2024 consultable ici

 

Proposition de citation : 8C_515/2024 (d) du 23.05.2025, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2025/08/8c_515-2024)

 

 

8C_326/2023 (d) du 06.10.2023 – Chute sur l’épaule – Coiffe des rotateurs – Causalité naturelle / 6 LAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_326/2023 (d) du 06.10.2023

 

Consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Chute sur l’épaule – Coiffe des rotateurs – Causalité naturelle / 6 LAA

 

Assuré, né en 1978, plâtrier. Le 05.01.2021, il a glissé dans un escalier verglacé alors qu’il travaillait. En tombant, il s’est fait une contusion au coccyx et à l’avant-bras droit. Sans consulter un médecin, il a d’abord cessé son travail. En raison de douleurs persistantes, il s’est rendu le 11.01.2021 au service des urgences de l’hôpital C.__, où une contusion du rachis lombaire et une luxation acromio-claviculaire de degré I-II à l’épaule droite ont été diagnostiquées et où une incapacité de travail totale a été attestée du 05.01.2021 au 02.02.2021. Par courrier du 01.04.2021, l’assurance-accidents a reconnu son obligation de verser des prestations en ce qui concerne les conséquences de l’accident pour une durée limitée, du 05.01.2021 jusqu’au 04.04.2021 et a ensuite renvoyé l’assuré à la compétence de la caisse-maladie pour la suite du traitement médical. Par décision du 11.02.2022, confirmée par décision sur opposition le 10.08.2022, l’assurance-accidents a maintenu la clôture du cas au 04.04.2021.

 

Procédure cantonale (arrêt VBE.2022.319 disponible ici)

L’instance cantonale a considéré qu’il fallait se fonder sur les appréciations médicales – probantes – du dossier des 01.04.2021 et 12.01.2022 du médecin-conseil. Les constatations peropératoires effectuées le 31.03.2021 permettent de conclure au degré de la vraisemblance prépondérante à une contusion de l’épaule qui a entraîné une aggravation passagère de l’état dégénératif antérieur avec une discrète brèche osseuse dans la zone du tuberculum minus. Tant le tendon du biceps altéré par la dégénérescence que la rupture de la coiffe des rotateurs réparée lors de l’opération du 31.03.2021 n’auraient, selon toute vraisemblance, pas de lien de causalité avec l’accident. Non seulement ces résultats peropératoires mais également le fait que l’assuré ne se soit rendu au service des urgences pour un premier traitement médical que six jours après la chute dans les escaliers invoquée comme cause de l’accident plaident contre la causalité de l’accident pour la problématique de l’épaule persistante après le 04.04.2021.

La cour cantonale s’est penchée de manière approfondie sur les appréciations de la causalité naturelle et a expliqué les raisons pour lesquelles les appréciations des médecins traitants n’étaient pas en mesure d’éveiller des doutes, même minimes, sur le résultat des preuves et pourquoi il n’y avait pas lieu d’attendre d’autres mesures probatoires dans le cadre d’une appréciation anticipée des preuves des éléments nouveaux essentiels à la décision.

Par jugement du 06.04.2023, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 2.3
Il est établi et incontesté que l’épaule droite contusionnée lors de l’accident présente un état dégénératif antérieur qui, selon l’anamnèse, n’a provoqué aucun symptôme jusqu’au 05.01.2021. Selon le rapport du médecin, ni l’opération du 31.03.2021 ni l’opération de révision de septembre 2021 n’ont eu d’effet positif durable sur les douleurs dont l’assuré se plaint depuis lors.

Consid. 3.2
L’assuré n’apporte aucun élément susceptible de remettre sérieusement en question l’appréciation des preuves et la constatation des faits pertinents en droit effectuées par l’instance cantonale. En particulier, ses objections ne sont pas de nature à éveiller des doutes, même minimes, quant à l’appréciation du médecin-conseil ou à invalider l’argumentation de l’instance cantonale.

L’évaluation du lien de causalité naturelle par le médecin-conseil répond aux réquisits jurisprudentiels (cf. arrêt 8C_167/2021 du 16 décembre 2021 consid. 4.1 avec références ; cf. en outre, concernant la position défendue par swiss orthopädics : arrêt 8C_62/2023 du 16 août 2023 consid. 5.2.2 avec référence à SVR 2021 UV no 34 p. 154, 8C_672/2020 E. 4.5 avec références).

