Archives de catégorie : Assurance-invalidité AI

AVS, AI et PC : La Commission souhaite examiner en détail les délais de carence valables pour les étrangers

La Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) souhaite réexaminer et, au besoin, durcir les conditions auxquelles les citoyens étrangers doivent satisfaire pour percevoir une rente AVS, des prestations de l’AI ou des prestations complémentaires. Elle a donné suite à trois initiatives parlementaires allant dans ce sens, déposées par le groupe UDC.

 

Par 12 voix contre 12, avec la voix prépondérante de son président, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) a donné suite à l’initiative parlementaire «Rentes AVS. Prolongation du délai de cotisation» (14.429 n). Aux termes de cette initiative, les citoyens suisses et étrangers devront avoir cotisé à l’AVS pendant deux ans au moins (et non un an, comme le prévoit le droit actuel) pour pouvoir prétendre à une rente AVS. La commission souhaite procéder à une comparaison internationale des conditions applicables à la perception des rentes ; elle entend examiner en détail ces conditions et, si nécessaire, effectuer certaines adaptations pour éviter que des citoyens étrangers n’immigrent en Suisse peu avant l’âge de la retraite afin de bénéficier d’une rente AVS.

La CSSS-N a également donné suite, par 12 voix contre 10 et 1 abstention, à l’initiative parlementaire «Prestations complémentaires. Délai de carence» (14.427 n). Cette initiative vise en particulier à ce que les citoyens de l’UE et de l’AELE ainsi que les réfugiés soient tenus, au même titre que les autres étrangers, d’avoir résidé dix ans en Suisse pour pouvoir percevoir des prestations complémentaires.

Enfin, par 11 voix contre 11, avec la voix prépondérante de son président, la commission a donné suite à l’initiative parlementaire «Etrangers. Conditions à remplir pour avoir droit à la rente AI» (14.426 n). Son auteur demande que les citoyens étrangers ne puissent prétendre à des prestations de l’AI que s’ils ont versé des cotisations à ce titre pendant deux ans au moins (et non un an, comme le prévoit la législation en vigueur). La commission homologue du Conseil des Etats se prononcera prochainement sur les trois initiatives.

 

 

 

Communiqué de presse du Parlement : http://bit.ly/1Q2CXNR

 

9C_36/2015 (f) du 29.04.2015 – Condition d’assurance – cotisation minimale pour la rente / 36 al. 1 LAI / Nouveau cas d’assurance

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2015 (f) du 29.04.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1LWl9Vc

 

Condition d’assurance – cotisation minimale pour la rente / 36 al. 1 LAI

Nouveau cas d’assurance et survenance d’une atteinte à la santé différente

 

Assurée, ressortissante nigériane née en 1971, arrivée en Suisse en mai 1996. Au mois de septembre 1996, une insuffisance rénale chronique a été diagnostiquée, laquelle a nécessité dans un premier temps un traitement par dialyse (dès octobre 1996), puis par greffe (en mars 2001).

Dépôt demande AI le 10.02.2003. Dans le cadre de l’examen de cette demande, l’assurée a bénéficier de diverses mesures d’ordre professionnel qui lui ont permis d’acquérir une formation dans le domaine des soins. L’assurée a été engagée dès juillet 2007 à 60% en qualité d’aide-soignante dans un home pour personnes âgées. Au terme de l’instruction, malgré l’existence reconnue d’une incapacité de gain de 40%, l’office AI a refusé le droit à une rente d’invalidité, au motif que la condition d’assurance n’était pas remplie, l’assurée ne présentant pas une année de cotisations au moins au moment de la survenance de l’invalidité en septembre 1997 (soit à l’échéance du délai de carence d’une année).

Le 03.05.2013, l’assurée, à qui la nationalité suisse avait été accordée dans l’intervalle, a déposé une nouvelle demande de prestations en indiquant souffrir de troubles neurologiques depuis septembre 2011. Le Service médical régional de l’assurance-invalidité (SMR) a retenu l’existence d’une incapacité totale de travailler depuis le 01.03.2013 en raison de lésions démyélinisantes bi-frontales. L’office AI a rejeté la demande de prestations de l’assurée, au motif que le moment déterminant quant à la survenance du cas d’assurance pour la rente était le 01.09.1997, date à laquelle l’assurée ne répondait pas aux conditions d’assurance.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a retenu que dès le moment où l’assurée avait obtenu la nationalité suisse, l’examen du droit à des prestations de l’AI n’était plus soumis à l’exigence de l’année entière de cotisations lors de la survenance de l’invalidité. Par jugement du 04.12.2014, le Tribunal cantonal a admis le recours formé par l’assurée, annulé la décision du 27 mai 2014 et renvoyé la cause à l’office AI pour nouvelle décision.

 

TF

Contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, l’acquisition de la nationalité suisse n’a pas pour effet, en matière de rente d’invalidité, de faire disparaître la condition de la durée minimale de cotisations lors de la survenance de l’invalidité. En vertu de l’art. 36 al. 1 LAI, l’octroi d’une rente ordinaire de l’assurance-invalidité est, quelle que soit la nationalité de la personne assurée, subordonné en effet à une durée minimale de cotisations lors de la survenance de l’invalidité (jusqu’au 31.12.2007: une année de cotisations; depuis le 01.01.2008: trois années de cotisations; voir également arrêt 9C_1042/2008 du 23.07.2009 consid. 3.1, in SVR 2009 IV n° 54 p. 168). Il convient à cet égard de bien distinguer l’art. 6 al. 2 LAI, disposition qui fixe les conditions supplémentaires auxquelles doivent répondre les ressortissants étrangers pour pouvoir bénéficier des prestations de l’assurance-invalidité, de l’art. 36 al. 1 LAI, disposition qui fixe une condition spécifique pour l’octroi d’une rente ordinaire de l’assurance-invalidité. Il résulte par conséquent de ce qui précède que l’assurée doit en tout état de cause pouvoir se prévaloir de trois années de cotisations lors de la survenance de l’invalidité si elle entend prétendre une rente ordinaire de l’AI.

