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9C_744/2023 (f) du 10.06.2024 – Délai de paiement de l’avance de frais – Demande d’assistance judiciaire / Pas de formalisme excessif du tribunal cantonal

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_744/2023 (f) du 10.06.2024

 

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Délai de paiement de l’avance de frais – Demande d’assistance judiciaire adressée à l’autorité insuffisamment ou non motivée par l’assuré assisté d’un avocat / 61 let. fbis LPGA – 69 al. 1bis LAI – 47 al. 2 LPA-VD

Pas de formalisme excessif du tribunal cantonal

 

Par décision du 23.06.2023, l’office AI a rejeté une demande de prise en charge des frais d’un perfectionnement professionnel déposée par l’assurée.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 240/23 – 282/2023 – consultable ici)

Le 30 août 2023, l’assurée a adressé au tribunal cantonal, un « Mémoire de recours » à l’encontre de la décision du 23.06. 2023.

Par ordonnance du 04.09.2023, le juge instructeur a imparti à l’assurée un délai échéant au 02.10.2023 pour verser une avance de frais de CHF 600, à peine d’irrecevabilité du recours ; il était précisé que ce délai pouvait être prolongé sur requête, respectivement que l’assistance judiciaire pouvait être accordée à certaines conditions, la demande devant être présentée à la Cour des assurances sociales.

Le 29.09.2023, l’assurée a requis une prolongation du délai de paiement de l’avance de frais, car elle était « en train de réunir les pièces nécessaires au dépôt d’une demande d’assistance judiciaire ». Par ordonnance du 03.10.2023, le juge instructeur a accordé à l’assurée une « unique prolongation de délai » au 18.10.2023 pour effectuer l’avance de frais. Par écriture de ce jour-là, l’assurée a fait savoir qu’une demande d’assistance judiciaire avait été adressée postérieurement au dépôt du recours, que cette demande était en cours, et qu’elle était toujours dans l’attente des pièces en cause ; elle se voyait donc contrainte de requérir une nouvelle prolongation de délai « dans l’attente qu’il soit statué sur la demande d’assistance judiciaire ».

Par arrêt du 25.10.2023, la juridiction cantonale a déclaré le recours irrecevable.

 

TF

Consid. 5.1
L’autorité cantonale a constaté qu’elle n’avait pas été saisie d’une demande d’assistance judiciaire, ce qui est exact à la lecture du dossier cantonal. Devant le Tribunal fédéral, la recourante admet qu’elle n’a pas formellement déposé une telle demande, exposant qu’elle était dans l’attente des pièces devant accompagner le formulaire de demande d’assistance judiciaire.

Consid. 5.1.1
Il convient de distinguer l’éventualité où une demande d’assistance judiciaire adressée à l’autorité est insuffisamment ou non motivée, de l’absence de dépôt d’une telle requête.

Consid. 5.1.2
Le Tribunal fédéral a récemment rappelé que dans le cas où une requête d’assistance judiciaire est lacunaire, le juge doit inviter la partie à compléter les informations et les pièces fournies. Ce devoir d’interpellation vaut avant tout pour les personnes non assistées d’un mandataire professionnel et juridiquement inexpérimentées. En revanche, lorsque le plaideur est assisté d’un avocat ou est lui-même expérimenté, l’obligation de collaborer est accrue dans la mesure où il a connaissance des conditions nécessaires à l’octroi de l’assistance judiciaire et des obligations de motivation y relatives. Dans cette dernière éventualité, le juge n’a pas d’obligation d’octroyer un délai supplémentaire à la partie pour compléter sa requête d’assistance judiciaire lacunaire ou imprécise (ATF 120 Ia 179 consid. 3a; arrêt 5A_327/2017 du 2 août 2017 consid. 4.1.3 et les références citées; ordonnance 9C_160/2024 du 6 juin 2024 consid. 3).

Consid. 5.1.3
A fortiori, on doit admettre qu’il en va de même lorsqu’un assuré indique qu’il est en train de recueillir des pièces nécessaires au dépôt d’une demande d’assistance judiciaire qu’il n’a pas encore remise à l’autorité. En effet, lorsque le plaideur est expérimenté ou est assisté d’un avocat, on peut raisonnablement attendre de sa part qu’il conclue formellement à l’octroi de l’assistance judiciaire s’il entend l’obtenir, de surcroît en temps utile, en exposant que la production des justificatifs dont il ne dispose pas encore interviendra ultérieurement.

