Arrêt du Tribunal fédéral 8C_465/2015 (f) du 20.04.2016
Consultable ici : http://bit.ly/1stJGdM
Gain assuré de l’IJ pour salaire soumis à de fortes variations / 15 LAA – 23 al. 3 OLAA – Recommandation ad hoc 3/84
Indemnités de vacances et pour jours fériés non prises en compte
Assuré, travaillant depuis le 05.06.2013 de manière irrégulière en qualité de vendeuse pour un salaire horaire de base de 17 fr. 70, victime d’une chute à vélo le 18.06.2014. L’assurance-accidents a alloué à l’assurée une indemnité journalière d’un montant de 64 fr. 85 pour une incapacité de travail entière, en se fondant sur le salaire perçu durant les mois de mars, avril et mai 2014. La méthode de calcul et le montant de l’indemnité journalière de l’assureur-accidents ont été confirmés par le tribunal cantonal, par jugement du 09.06.2015.
TF
Gain assuré de l’IJ pour salaire soumis à de fortes variations
Selon l’art. 15 LAA, les indemnités journalières et les rentes sont calculées d’après le gain assuré (al. 1). Les bases de calcul dans le temps du gain assuré sont différentes pour l’indemnité journalière et pour la rente (art. 15 al. 2 LAA). Est réputé gain assuré pour le calcul des indemnités journalières le dernier salaire que l’assuré a reçu avant l’accident (art. 15 al. 2, première phrase, LAA), y compris les éléments de salaire non encore perçus et auxquels il a droit (art. 22 al. 3 OLAA).
Conformément à la délégation de l’art. 15 al. 3 LAA, le Conseil fédéral a promulgué des dispositions sur la prise en considération du gain assuré dans des cas spéciaux, pour l’indemnité journalière (art. 23 OLAA) et pour les rentes (art. 24 OLAA). Ces dispositions ont pour but d’atténuer la rigueur de la règle du dernier salaire reçu avant l’accident, lorsque cette règle pourrait conduire à des résultats inéquitables ou insatisfaisants (JEAN-MAURICE FRÉSARD / MARGIT MOSER-SZELESS, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Sécurité sociale, 3ème éd. 2016, n° 183 p. 959; ALEXANDRA RUMO-JUNGO / ANDRÉ PIERRE HOLZER, Bundesgesetz über die Unfall-versicherung [UVG], 4ème éd. 2012, p. 114).
Selon l’art. 23 al. 3 OLAA, lorsque l’assuré n’exerce pas d’activité lucrative régulière ou lorsqu’il reçoit un salaire soumis à de fortes variations, il y a lieu de se fonder sur un salaire moyen équitable par jour.
La Commission ad hoc sinistres LAA (dans laquelle plusieurs assureurs LAA privés, ainsi que la CNA sont représentés) a été créée afin que les divers organismes appliquent la LAA de façon uniforme. Elle émet dans ce but des recommandations (consultables sur le site internet www.uvgadhoc.ch). C’est ainsi qu’elle a établi à l’intention des assureurs-accidents une recommandation pour l’application de l’art. 23 al. 3 OLAA (Recommandation n° 3/84 intitulée « Salaire déterminant pour les personnes exerçant une activité irrégulière et pour les travailleurs temporaires », du 18 juillet 1984, révisée le 31 mars 2014). Selon cette recommandation, pour les personnes exerçant une activité lucrative irrégulière (par exemple travailleurs à la tâche, travailleurs occasionnels, chauffeurs de taxi avec revenu dépendant du chiffre d’affaire), on tiendra compte dans la règle pour fixer l’indemnité journalière du salaire moyen réalisé pendant les trois derniers mois; en cas de très fortes variations, la période de référence peut être étendue au maximum à 12 mois.
Les recommandations de la Commission ad hoc sinistres LAA ne sont ni des ordonnances administratives, ni des directives de l’autorité de surveillance aux organes d’exécution de la loi. Elles ne créent pas de nouvelles règles de droit. Même si elles ne sont pas dépourvues d’importance sous l’angle de l’égalité de traitement des assurés, elles ne lient pas le juge (ATF 139 V 457 consid. 4.2 p. 460 s.; 134 V 277 consid. 3.5 p. 283 et les références citées).
En tant qu’elle prévoit, en règle générale, une période de référence portant sur les trois derniers mois de salaire et qu’elle n’étend cette période à douze mois qu’en cas de « très fortes variations » de salaire, la recommandation n° 3/84 pose des critères simples d’application permettant, dans la mesure du possible, d’assurer une égalité de traitement entre assurés. C’est pourquoi, bien qu’elle ne lie pas le juge, elle n’apparaît pas contraire à la loi, notamment dans la mesure où elle fait une distinction en fonction de l’importance de la variation de salaire. Il n’y a dès lors pas de raison de s’en écarter (voir arrêt 8C_207/2010 du 31 mai 2010 consid. 3.3.1).
Au demeurant, il ressort du calcul opéré par la cour cantonale que l’indemnité journalière calculée sur une période de douze mois est inférieure à l’indemnité fondée sur la période de calcul des trois derniers mois de salaire avant l’accident.
L’assurance-accidents était dès lors fondée à se référer aux trois derniers mois de salaire avant l’accident.
Indemnités de vacances et pour jours fériés non prises en compte
L’assurée critique le fait que les indemnités de vacances (10,64%) et pour jours fériés (2,4%), lesquelles représentent ensemble plus de 12% de son revenu, n’ont pas été prises en compte dans le calcul du gain assuré bien qu’elles aient été soumises à cotisation de l’assurance-accidents obligatoire.
Selon le Tribunal fédéral : de deux choses l’une: soit on suit le mode de calcul de l’assurance-accidents, confirmé par la cour cantonale, et l’on reporte sur une durée de 365 jours le gain obtenu par l’assurée durant les trois derniers mois d’activité (92 jours) après déduction des indemnités de vacances et pour jours fériés (7’395 fr. 70 [2’187 fr. 65 + 2’247 fr. 25 + 2’960 fr. 80]), ce qui donne un gain assuré annuel de 29’341 fr. 65 (7’395 fr. 70 : 92 x 365) et un gain assuré journalier de 80 fr. 40 (29’341 fr. 65 : 365 = 80 fr. 38), soit un montant encore légèrement inférieur au montant admis par la cour cantonale (81 fr. 05). Soit on tient compte des indemnités de vacances et pour jours fériés et l’on obtient, pour les trois derniers mois d’activité, un gain de 8’321 fr. 50 (2’466 fr. 35 + 2’525 fr. 65 + 3’329 fr. 50). Mais dans ce cas, les indemnités en cause, qui représentent environ 13% (10,64% + 2,4% = 13,04%) du salaire de base et qui sont destinées à rémunérer les périodes de repos, ne doivent pas être reportées sur une durée de 365 jours car cela conduirait à tenir compte deux fois de ces périodes (RAMA 1989 n° U 81 p. 382 consid. 2c), mais sur une durée de 318 jours (365 – [13% x 365]). On obtient ainsi un gain assuré annuel de 28’763 fr.40 (8’321 fr. 50 : 92 x 318) et un gain assuré journalier de 78 fr. 80 (28’763 fr.40 : 365), soit un montant également inférieur au montant retenu par la juridiction précédente.
Le TF rejette le recours de l’assuré.
Arrêt 8C_465/2015 consultable ici : http://bit.ly/1stJGdM