La survenance d’une atteinte à la santé totalement différente de celle qui prévalait au moment du refus de la première demande de prestations et propre, par sa nature et sa gravité, à causer une incapacité de travail de 40 % au moins en moyenne sur une année a, compte tenu de l’absence de connexité matérielle avec la situation de fait prévalant au moment du refus de la première demande de prestations, pour effet de créer un nouveau cas d’assurance (ATF 136 V 369 consid. 3.1 p. 373 et les références; arrêt 9C_294/2013 du 20.08.2013 consid. 4.1 et les références, in SVR 2013 IV n° 45 p. 138; voir également MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3 ème éd. 2014, n. 138 ad art. 4 LAI).

Il n’y a pas lieu de remettre en cause le principe consacré à l’arrêt 9C_294/2013 du 20.08.2013. Même si le Message du Conseil fédéral relatif à un projet de loi modifiant la loi sur l’assurance-invalidité du 27.02.1967, auquel se réfère l’office recourant dans son recours, fait mention d’une « notion générale et unique de la survenance de l’invalidité » (FF 1967 I 677, 692), la jurisprudence a, de longue date, précisé que ce principe n’était pas absolu. Dans un arrêt du 27.07.1966 (cause I 65/66), le TFA mentionnait déjà que si la personne assurée ne remplissait pas à un moment donné les conditions du droit à une prestation, il n’en découlait pas qu’elle se verrait dans tous les cas et à tout jamais privée du bénéfice de l’octroi de toute prestation. Il pouvait tout d’abord se produire une succession de causes d’invalidité différentes qui entraînaient autant de survenances successives de l’invalidité. Bien plus, une seule et même cause d’invalidité pouvait entraîner au cours du temps plusieurs cas d’assurance. Ainsi, le principe de l’unicité cessait d’être applicable lorsque l’invalidité subissait des interruptions notables ou que l’évolution de l’état de santé ne permettait plus d’admettre l’existence d’un lien de fait et de temps entre les diverses phases, qui en devenaient autant de cas nouveaux de survenance de l’invalidité (ATFA 1966 p. 175 consid. 4; voir également MICHEL VALTERIO, Droit de l’assurance-vieillesse et survivants [AVS] et de l’assurance-invalidité [AI], Fribourg 2011, n. 1235 p. 342). De fait, l’arrêt 9C_294/2013 du 20.08.2013 n’a fait que confirmer la jurisprudence initiée à l’ATFA 1966 p. 175.

 

Le TF rejette le recours de l’Office AI. C’est à bon droit que la cause a été renvoyée à l’Office AI pour qu’il examine si les autres conditions du droit à la rente sont réalisées.

 

 

Arrêt 9C_36/2015 consultable ici : http://bit.ly/1LWl9Vc

 

 

 

9C_140/2015 (f) du 26.05.2015 – Déni de justice – 29 al. 1 Cst. / SuisseMED@P et retard dans la mise en œuvre d’une expertise pluridisciplinaire

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_140/2015 (f) du 26.05.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1IJ6V8i

 

Déni de justice / 29 al. 1 Cst.

SuisseMED@P et retard dans la mise en œuvre d’une expertise pluridisciplinaire

 

Assurée bénéficiant d’un quart de rente depuis le 01.05.2005 demande la révision de son droit le 04.09.2007.

Cinq procédures, dont 4 pour déni de justice, le dernier recours étant déposé le 21.11.2014.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/34/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1MeAygL)

Par arrêt du 21.01.2015, le tribunal cantonal a déclaré le recours irrecevable.

 

TF

La notion de déni de justice déduite de l’art. 29 al. 1 Cst., qui confère notamment à toute personne le droit à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable, n’est pas plus large que celle figurant à l’art. 56 al. 2 LPGA, qui prévoit qu’un assuré peut recourir lorsque l’assureur ne rend pas de décision ou de décision sur opposition. Ces deux dispositions consacrent effectivement le principe de la célérité en ce sens qu’elles prohibent toutes deux le retard injustifié à statuer et non le retard injustifié pris dans l’accomplissement des actes d’instruction. Le caractère raisonnable de la durée de la procédure s’apprécie en fonction des circonstances particulières de la cause, notamment l’ampleur et la difficulté de celle-ci ainsi que le comportement du justiciable mais non une surcharge de travail de l’autorité (cf. ATF 125 V 188 consid. 2a p. 191 s. et les références qui, sur ce point, reste applicable depuis l’entrée en vigueur de la LPGA [cf. UELI Kieser, ATSG-Kommentar, 2ème éd. 2009, nos 10, 13 et 14 ad art. 56] comparé à l’ATF 130 I 312 consid. 5.1 et 5.2 p. 331 s. et les références).

L’assurée ne saurait se plaindre d’un refus de statuer en relation avec la question de la réalisation d’une expertise. En effet, l’office AI a rendu le 16.10.2012 la décision incidente qu’il était tenu de rendre en vertu de l’art. 72bis RAI (introduit suite à la publication de l’ATF 137 V 210 qui a apporté de nombreux correctifs à la procédure administrative, en particulier en ce qui concerne la désignation des experts), qui prévoit l’attribution aléatoire des mandats d’expertises pluridisciplinaires comprenant au moins trois disciplines différentes à des centres d’expertise liés à l’OFAS par une convention. Par ailleurs, ce type de décision n’est attaquable ni devant une juridiction de première instance, ni devant le Tribunal fédéral (cf. ATF 139 V 339). Il est conforme au droit (cf. ATF 139 V 349). Il ne laisse en outre place à aucun autre système de désignation des experts (cf. ATF 140 V 507).