Comme l’assurée a été informée qu’elle pouvait obtenir l’assistance judiciaire à certaines conditions, notamment qu’elle devait en faire la demande à l’autorité judiciaire (cf. ordonnance du 09.04.2023), il n’incombait plus au juge d’accompagner son avocat dans de telles démarches, ni de lui rappeler une nouvelle fois les termes de cette ordonnance.

Consid. 5.2
S’agissant de l’avance de frais, l’instance cantonale avait clairement indiqué à l’assurée, par ordonnance du 03.10.2023, qu’une « unique prolongation de délai » au 18.10.2023 lui était accordée pour l’effectuer. Si l’on suivait le raisonnement de l’assurée, une partie pourrait en définitive décider à sa guise de s’en tenir ou non aux directives de l’autorité judiciaire, sans que cela puisse avoir d’incidence sur la suite de la procédure; l’art. 47 al. 2 et 3 LPA-VD serait ainsi dénué de toute portée.

Pour obtenir une nouvelle prolongation du délai de paiement de l’avance de frais, l’assurée a soutenu qu’elle avait déposé une demande d’assistance judiciaire (cf. lettre du 18.10.2023), ce qui s’est révélé erroné. Pareille argumentation ne justifie pas de prolonger à nouveau un délai qui avait précédemment déjà été prolongé « pour la dernière fois ».

Consid. 5.3
Vu ce qui précède, l’autorité cantonale pouvait rendre une décision d’irrecevabilité, sans faire preuve de formalisme excessif. Sur ce point, le recours est infondé.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 9C_744/2023 consultable ici

 

9C_40/2024 (f) du 13.06.2024 – Preuve du paiement depuis un compte d’une banque étrangère de l’avance des frais / 37 LTAF – 63 al. 4 PA – 21 al. 3 PA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_40/2024 (f) du 13.06.2024

 

Consultable ici

 

Preuve du paiement depuis un compte d’une banque étrangère de l’avance des frais / 37 LTAF – 63 al. 4 PA – 21 al. 3 PA

 

Par décision du 21.08.2023, l’office AI a rejeté la nouvelle demande de prestations présentée en septembre 2022 par l’assurée, domiciliée en Espagne.

 

Procédure cantonale (arrêt C-5127/2023 – consultable ici)

Saisi d’un recours de l’assurée contre cette décision, le Tribunal administratif fédéral l’a déclaré irrecevable au motif que l’avance de frais requise n’avait pas été acquittée dans le délai imparti (arrêt du 04.12.2023).

 

TF

Consid. 3.1
Selon l’art. 63 al. 4 PA (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2007, applicable par renvoi de l’art. 37 LTAF), l’autorité de recours, son président ou le juge instructeur perçoit du recourant une avance de frais équivalant aux frais de procédure présumés. Elle lui impartit pour le versement de cette créance un délai raisonnable en l’avertissant qu’à défaut de paiement elle n’entrera pas en matière. Si des motifs particuliers le justifient, elle peut renoncer à percevoir la totalité ou une partie de l’avance de frais. Aux termes de l’art. 21 al. 3 PA (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2007, applicable par renvoi de l’art. 37 LTAF), le délai pour le versement d’avances est observé si, avant son échéance, la somme due est versée à La Poste Suisse ou débitée en Suisse d’un compte postal ou bancaire en faveur de l’autorité. Cette disposition correspond aux art. 48 al. 4 LTF, 143 al. 3 CPC et 91 al. 5 CPP (ATF 143 IV 5 consid. 2.4; 139 III 364 consid. 3.1).

Consid. 3.2
Le moment déterminant pour constater l’observation ou l’inobservation du délai est celui auquel la somme a été versée en faveur de l’autorité à La Poste Suisse (que ce soit au guichet d’un bureau de poste ou lors d’un transfert depuis l’étranger) ou celui auquel l’ordre de paiement en faveur de l’autorité a été débité du compte postal ou bancaire du recourant ou de son mandataire (ATF 139 III 364 consid. 3.2.1; arrêt 6B_725/2019 du 28 octobre 2019 consid. 1; cf. aussi Message concernant la révision totale de l’organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4096 s.). Le fait que la somme en cause n’a pas été créditée dans le délai imparti sur le compte de la juridiction concernée n’est pas décisif au regard du droit fédéral si le montant requis a effectivement été débité du compte bancaire du recourant ou de son avocat avant l’échéance du délai prévu (cf. arrêts 9C_101/2018 précité consid. 3.2; 1F_34/2011 du 17 janvier 2012 consid. 2.3.2 in SJ 2012 I 229). Le fardeau de la preuve s’agissant du respect des délais pour le versement d’avances ou de sûretés incombe à la partie qui entend s’en prévaloir (ATF 143 IV 5 consid. 2.4; arrêt 6B_725/2019 précité consid. 1).