L’assuré se réfère à plusieurs reprises au rapport de son chirurgien traitant du 23.03.2021. Il n’avait toutefois pas encore connaissance des résultats peropératoires du 31.03.2021. Ces résultats ont en revanche été appréciés par le médecin-conseil dans son évaluation du dossier du 12.01.2022. Contrairement à la description de l’assuré, c’est précisément le chirurgien traitant qui a indiqué le 23.03.2021 que l’état de santé s’était plutôt détérioré sous physiothérapie, raison pour laquelle l’assuré souhaitait alors une démarche proactive concernant la planification de l’opération du 31.03.2021. Les publications citées par l’assuré ne modifient pas la valeur probante des appréciations médicales sur dossier du médecin-conseil. En particulier, il ne fait pas valoir et il n’apparaît pas que l’événement accidentel aurait entraîné une aggravation déterminante de l’état dégénératif préexistant.

 

Consid. 5
Le recours étant manifestement mal fondé, il doit être considéré comme voué à l’échec au sens de l’art. 64 al. 1 LTF (arrêt 8C_300/2021 du 23 juin 2021 consid. 6 avec référence). La requête d’assistance judiciaire gratuite doit par conséquent être rejetée.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_326/2023 consultable ici

 

Proposition de citation : 8C_326/2023 (d) du 06.10.2023, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2023/11/8c_326-2023)

9C_548/2015 (f) du 10.03.2016 – Appréciation des preuves – Principe de l’égalité des armes – 6 par. 1 CEDH / Constatations des médecins internes à l’assurance

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_548/2015 (f) du 10.03.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Xr4Rbu

 

Appréciation des preuves – Principe de l’égalité des armes – 6 par. 1 CEDH

Constatations des médecins internes à l’assurance

 

TF

En matière d’appréciation des preuves, il découle du principe de l’égalité des armes, tiré du droit à un procès équitable garanti par l’art. 6 § 1 CEDH, que l’assuré a le droit de mettre en doute avec ses propres moyens de preuve la fiabilité et la pertinence des constatations médicales effectuées par un médecin interne à l’assurance. Le fait, tiré de l’expérience de la vie, qu’en raison du lien de confiance (inhérent au mandat thérapeutique) qui l’unit à son patient, le médecin traitant est généralement enclin à prendre parti pour celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc p. 353 et les références) ne libère pas le juge de son devoir d’apprécier correctement les preuves, ce qui suppose de prendre également en considération les rapports versés par l’assuré à la procédure. Le juge doit alors examiner si ceux-ci mettent en doute, même de façon minime, les conclusions des médecins internes à l’assurance. Poser des exigences trop élevées à la possibilité pour l’assuré de soulever de tels doutes au moyen des rapports de ses médecins traitants porterait atteinte à l’égalité des armes et donc à l’art. 6 § 1 CEDH. Dès lors, lorsque la pertinence des constatations des médecins internes à l’assurance est mise en doute par le biais d’un rapport concluant du médecin traitant, il ne suffit pas de se référer en bloc au mandat thérapeutique qui lie celui-ci à son patient pour écarter les doutes en question. De même, le tribunal ne peut se contenter de retenir de manière globale que le rapport du médecin traitant ne remplit pas, ou seulement partiellement, les exigences d’une expertise au sens de l’ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352, sans examiner concrètement sa valeur probante.

Pour que l’assuré ait une chance raisonnable de soumettre sa cause au juge, sans être clairement désavantagé par rapport à l’assureur, le tribunal ne peut pas, lorsqu’il existe des doutes quant à la fiabilité et la pertinence des constatations des médecins internes à l’assurance, procéder à une appréciation des preuves définitive en se fondant d’une part sur les rapports produits par l’assuré et, d’autre part, sur ceux des médecins internes à l’assurance. Pour lever de tels doutes, il doit soit ordonner une expertise judiciaire, soit renvoyer la cause à l’organe de l’assurance pour qu’il mette en œuvre une expertise dans le cadre de la procédure prévue par l’art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.5 et 4.6 p. 470 s.).