SuisseMED@P est une plateforme informatique exploitée par la Conférence des offices AI. Cette plateforme est destinée à mettre en œuvre le système règlementaire et jurisprudentiel de désignation aléatoire des experts dans le contexte d’expertises pluridisciplinaires (cf. consid. 5.1). Le bon fonctionnement de ladite plateforme relève donc des attributions légales des offices AI quant à l’évaluation de l’invalidité (cf. art. 57 let f. LAI) et constitue par conséquent un des éléments sur lesquels la Confédération exerce son devoir général de surveillance (cf. art. 64 LAI). Ce devoir a été délégué au Département fédéral de l’intérieur qui en a lui-même transféré une partie à l’OFAS pour qu’il s’en acquitte de manière indépendante (cf. art. 176 RAVS applicable par renvoi des art. 64 LAI et 72 RAVS). Il n’appartient dès lors pas à une autorité judiciaire de s’exprimer sous l’angle du déni de justice sur les difficultés ou les retards survenus dans le cadre de l’exécution d’une décision entrée en force (cf. arrêt 9C_72/2011 du 20 juin 2011 consid. 2.2 et 2.3), mais il revient à l’OFAS d’intervenir – éventuellement par le biais d’une dénonciation – en exerçant son contrôle sur l’exécution par les offices AI des tâches énumérées à l’art. 57 LAI (cf. art. 64a al. 1 let. a LAI) et en édictant à l’intention desdits offices des directives générales ou portant sur des cas d’espèce (cf. art. 64a al. 1 let. b LAI et 50 al. 1 RAI).

Dans le cas d’espèce, il n’appartient pas à l’autorité judiciaire cantonale de suppléer aux dysfonctionnements rencontrés dans l’exécution d’une décision administrative, de sorte qu’elle ne saurait en aucun cas être tenue de réaliser une expertise judiciaire pour accélérer la procédure, ainsi que le réclamait et le réclame encore l’assurée.

S’agissant des conséquences des dysfonctionnements, le TF relève que le retard pris dans l’exécution d’une décision incidente tendant à la mise en œuvre d’une expertise peut avoir une incidence sur l’ensemble de la procédure et, après l’écoulement d’un certain temps, faire apparaître l’absence de décision finale comme un retard injustifié. Mais tel n’est pas le cas en l’occurrence.

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_140/2015 consultable ici : http://bit.ly/1IJ6V8i

 

 

Lettre-circulaire AI n° 334 : Nouvelle procédure d’instruction pour les atteintes psychosomatiques (arrêt 9C_492/2014 du 03.06.2015)

Nouvelle procédure d’instruction pour les atteintes psychosomatiques (arrêt 9C_492/2014 du 03.06.2015)

 

Consultable ici : LCAI 334

 

Situation de départ

Par arrêt du 3 juin 2015 (9C_492/2014), le Tribunal fédéral a modifié sa pratique en matière d’évaluation du droit à une rente de l’assurance-invalidité en cas de troubles somatoformes douloureux et d’affections psychosomatiques assimilées. La présomption qui prévalait jusqu’à ce jour, selon laquelle ces syndromes peuvent être surmontés en règle générale par un effort de volonté raisonnablement exigible, est abandonnée. Désormais, la capacité de travail réellement exigible des personnes concernées doit être évaluée dans le cadre d’une procédure d’établissement des faits structurée, à la lumière des circonstances du cas particulier et sans résultat prédéfini (consid. 4 de l’arrêt cité).

L’abandon de la présomption du caractère surmontable de la douleur n’a pas d’influence sur l’exigibilité et la nécessité d’une preuve objective (art. 7, al. 2, LPGA). Des évaluations et des limitations subjectives qui ne sont médicalement pas explicables ne peuvent toujours pas être considérées comme des atteintes à la santé invalidantes (sans compter que souvent aucun traitement adéquat n’est suivi). Par conséquent, il faut partir du principe que la personne assurée est valide (consid. 3.7.1 et 3.7.2 de l’arrêt). Un degré d’invalidité qui ouvre le droit à une rente peut être reconnu seulement lorsque les conséquences fonctionnelles sont étayées sans contradiction et selon toute vraisemblance par des constatations médicales basées sur les indicateurs standards (consid. 6 de l’arrêt). La personne assurée continue à supporter le fardeau de la preuve (consid. 6 de l’arrêt).

 

Structure des procédures d’instruction

La nouvelle procédure d’instruction doit se baser sur les indicateurs suivants :

A. Catégorie « degré de gravité fonctionnel »

a. Complexe « atteinte à la santé »

i. Expression des éléments pertinents pour le diagnostic

ii. Succès du traitement ou résistance à cet égard

iii. Succès de la réadaptation ou résistance à cet égard

iv. Comorbidités

b. Complexe « personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles)

c. Complexe « contexte social »

 

B. Catégorie « cohérence » (points de vue du comportement)

a. Limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie

b. Poids des souffrances révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation

L’application de la liste des indicateurs doit toujours tenir compte des circonstances du cas particulier.

Il ne s’agit pas d’une checklist où il suffit de cocher des rubriques (consid. 4.1.1 de l’arrêt).

 

La lettre-circulaire AI 334 règle également les cas pendants auprès des Offices AI et des cas ayant déjà fait l’objet d’une décision entrée en force.

 

 

LCAI 334 consultable ici : LCAI 334

L’arrêt  9C_492/2014 est résumé ici : Affections psychosomatiques et rente de l’AI : le TF modifie sa jurisprudence

 

 

Le Conseil fédéral a réexaminé le système d’évaluation de l’invalidité

Le Conseil fédéral a réexaminé le système d’évaluation de l’invalidité

 

Le Conseil fédéral est favorable, sur le fond, au maintien du système actuel d’évaluation du taux d’invalidité dans l’assurance-invalidité. Conscient de l’importance croissante du travail à temps partiel, il propose toutefois d’optimiser l’application de la méthode utilisée pour les travailleurs à temps partiel.

 

Sur mandat du Parlement (postulat Jans Beat, 12.3960 : « Assurance-invalidité. Les travailleurs à temps partiel sont désavantagés »), le Conseil fédéral a élaboré un rapport très complet qui étudie les différentes méthodes d’évaluation de l’invalidité des personnes travaillant à temps partiel, analyse les raisons des différences de traitement en fonction du statut professionnel de l’assuré et évalue plusieurs pistes alternatives.

 

Les méthodes d’évaluation de l’invalidité

La méthode appliquée pour évaluer le taux d’invalidité est différente selon qu’une personne travaille à plein temps ou n’exerce pas d’activité lucrative. Par conséquent, une même atteinte à la santé ne débouche pas nécessairement sur le même taux d’invalidité, puisque celui-ci dépend aussi des exigences et des limitations propres à l’activité exercée jusque-là.