Consid. 3.3
En cas de transfert de l’avance de frais depuis un compte d’une banque étrangère, il faut non seulement vérifier que le débit dudit compte a été effectué avant l’échéance fixée par l’autorité, mais aussi que dans ce même délai, l’avance a été créditée sur le compte de l’autorité ou, à tout le moins, qu’elle est entrée dans la sphère d’influence de l’auxiliaire (banque ou La Poste Suisse) désigné par celle-ci. Dans cette dernière hypothèse (entrée temporaire du montant dans la sphère d’influence de l’auxiliaire sans que le compte de l’autorité n’ait été crédité), il est par ailleurs nécessaire d’examiner à qui, du justiciable et de sa banque étrangère ou de l’autorité et de son auxiliaire, l’échec de transfert au destinataire final est imputable. S’il est établi que la cause de l’échec se trouve auprès du justiciable et/ou de sa banque étrangère, il faudra encore vérifier si l’erreur pouvait passer pour être excusable ou si, au contraire, elle a été grossière au point qu’on ne puisse s’attendre de la banque de l’autorité qu’elle se renseigne pour tenter néanmoins d’attribuer le montant au compte du destinataire final de la transaction, à savoir l’autorité créancière (cf. arrêt 9C_101/2018 précité consid. 3.3 et les arrêts cités).

Consid. 4.1
En l’occurrence, par décision incidente du 27.09. 2023, le TAF a imparti à l’assurée un délai de trente jours dès la notification de ladite décision pour effectuer une avance de frais de CHF 800, en l’avertissant que faute de versement dans le délai imparti, son recours serait déclaré irrecevable. Cette décision a été notifiée à l’assurée le 04.10.2023. Le délai de paiement est arrivé à échéance le 03.11.2023, sans que l’assurée n’ait versé l’avance de frais requise ni sollicité une prolongation de délai pour ce faire.

Consid. 4.2
À la lecture de l’avis de transfert établi par la banque de l’assurée le 13.10.2023, on constate que cette dernière a donné l’ordre de verser la somme de CHF 800 en faveur du TAF, sur le compte CH05300XXX. Le 22.12.2023, soit après que l’arrêt entrepris du 04.12.2023 lui a été notifié le 14.12.2023, l’assurée a donné un nouvel ordre à sa banque de verser au TAF la somme de CHF 800, sur le compte CH05409XX. Le 18.01.2024, cette autorité a informé l’assurée que le montant crédité sur son compte le 28.12.2023 lui était retourné.

Consid. 4.3
En ce qu’elle se contente d’indiquer que sa banque a commis une erreur dans la désignation du compte bancaire du TAF le 13.10.2023, erreur dont elle ne s’est pas aperçue avant la notification de l’arrêt entrepris le 14.12.2023, l’assurée n’établit pas – pas plus qu’elle n’allègue – que le montant de l’avance de frais requise aurait bien été crédité sur le compte de l’autorité ou, à tout le moins, qu’il serait bien entré dans la sphère d’influence de l’auxiliaire (banque ou La Poste Suisse) désigné par celle-ci, dans le délai imparti. Les pièces produites par l’assurée ne le démontrent pas non plus. En particulier, l’avis de transfert établi par la banque de l’assurée le 13.10.2023 ne contient aucune précision quant à la date à laquelle la somme de CHF 800 aurait été versée à la banque bénéficiaire (PostFinance) en faveur du TAF. Dans la mesure où l’assurée n’établit pas une entrée temporaire du montant de l’avance de frais dans la sphère d’influence de l’auxiliaire sans que le compte de l’autorité n’ait été crédité, il n’est pas nécessaire d’examiner à qui, de la justiciable et de sa banque étrangère ou de l’autorité et de son auxiliaire, l’échec de transfert au destinataire final est imputable (comp. arrêt 9C_691/2008 du 23 septembre 2009 consid. 4). À cet égard, sur demande du Tribunal fédéral, PostFinance a confirmé, le 27.05.2024, n’avoir trouvé aucune rentrée d’argent en relation avec l’émission de transfert du 13.10.2023. C’est donc à bon droit que le TAF a déclaré le recours irrecevable.