La jurisprudence fédérale sur la notion des doutes quant à la fiabilité et la pertinence des constatations des médecins internes à l’assurance est cohérente. En effet, en fonction des faits de la cause, tels que constatés par la juridiction cantonale, des considérations de celle-ci, ainsi que des motifs et conclusions du recours, la question de savoir si les conclusions du médecin interne à l’assurance sont mises en doute par les constatations du médecin traitant peut être traitée par le Tribunal fédéral sous deux angles différents: d’abord, du point de vue du droit, lorsqu’une violation des règles d’appréciation des preuves entre en ligne de compte. Mais aussi sous l’angle des faits, lorsqu’il s’agit d’examiner le résultat de l’appréciation concrète des documents médicaux par la juridiction cantonale, soit dans le cas d’espèce, l’absence de doutes des premiers juges quant à l’avis du médecin interne à l’assurance malgré les objections des médecins traitants.

En l’espèce, faute de doutes sur la pertinence des constatations du médecin interne à l’assurance, les premiers juges (AI 302/13 – 155/15) n’avaient pas à ordonner d’expertise judiciaire (ou à enjoindre à l’office intimé de mettre en œuvre une expertise auprès d’un médecin externe à l’assurance).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_548/2015 consultable ici : http://bit.ly/1Xr4Rbu

 

 

8C_372/2014 (f) du 12.05.2015 – Rente d’invalidité LAA – 18 LAA / Libre appréciation des preuves par le juge / Pas de droit formel à une expertise menée par un médecin externe à l’assurance

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_372/2014 (f) du 12.05.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1RNf2CM

 

Rente d’invalidité LAA / 18 LAA

Libre appréciation des preuves par le juge

Pas de droit formel à une expertise menée par un médecin externe à l’assurance

 

Assuré, peintre en bâtiment de formation, alors au chômage, glisse sur une plaque de glace le 20.12.2009, chute en se réceptionnant avec son bras droit. Diagnostic : petite déchirure transfixiante ponctuelle du tendon du sus-épineux dans sa partie antéro-supérieure et latérale, associée à une tendinose du long chef du biceps. Arthroscopies de l’épaule droite les 20.04.2010 et 29.11.2010, puis suture ouverte de la coiffe des rotateurs à droite le 19.04.2012.

Après examen par le médecin d’arrondissement, spécialiste en chirurgie orthopédique, reprise de l’activité habituelle avec une pleine capacité de travail peu probable. Capacité de travail exigible à 100% dans une activité qui ne nécessite pas, pour l’épaule droite, des travaux répétitifs, des travaux au-dessus du plan de l’épaule ni le port de charges supérieures à 5 – 10 kg.

Octroi d’une rente d’invalidité LAA de 20% dès le 01.04.2013 et une IPAI de 20%. Pour fixer ce taux, l’assureur-accidents a établi le revenu d’invalide sur la base de cinq descriptions de postes de travail (DPT) compatibles avec les limitations attestées, à savoir trois emplois de collaborateur de production, des emplois d’agent professionnel de sécurité et de surveillance, ainsi que d’ouvrier sur métal.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 31.03.2014, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 18 al. 1 LAA, l’assuré a droit à une rente d’invalidité s’il est invalide (art. 8 LPGA) à 10 % au moins par suite d’un accident. Est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée (art. 8 al. 1 LPGA). Aux termes de l’art. 7 al. 1 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur un marché du travail équilibré dans son domaine d’activité, si cette diminution résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles. Chez les assurés actifs, le degré d’invalidité doit être évalué sur la base d’une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigé.

Selon le principe de la libre appréciation des preuves, le juge apprécie librement les preuves médicales qu’il a recueillies, sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Aucun élément ne permet de mettre en cause la valeur probante du rapport du médecin d’arrondissement (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352; 122 V 157 consid. 1c p. 160 et les références).

Il n’existe pas, dans la procédure d’octroi ou de refus de prestations d’assurances sociales, de droit formel à une expertise menée par un médecin externe à l’assurance, lorsqu’il ne subsiste pas de doutes, mêmes faibles, quant à la fiabilité et à la pertinence des constatations médicales effectuées à l’interne (ATF 135 V 465).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré et confirme le jugement cantonal.

 

 

Arrêt 8C_372/2014 consultable ici : http://bit.ly/1RNf2CM