Pour les personnes qui travaillent à temps partiel tout en accomplissant des tâches familiales et ménagères (travaux habituels), l’assurance a recours à une méthode mixte : les taux d’invalidité sont calculés séparément dans les deux domaines, puis pondérés. Il en résulte bien souvent des taux d’invalidité moins élevés que pour les personnes qui travaillent à temps plein. C’est cette situation que le Parlement critique dans son intervention.

Le rapport met en évidence certaines failles dans l’évaluation du taux d’invalidité des personnes travaillant à temps partiel. Il montre les raisons pour lesquelles l’utilisation de la méthode mixte peut conduire à des taux d’invalidité moins élevés et examine différentes pistes alternatives susceptibles d’améliorer la situation par la voie législative.

Il parvient à la conclusion que certaines pistes ne permettraient pas d’améliorer le système. D’autres amélioreraient certes la situation des personnes travaillant à temps partiel, mais occasionneraient d’importants coûts supplémentaires et seraient donc inconciliables avec les mandats d’assainissement de l’assurance-invalidité confiés par le Parlement.

 

Possibilité d’optimisation

Le Conseil fédéral attache beaucoup d’importance à une meilleure conciliation entre activité professionnelle et vie familiale, objectif qui implique que l’exercice d’une activité à temps partiel n’engendre pas de conséquences négatives pour le droit aux prestations des assurances sociales. Etant donné l’importance croissante du travail à temps partiel en Suisse, il propose une meilleure prise en compte des interactions entre l’activité lucrative et les tâches familiales et ménagères : les répercussions négatives que les charges liées à l’exercice d’une activité lucrative peuvent avoir sur l’accomplissement des travaux habituels, et inversement, seront mieux prises en compte. Ces deux domaines ne seront désormais plus considérés comme totalement indépendants l’un de l’autre. L’évaluation médicale de l’incapacité de travail se basera sur le taux d’occupation effectif (et non sur l’hypothèse d’une activité à plein temps) et tiendra compte du temps qui doit être consacré aux travaux habituels. Cette amélioration sera mise en œuvre lors de la prochaine révision du règlement.

 

 

Communiqué de presse du 01.07.2015 consultable ici : http://bit.ly/1LHPwid

 

 

Rapport complet (36 pages), en français, consultable ici : http://bit.ly/1f0UsS6

 

9C_492/2014 (d) du 03.06.2015 – Affections psychosomatiques et rente de l’assurance-invalidité : le Tribunal fédéral modifie sa jurisprudence

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_492/2014 (d) du 03.06.2015 – destiné à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1BitLCh

 

Communiqué de presse du TF du 17.06.2015 : http://bit.ly/1G3b8i4

 

Le Tribunal fédéral modifie sa pratique en matière d’évaluation du droit à une rente de l’assurance-invalidité en cas de troubles somatoformes douloureux et d’affections psychosomatiques assimilées. La présomption qui prévalait jusqu’à ce jour, selon laquelle ces syndromes peuvent être surmontés en règle générale par un effort de volonté raisonnablement exigible, est abandonnée. Désormais, la capacité de travail réellement exigible des personnes concernées doit être évaluée dans le cadre d’une procédure d’établissement des faits structurée, à la lumière des circonstances du cas particulier et sans résultat prédéfini.

 

Par le biais de l’arrêt de principe ATF 130 V 352 de 2004 et des arrêts qui ont suivi, le Tribunal fédéral avait fixé, dans le cadre de l’examen des conditions du droit à une rente de l’assurance-invalidité, les principes juridiques régissant l’évaluation des symptomatologies douloureuses sans substrat organique objectivable (autrement appelées « troubles somatoformes douloureux ») et des autres affections psychosomatiques assimilées. Le présent arrêt donne lieu à une modification de la pratique en la matière.

Le Tribunal fédéral tient ainsi compte de l’expérience accumulée au cours des onze années qui se sont écoulées depuis l’arrêt de principe précité ainsi que des critiques formulées par la doctrine médicale et juridique à l’encontre de cette jurisprudence et de sa mise en œuvre.

Un point central de ce changement de pratique concerne la renonciation à la présomption du caractère surmontable de la douleur. Selon la jurisprudence qui prévalait jusqu’à ce jour, il fallait partir du principe que les affections psychosomatiques pouvaient être surmontées par un effort de volonté raisonnablement exigible, si bien que les personnes concernées n’avaient en règle générale aucun droit à une rente de l’assurance-invalidité. Seule l’existence de certains facteurs déterminés pouvaient, exceptionnellement, faire apparaître la réintégration dans le processus de travail comme n’étant pas exigible. Ce système construit sur le modèle règle/exception est désormais remplacé par une procédure d’établissement des faits structurée. La capacité de travail réellement exigible de la personne concernée doit être évaluée sur la base d’une vision d’ensemble, à la lumière des circonstances du cas particulier et sans résultat prédéfini. Cette évaluation doit se dérouler sur la base d’un catalogue d’indices qui rassemble les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique. Cette nouvelle jurisprudence ne modifie en rien l’exigence légale selon laquelle il ne saurait y avoir incapacité de gain propre à entraîner une invalidité que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable. La personne assurée continue à supporter le fardeau de la preuve.

Eu égard aux indices retenus, il conviendra, plus qu’avant, de tenir compte des effets de l’atteinte à la santé sur les aptitudes de la personne concernée à exercer son travail et les fonctions de sa vie quotidienne. La phase diagnostique devra mieux prendre en considération le fait qu’un diagnostic de « trouble somatoforme » présuppose un degré certain de gravité. Le déroulement et l’issue des traitements thérapeutiques et des mesures de réadaptation professionnelle fourniront également des conclusions sur les conséquences de l’affection psychosomatique. Il conviendra également de mieux intégrer la question des ressources personnelles dont dispose la personne concernée, eu égard en particulier à sa personnalité et au contexte social dans lequel elle évolue. Joueront également un rôle essentiel les questions de savoir si les limitations alléguées se manifestent de la même manière dans tous les domaines de la vie (travail et loisirs) et si la souffrance se traduit par un recours aux offres thérapeutiques existantes.