Enfin, l’assurée ne peut pas se prévaloir d’une éventuelle restitution du délai omis, car même une (éventuelle) erreur commise par sa banque lui serait imputable (cf. arrêts 9C_691/2008 précité consid. 4; 1P.366/1992 du 11 août 1993, consid. 2, in RDAT I-1994 n° 57 p. 138). Le recours est mal fondé.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_40/2024 consultable ici

 

4A_247/2022 (d) du 25.07.2022 – Avance des frais – Une décision judiciaire n’est pas un ouvrage / 372 CO – 62 LTF

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_247/2022 (d) du 25.07.2022

 

Consultable ici

NB: traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Avance des frais – Une décision judiciaire n’est pas un ouvrage / 372 CO – 62 LTF

 

Le recourant a déposé un recours auprès du Tribunal fédéral contre la décision du Obergerichts du canton de Zoug et a demandé que Madame la juge fédérale Kiss se récuse et que les « débats » aient lieu au moins en formation tripartite.

Le recourant motive sa demande de récusation par le fait que Madame la juge fédérale Kiss semble être partiale et qu’elle a déjà rendu à quatre reprises une décision de non-entrée en matière à son encontre et qu’elle ne semble en principe pas entrer en matière sur les recours de justiciables non assistés d’un avocat. Le recourant ne fait ainsi manifestement pas valoir de motifs de récusation valables à l’encontre de Madame la juge fédérale Kiss, raison pour laquelle il n’y a pas lieu d’entrer en matière sur la demande de récusation.

Par ordonnance du 01.06.2022, le recourant a été invité à verser, au plus tard le 17.06.2022, une avance de frais de 500 francs pour la procédure au Tribunal fédéral. Le prénommé a formé un recours contre cette décision, selon lui nulle, par requête du 07.06.2022 adressée à la présidente du Tribunal fédéral, en méconnaissant le fait qu’aucun recours n’est ouvert contre les décisions du Tribunal fédéral. Il a simultanément demandé la récusation de la présidente de la première Cour de droit civil, Madame la juge fédérale Hohl, et exigé que le recours soit transmis à une autre Cour du Tribunal fédéral pour y être jugé. Cette demande de récusation, formulée contre la présidente et contre tous les membres de cette Cour en raison de la prétendue notification injustifiée de la décision d’avance de frais, est manifestement irrecevable et abusive et il n’y a pas lieu d’entrer en matière.

L’avance de frais n’ayant pas été reçue dans le délai imparti, le recourant s’est vu fixer un délai supplémentaire non prolongeable pour le versement de l’avance, soit jusqu’au 11.07.2022, en précisant qu’en cas de retard, le Tribunal fédéral n’entrerait pas en matière sur le recours.

Par une autre demande du 11.07.2022, le recourant a également formé un recours, a priori irrecevable, contre cette décision, adressé à la présidente du Tribunal fédéral. Selon le recourant, les décisions du Tribunal fédéral fixant un délai ou un délai supplémentaire pour le versement d’une avance de frais sont nulles, car contraires à la disposition de l’art. 372 CO, antérieure à l’art. 62 LTF, qui ne permet pas d’exiger une avance. Cette argumentation est manifestement erronée, puisque l’art. 372 CO ne s’applique pas à la question de savoir si une avance sur frais judiciaires peut être exigée dans les procédures et, le cas échéant, à quel montant ; il convient de répondre à cette question exclusivement selon les lois de procédure spécifiquement applicables aux procédures judiciaires concernées.

Le recourant n’ayant pas versé l’avance de frais dans le délai imparti, il n’y a pas lieu d’entrer en matière sur le recours sur la base de l’art. 62 al. 3 LTF (art. 108 al. 1 let. a LTF).

 

 

Remarques

Il s’agit d’une argumentation originale du recourant : si la décision judiciaire est un ouvrage, il ne doit payer le prix de l’ouvrage, selon l’art. 372 CO, qu’au moment de la livraison et les avances de frais judiciaires sont interdites.

 

 

Arrêt 4A_247/2022 consultable ici

 

Proposition de citation : 4A_247/2022 (d) du 25.07.2022 – Une décision judiciaire n’est pas un ouvrage, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2022/11/4a_247-2022)