Droit et médecine devront œuvrer de concert pour, d’une part, préciser ces indices et, d’autre part, les mettre en œuvre dans les cas particuliers. Il appartiendra aux Sociétés médicales de discipline d’établir à l’attention des experts médicaux les directives – reflétant le consensus le plus récent sur la question – destinées à concrétiser ces indices.

 

 

Arrêt 9C_492/2014 consultable ici : http://bit.ly/1BitLCh

 

NB : L’assurée était défendue par l’excellent Me David Husmann. Cela sera d’autant plus intéressant de lire (et traduire) cet arrêt de principe.

 

 

9C_637/2014 (f) du 06.05.2015 – Revenu d’invalide – Abattement de 15% sur salaire statistique confirmé

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_637/2014 (f) du 06.05.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1AW96Dt

 

Revenu d’invalide / 16 LPGA

Abattement de 15% pour tout travail de type semi-sédentaire n’impliquant pas le port de charges excessives et permettant de varier les positions (CT 50%)

 

Assuré, travaillant comme chef de cuisine d’août 1989 à août 2009, souffre de cervico-lombalgies. Incapacité de travail dès le 03.10.2008, puis licencié pour le 31.08.2009.

Rapport du SMR du 15.10.2010 : diagnostics avec effet sur la capacité de travail : cervicalgies chroniques, lombosciatalgies irritatives et gonalgies bilatérales chroniques sur gonarthrose. Capacité de travail nulle dans l’activité habituelle. Capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, dès septembre 2010. Limitations fonctionnelles à prendre en compte : activité de type semi-sédentaire n’impliquant pas le port de charges excessives et permettant de varier les positions.

L’Office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (l’office AI) a fixé à 77’521 fr. le revenu (sans invalidité) que l’assuré aurait été en mesure de réaliser en 2010 (revenu annuel 2007 réactualisé) sans l’atteinte à la santé. Quant au revenu d’invalide de 31’341 fr., l’administration l’a établi sur la base des statistiques salariales de l’ESS pour l’année 2010, table TA1, niveau 3, compte tenu d’une capacité de travail de 50%, en appliquant un abattement de 15% sur le salaire statistique. La perte de gain s’élevant à 60% (31’341 / 77’521), l’office AI a alloué à l’assuré un trois-quarts de rente d’invalidité à partir du 1 er février 2010, par décision du 22.05.2013.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/801/2014 – consultable ici : http://bit.ly/1Ki7h68)

Les limitations retenues par la cour cantonal, sur avis des médecins y compris ceux du SMR, sont : éviter le port de charges de plus de 5kg, les activités en hauteur, les mouvements d’antépulsion ou d’abduction, les positions statiques prolongées en flexion-extension du rachis cervical, les mouvements brusques de rotation du rachis cervical, la position statique assise au-delà de 45mn, les montées et descentes d’escaliers, les génuflexions, la marche sur terrain instable, les positions statiques de type piétinement, alterner les positions au moins une fois par heure, limiter le périmètre de marche à environ 15-20 minutes. Selon les juges cantonaux, il faut tenir compte en l’occurrence de l’âge de l’assuré – 55 ans en 2010 -, du fait qu’il a toujours exercé comme chef de cuisine auparavant – et qu’il lui faudra donc fournir un effort conséquent pour pouvoir se réinsérer dans une autre activité, effort souligné par les Établissements pour l’intégration – et que seule une activité à taux réduit est désormais envisageable. La cour cantonale a considéré que le taux d’abattement de 25 % sollicité par l’assuré ne paraît pas exagéré.

Ainsi, le tribunal cantonal a porté le facteur d’abattement sur le revenu d’invalide de 15% à 25%, ce qui a eu pour effet de réduire le revenu d’invalide à 22’936 fr. et d’accroître le degré d’invalidité de 60 % à 70 % (22’936 / 77’521). Par jugement du 27.06.2014, le tribunal a admis le recours et mis l’assuré au bénéfice d’une rente entière d’invalidité à compter du 01.02.2010.

 

TF

Lorsque la juridiction cantonale examine l’usage qu’a fait l’administration de son pouvoir d’appréciation pour fixer l’étendue de l’abattement sur le revenu d’invalide, elle doit porter son attention sur les différentes solutions qui s’offraient à l’organe de l’exécution de l’assurance-invalidité et voir si un abattement plus ou moins élevé (mais limité à 25 % [ATF 126 V 75]) serait mieux approprié et s’imposerait pour un motif pertinent, sans toutefois substituer sa propre appréciation à celle de l’administration (ATF 137 V 71 consid. 5.2 p. 73).

Les juges cantonaux ont pris deux fois en compte les limitations fonctionnelles (dans la capacité de travail et dans l’abattement) et il est donné une importance différente suivant la phase du calcul dans laquelle on se trouve (50% au moment de fixer initialement l’incapacité de travail, mais plus de 50% lorsqu’il s’agit de déterminer l’abattement sur le salaire statistique), ce qui paraît singulier.

Par ailleurs, les spécificités de l’activité exigible à 50% (tout travail de type semi-sédentaire n’impliquant pas le port de charges excessives et permettant de varier les positions) ne sauraient jouer un rôle significatif sur les perspectives salariales dans le cadre de l’exercice d’une activité adaptée, pas plus que l’âge de l’intimé (âgé de 55 ans en 2010).

Une réduction globale de 25%, qui correspond au maximum autorisé par la jurisprudence en présence de circonstances personnelles et professionnelles particulièrement défavorables, ne tient pas raisonnablement compte de la réalité de la situation. Pour retenir l’abattement de 25%, la juridiction cantonale a substitué sa propre appréciation à celle de l’assuré par le biais d’une argumentation sinon contradictoire du moins fort discutable, exerçant son pouvoir d’appréciation de manière non-conforme au droit.

Le TF admet le recours de l’Office AI, annule le jugement cantonal et confirme la décision du 22.05.2013 de l’Office AI.

 

 

Arrêt 9C_637/2014 consultable ici : http://bit.ly/1AW96Dt

 

 

 

 

 

9C_885/2014 (f) du 17.04.2015 – Retrait et restitution de l’effet suspensif – Moyens auxiliaires octroyés par l’AI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_885/2014 (f) du 17.04.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1GkjreR

 

Retrait ou la restitution de l’effet suspensif

 

L’Office cantonal AI du Valais (ci-après: l’office AI) a procédé à la reconsidération de sa communication du 14.07.2014, par laquelle il avait remis en prêt à l’assuré, à titre de moyens auxiliaires, un fauteuil roulant manuel ainsi que divers accessoires y relatifs, et exigé la restitution immédiate desdits moyens auxiliaires. Il a dans le même temps retiré l’effet suspensif à un éventuel recours.

 

Procédure cantonale

La Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais a rejeté la demande de restitution de l’effet suspensif au recours déposée.

La juridiction cantonale a relevé que les moyens auxiliaires mis à disposition de l’assuré perdraient nécessairement de la valeur durant la procédure de recours – laquelle pourrait durer plusieurs mois -, respectivement allaient s’user voire s’endommager, de sorte qu’ils risquaient de ne plus pouvoir être utilisés, respectivement remis à d’autres assurés susceptibles d’en avoir besoin. L’assuré n’avait fourni aucune garantie qu’il pourrait dédommager l’Office AI à hauteur de la perte de valeur des moyens auxiliaires durant la procédure de recours. A l’inverse, rien n’autorisait à penser qu’il n’existait aucune alternative permettant à l’assuré de bénéficier de l’usage de tels biens jusqu’à droit connu. Celui-ci n’avait pas exposé pour quel motif il ne pourrait pas acquérir, respectivement louer de tels biens durant la procédure. Dans la mesure où le matériel mis à disposition risquait de perdre l’entier de sa valeur au cours de la procédure, respectivement de ne plus être en état d’être remis à un autre assuré, la procédure en restitution pourrait au final n’avoir plus aucun sens. La pesée des intérêts en présence laissait par conséquent entrevoir que l’intérêt de l’Office AI à ne pas continuer de mettre les moyens auxiliaires à disposition l’emportait sur celui du recourant à pouvoir bénéficier de ces mêmes prestations jusqu’à droit connu sur son recours.

 

TF

Une décision portant sur le retrait ou la restitution de l’effet suspensif est une décision incidente en matière de mesures provisionnelles (arrêt 9C_191/2007 du 8 mai 2007, in SVR 2007 IV n° 43 p. 143; SEILER/VON WERDT/GÜNGERICH, Bundesgerichtsgesetz, 2007, n° 7 ad art. 98). Lorsque la décision attaquée porte sur l’octroi ou le refus de mesures provisionnelles, la partie recourante ne peut invoquer que la violation des droit constitutionnels (art. 98 LTF; arrêt 2C_309/2008 du 13 août 2008 consid. 3.2) et le Tribunal fédéral n’entre en matière sur le recours que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 II 192 consid. 1.5 p. 197, 133 III 393 consid. 6 p. 397).

La LPGA ne contient aucune disposition topique en matière d’effet suspensif. Selon l’art. 55 al. 1 LPGA, les points de la procédure administrative en matière d’assurances sociales qui ne sont pas réglés de manière exhaustive aux art. 27 à 54 de la LPGA ou par les dispositions des lois spéciales sont régis par la loi fédérale sur la procédure administrative (PA). L’art. 61 LPGA, qui règle la procédure de recours devant le tribunal cantonal des assurances, renvoie quant à lui à l’art. 1 al. 3 PA. Aux termes de cette disposition, l’art. 55 al. 2 et 4 PA relatif au retrait de l’effet suspensif est applicable à la procédure devant les autorités cantonales de dernière instance qui ne statuent pas définitivement en vertu du droit public fédéral; est réservé l’art. 97 LAVS relatif au retrait de l’effet suspensif pour les recours formés contre les décisions des caisses de compensation. Selon cette disposition, laquelle est applicable par analogie à l’assurance-invalidité par renvoi de l’art. 66 LAI, la caisse de compensation peut, dans sa décision, prévoir qu’un recours éventuel n’aura pas d’effet suspensif, même si la décision porte sur une prestation pécuniaire, l’art. 55 al. 2 à 4 PA étant pour le surplus applicable.

Conformément à la jurisprudence relative à l’art. 55 PA, la possibilité de retirer ou de restituer l’effet suspensif au recours n’est pas subordonnée à la condition qu’il existe, dans le cas particulier, des circonstances tout à fait exceptionnelles qui justifient cette mesure. Il incombe bien plutôt à l’autorité appelée à statuer d’examiner si les motifs qui parlent en faveur de l’exécution immédiate de la décision l’emportent sur ceux qui peuvent être invoqués à l’appui de la solution contraire. L’autorité dispose sur ce point d’une certaine liberté d’appréciation. En général, elle se fondera sur l’état de fait tel qu’il résulte du dossier, sans effectuer de longues investigations supplémentaires. En procédant à la pesée des intérêts en présence, les prévisions sur l’issue du litige au fond peuvent également être prises en considération; il faut cependant qu’elles ne fassent aucun doute (ATF 124 V 82 consid. 6a p. 88). Le Tribunal fédéral n’annulera la décision de première instance que si la prise en considération d’intérêts essentiels a été omise, si de tels intérêts ont été appréciés de manière manifestement fausse, ou encore si la solution adoptée aboutit à préjuger de manière inadmissible du sort de la cause, ce qui empêcherait une bonne application du droit fédéral (ATF 129 Il 286 consid. 3 p. 289).

Comme le met en évidence l’assuré, l’appréciation retenue dans le jugement entrepris ne prend pas en considération les intérêts à pouvoir maintenir des contacts sociaux, exercer une activité lucrative, se déplacer ou développer son autonomie personnelle. La pesée des intérêts effectuée par la juridiction cantonale est centrée exclusivement sur les conséquences économiques consécutives à la restitution ou non des moyens auxiliaires litigieux. Elle ne discute d’aucune manière des intérêts allégués par l’assuré et, partant, ne donne aucune explication sur les raisons pour lesquelles lesdits intérêts devaient céder le pas aux intérêts (strictement) économiques de l’Office AI. Or force est de constater que le retrait des moyens auxiliaires pose la question de l’exercice de l’autonomie personnelle de l’assuré et, de façon plus générale, de sa qualité de vie. Lorsque le bien-fondé du retrait de moyens auxiliaires est mis en doute par la personne bénéficiaire, comme c’est le cas en l’espèce, sans que celui-ci n’apparaisse de toute évidence justifié, il convient de privilégier, eu égard aux conséquences d’un tel retrait sur la vie de tous les jours, les intérêts de la personne assurée à ceux de l’office AI. Il demeure loisible à l’office intimé, s’il craint que les moyens auxiliaires mis à disposition du recourant se déprécient irrémédiablement, de les remplacer pour la durée de la procédure par des moyens auxiliaires ayant perdu toute valeur résiduelle.

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et restitue l’effet suspensif.

 

 

Arrêt 9C_885/2014 consultable ici : http://bit.ly/1GkjreR

 

 

9C_659/2014 (f) du 13.03.2015 – Notion d’invalidité et de marché équilibré du travail / 7 al. 1 LPGA – 8 al. 1 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_659/2014 (f) du 13.03.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1bxUdex

 

Notion d’invalidité et de marché équilibré du travail / 7 al. 1 LPGA – 8 al. 1 LPGA

 

Dans son arrêt, notre Haute Cour revient, de manière détaille, sur la notion de marché équilibré du travail (cf. consid. 5.3.1 ss de l’arrêt).

 

L’invalidité consiste en une diminution des possibilités de gain de l’assuré sur un marché équilibré du travail si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé et si elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (cf. art. 7 al. 1 et 8 al. 1 LPGA).

La notion de marché équilibré du travail est une notion théorique et abstraite qui sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l’assurance-chômage et ceux qui relèvent de l’assurance-invalidité. Elle implique, d’une part, un certain équilibre entre l’offre et la demande de main d’œuvre et, d’autre part, un marché du travail structuré de telle sorte qu’il offre un éventail d’emplois diversifiés, tant au regard des exigences professionnelles et intellectuelles qu’au niveau des sollicitations physiques (ATF 110 V 273 consid. 4b p. 276; arrêt I 350/89 du 30 avril 1991 consid. 3b, in RCC 1991 p. 329).

Lorsqu’il s’agit d’examiner dans quelle mesure un assuré peut encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de gain sur le marché du travail entrant en considération pour lui (art. 16 LPGA), on ne saurait subordonner la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain à des exigences excessives. Il s’ensuit que pour évaluer l’invalidité, il n’y a pas lieu d’examiner la question de savoir si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s’il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail lorsque les places de travail disponibles correspondent à l’offre de la main d’œuvre (arrêt I 198/97 du 7 juillet 1998 consid. 3b et les références, in VSI 1998 p. 293). On ne saurait toutefois se fonder sur des possibilités de travail irréalistes. Ainsi, on ne peut parler d’une activité exigible au sens de l’art. 16 LPGA, lorsqu’elle ne peut être exercée que sous une forme tellement restreinte qu’elle n’existe pratiquement pas sur le marché général du travail ou que son exercice suppose de la part de l’employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semble exclu de trouver un emploi correspondant (arrêts 9C_984/2008 du 4 mai 2008 consid. 6.2; I 350/89 du 30 avril 1991 consid. 3b, in RCC 1991 p. 329; I 329/88 du 25 janvier 1989 consid. 4a, in RCC 1989 p. 328).

Certes, le Tribunal fédéral a admis dans un arrêt 9C_984/2008 du 4 mai 2009 que les modifications structurelles que peut connaître le marché du travail sont des circonstances dont il y a lieu de tenir compte en matière d’assurance-invalidité lorsque la nature et l’importance de la pathologie constituent des obstacles irrémédiables à la reprise d’une activité lucrative, dans la mesure où un employeur ne prendrait pas le risque d’engager une personne fortement atteinte dans sa santé. Dans ce cas, l’assuré souffrait d’un grave trouble de la personnalité, ne disposait d’aucune capacité de travail et ne pouvait exercer d’activités qu’en milieu protégé. Selon les rapports probants des médecins qui l’avaient examiné, sa capacité de travail ne pouvait être mise en valeur que dans des conditions particulièrement restreintes, soit dans un environnement confiné et protégé, en dehors de tout stress professionnel et social (arrêt 9C_984/2008, consid. 5.2 et 6.2).

En l’espèce, contrairement à ce qui ressort de la jurisprudence citée, l’assurée dispose d’une capacité totale de travail (avec un rendement limité) sur le marché équilibré de l’emploi et pas uniquement dans un milieu protégé, de sorte que la nature et l’importance de sa pathologie ne constituent pas des obstacles irrémédiables à la reprise d’un travail sur un marché qui lui offre un éventail suffisamment large d’activités légères dont un nombre significatif est adapté à ses limitations fonctionnelles (somatiques et neuropsychologiques) et accessibles sans aucune formation particulière. Les métiers de vendeuse dans un kiosque ou d’ouvrière évoqués par l’office AI et le Tribunal fédéral au cours de la procédure ne sont que des exemples. On pourrait encore citer des tâches simples de surveillance, de vérification, de contrôle ou encore des tâches d’approvisionnement de machines ou d’unités de production automatiques ou semi-automatiques.

Au vu des possibilités réelles d’insertion de l’assurée sur le marché équilibré de l’emploi, il n’y a donc pas lieu d’examiner le marché concret du travail. Il n’est de plus ni nécessaire ni même utile d’examiner l’impact d’une hypothétique péjoration des circonstances économiques sur la situation de l’assurée dès lors que, dans le cadre d’un marché équilibré du travail, les postes évoqués seraient toujours disponibles. Si leur accès devait être effectivement rendu plus difficile en raison de l’aggravation mentionnée, ce problème ne relèverait de toute façon pas de l’assurance-invalidité mais de l’assurance-chômage.

 

Arrêt 9C_659/2014 consultable ici : http://bit.ly/1EryQYh

 

 

Assurance-invalidité – faits et chiffres 2014

Assurance-invalidité – faits et chiffres 2014: Le nombre de nouvelles rentes se stabilise et la réadaptation professionnelle progresse

 

Le nombre de nouvelles rentes octroyées par l’assurance-invalidité a diminué de moitié depuis 2003 et s’est stabilisé aux environs de 14 000 depuis 2012. Le nombre des rentes en cours a de nouveau baissé, de 2%, pour s’établir à 225 700 rentes pondérées. Une analyse des données indique qu’il n’existe aucun transfert important de l’AI vers l’aide sociale. En 2014, l’AI a de nouveau mis en œuvre davantage de mesures ayant pour objectif la réadaptation professionnelle des assurés. Elle a en outre détecté 540 cas d’abus.

Le nombre de nouvelles rentes pondérées s’est stabilisé à environ 14’000

En 2014, 14’200 nouvelles rentes pondérées ont été octroyées; la pondération consiste à compter une rente entière pour 1, trois quarts de rente pour 0,75, une demi-rente pour 0,5 et un quart de rente pour 0,25, en vue de chiffrer le coût des rentes. Ainsi, ce nombre a diminué d’environ 50% depuis l’année 2003, où il culminait à 28’200, et il s’est stabilisé depuis 2012 à environ 14’000.

Le nombre de rentes pondérées continue de baisser

En 2014, le nombre de rentes en cours (en Suisse et à l’étranger) a baissé de 4100, soit 2%, pour s’établir à 225’700. De janvier 2002 à janvier 2006, l’effectif des rentes était passé de 220’400 à 257’500. Le relèvement d’une année de l’âge de la retraite des femmes en 2004 a également contribué à cette augmentation, puisque les femmes qui touchaient une rente AI ont été moins nombreuses cette année-là à percevoir une rente de l’AVS. En revanche, depuis 2007, l’effectif des rentes ne cesse de baisser: de janvier 2006 à janvier 2015, il a diminué de 31’800 rentes pondérées (-12%).

La 4e révision de l’AI et la création des services médicaux régionaux ont permis de faire baisser régulièrement le taux de nouvelles rentes depuis 2004. La 5e révision a encore accentué ce recul. Du coup, le déficit annuel de l’assurance a pu être réduit, passant de 1,7 milliard de francs en 2005 à environ 1 milliard en 2010.

Ce déficit est compensé depuis 2011 et jusqu’en 2017 par le financement additionnel provenant d’une augmentation temporaire de la TVA, correspondant à un montant d’environ 1 milliard de francs. L’objectif de la révision 6a, en vigueur depuis le 1er janvier 2012, est de faire en sorte que l’AI ait des comptes équilibrés à partir de 2018, lorsque le financement additionnel aura pris fin, et qu’elle puisse finir de rembourser sa dette envers l’AVS.

En 2014, le nombre des rentes pondérées (somme des rentes entières et des rentes partielles) nouvellement octroyées en Suisse et à l’étranger était de 14 200. Cet indicateur, qui a connu son plus haut niveau en 2003 (28 200), a diminué de moitié en dix ans et s’est stabilisé autour de 14 000 depuis 2012. L’AI recensait 225 700 rentes pondérées en cours en janvier 2015. C’est 4100 ou 2% de moins que l’année précédente et cela correspond à une diminution de 12% par rapport à l’effectif record de 257 500 rentes de janvier 2006.

Pas de transfert important de l’AI vers l’aide sociale

Malgré la diminution de moitié des nouvelles rentes AI en l’espace de dix ans, il n’y a pas eu de transfert important de l’AI vers l’aide sociale. Tel est le résultat d’une analyse actualisée des données des personnes ayant déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l’AI entre 2004 et 2011. Cette analyse visait à savoir dans quelle mesure ces personnes avaient recouru à l’aide sociale avant et après le dépôt de leur demande, et ce en dépendance du fait qu’elles aient finalement obtenu une rente ou une autre prestation de l’AI, ou qu’elles n’en aient reçu aucune.

Forte augmentation des mesures de réadaptation professionnelle

Parallèlement au recul du nombre de nouvelles rentes, on constate une nette augmentation des mesures de réadaptation professionnelle de l’AI depuis 2008. De 2002 à 2014, le rapport entre les personnes touchant de nouvelles rentes et celles bénéficiant de mesures de réadaptation professionnelle s’est plus qu’inversé. Ces données reflètent la transformation de l’AI d’une assurance de rentes en une assurance de réadaptation. Les chiffres disponibles attestent que les mesures de réadaptation ont du succès, même s’il faudra encore attendre pour disposer de données concernant leur effet à long terme.

Lutte efficace contre les abus dans l’AI

En 2014, 2200 nouveaux cas suspects d’abus ont fait l’objet d’une enquête, et l’enquête a été bouclée dans 2310 cas. Les soupçons ont été confirmés dans 540 cas, conduisant l’assurance à réduire ou à supprimer la prestation de rente en cours ou à renoncer à octroyer une rente. L’équivalent de 390 rentes entières a ainsi été économisé, ce qui correspond, par extrapolation, à des économies totales de l’ordre de 144 millions de francs, pour des coûts d’environ 8 millions de francs (6,8 millions pour le personnel et 1,4 million pour les surveillances). Le montant des économies ne comprend pas celles qui peuvent éventuellement en découler pour les prestations complémentaires à l’AI ou pour les rentes d’invalidité du 2e pilier. Dans 54 cas, les offices AI ont réclamé la restitution des prestations indûment perçues, et ils ont porté plainte dans 30 cas.

 

Communiqué de presse du 01.05.2015 ici : http://bit.ly/1GZbaKj

Liens des articles plus détaillés :

Le nombre de nouvelles rentes AI se stabilise : http://bit.ly/1H0RGaQ

Renforcement de la réadaptation professionnelle et réduction du nombre de nouvelles rentes : http://bit.ly/1E8C9jl

Lutte efficace contre les abus dans l’AI : http://bit.ly/1DS8IAw

Transfert de l’AI vers l’aide sociale ? : http://bit.ly/1FPnE8p