Archives par mot-clé : Pénal

6B_974/2014 (f) du 03.07.2015 – Vignette autoroutière collée sur un film adhésif transparent – Falsification des timbres officiels de valeur – 245 CP

Arrêt du Tribunal fédéral 6B_974/2014 (f) du 03.07.2015, proposé à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1kKKpn6

 

Vignette autoroutière collée sur un film adhésif transparent : condamnation du conducteur confirmée

Falsification des timbres officiels de valeur – 245 CP

 

Celui qui colle une vignette autoroutière sur un film adhésif transparent et l’appose ainsi sur son véhicule se rend coupable de falsification de timbres officiels de valeur. Le Tribunal fédéral confirme un jugement du Tribunal pénal fédéral.

 

Le 13 août 2013, l’homme a acquis une vignette autoroutière en Suisse. En France, où il avait stationné son véhicule, il a détaché la vignette de son support et l’a collée sur un film adhésif transparent, dont il a découpé les bords. Puis, il a collé la vignette ainsi modifiée sur le pare-brise de son véhicule. A son passage à la douane franco-suisse, les gardes-frontières ont découvert la manipulation. Le Tribunal pénal fédéral a condamné l’intéressé en août 2014 pour falsification de timbres officiels de valeur à une peine pécuniaire de dix jours-amende avec sursis.

Le Tribunal fédéral rejette le recours du conducteur. Par son comportement, ce dernier a réalisé l’infraction de falsification de timbres officiels de valeur (article 245 du Code pénal). Selon la loi, la vignette n’est plus valable si elle a été détachée de son support sans être collée directement sur le véhicule. Elle perd donc sa valeur si elle est d’abord collée sur un film adhésif. En découpant les bords et en la collant sur le pare-brise, l’intéressé a donné l’impression qu’il s’agissait d’une vignette valable. Peu importe qu’il ait agi pour préserver son pare-brise, pour revendre la vignette à un tiers ou encore pour l’utiliser lui-même sur une seconde voiture. Bien que la vignette ait été falsifiée en France, le droit suisse a été considéré comme étant applicable, car le conducteur avait le dessein d’utiliser la vignette sur les autoroutes suisses.

 

 

Arrêt 6B_974/2014 consultable ici : http://bit.ly/1kKKpn6

 

Communiqué de presse du TF : http://bit.ly/1LqtZoK

 

 

6B_603/2015 (f) du 30.09.2015 – Etat de nécessité excusable – 18 CP / Violation grave des règles de la circulation routière

Arrêt du Tribunal fédéral 6B_603/2015 (f) du 30.09.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1HMIPeq

 

Violation grave des règles de la circulation routière

Etat de nécessité excusable – 18 CP

 

Le dimanche 02.02.2014, à 17h30, un conducteur a circulé au volant de son véhicule sur la route principale de Nyon en direction de La Cure, dans la commune de Gingins, à une allure de 133 km/h, marge de sécurité déduite, alors que la vitesse maximale autorisée sur ce tronçon est de 80 km/h, faisant ainsi un excès de vitesse de 53 km/h.

Par jugement du 03.12.2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte l’a condamné pour violation grave des règles de la circulation routière à une peine pécuniaire de 140 jours-amende à 80 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans, ainsi qu’à une amende de 2’240 fr., convertible en 28 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif, et a mis les frais de la cause à sa charge.

 

Procédure cantonale (arrêt Jug / 2015 / 121 – consultable ici : http://bit.ly/1N59BAW)

Par jugement du 26.03.2015, rejet de l’appel par la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

 

TF

A teneur de l’art. 18 al. 1 CP, si l’auteur commet un acte punissable pour se préserver ou préserver autrui d’un danger imminent et impossible à détourner autrement menaçant la vie, l’intégrité corporelle, la liberté, l’honneur, le patrimoine ou d’autres biens essentiels, le juge atténue la peine si le sacrifice du bien menacé pouvait être raisonnablement exigé de lui. En vertu de l’al. 2, l’auteur n’agit pas de manière coupable si le sacrifice du bien menacé ne pouvait être raisonnablement exigé de lui.

Le danger est imminent lorsqu’il est actuel et concret (ATF 122 IV 1 consid. 3a p. 5; arrêt 6B_322/2014 du 26 juin 2014 consid. 1.1 et les références citées). L’impossibilité que le danger puisse être détourné autrement implique une subsidiarité absolue. La question de savoir si cette condition est réalisée doit être examinée en fonction des circonstances concrètes du cas (cf. ATF 122 IV 1 consid. 4 p. 7; arrêt 6B_322/2014 précité consid. 1.1 et les références citées).

Le conducteur avait pris son véhicule pour amener son épouse non pas à l’hôpital le plus proche, mais à celui de V.__ qui était pourtant plus éloigné. Il avait fait ce choix au motif que cet hôpital avait déjà le dossier de son épouse, car elle y avait accouché de leurs deux enfants, raison qui apparaissait toutefois surprenante, vu l’inquiétude importante que le conducteur avait déclaré avoir ressentie à la suite de la manifestation des douleurs et symptômes de son épouse. Il n’avait pas choisi la voie lui permettant d’obtenir les secours les plus rapides, ni la moins préjudiciable afin de réduire les risques qu’il faisait courir aux autres usagers de la route. En outre, il n’avait pas appelé les secours, alors qu’il avait son portable sur lui. Il ne pouvait en outre être considéré que le conducteur incriminé n’avait pas pris de risque avec sa conduite en raison du fait qu’il était « très attentif et prêt à freiner », l’excès de vitesse de plus de 30 km/h hors des localités commis, sur une route connue pour être fréquentée par de nombreux usagers, représentant un danger abstrait accru. Enfin, une ambulance était mieux à même d’effectuer un trajet urgent qu’un véhicule sans signalisation particulière, car elle bénéficiait d’une priorité et d’une visibilité que celui-ci n’avait pas.

Selon le TF, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, admettre que le conducteur incriminé disposait d’autres moyens, respectant les exigences de sécurité, pour détourner le danger auquel il allègue que sa femme aurait été confrontée et éviter ainsi de faire courir un risque important aux autres usagers de la route, de même qu’à sa famille et à lui-même.

Le TF rejette le recours.

 

 

Arrêt 6B_603/2015 consultable ici : http://bit.ly/1HMIPeq

 

 

6B_256/2014 (d) du 08.04.2014 – Menace proférée envers des amis Facebook ne peut être sanctionnée au titre de « menaces alarmant la population »

« Post » Facebook: le cercle d’amis n’est pas une « population »

 

Arrêt du TF du 08.04.2015 (6B_256/2014 ; http://bit.ly/1H2Y6Fq)

Une menace proférée envers des amis Facebook ne peut être sanctionnée au titre de « menaces alarmant la population ». Le cercle d’amis et de connaissances dans la vie réelle ou virtuelle ne constitue pas une « population ». Forment en revanche une « population » les habitants d’une zone déterminée ou l’ensemble des personnes se trouvant au même moment dans un lieu déterminé. Le Tribunal fédéral annule la condamnation d’un homme par le Tribunal supérieur du canton de Zurich.

 

En mars 2012, l’intéressé avait posté sur sa page Facebook un texte qui pouvait être lu par environ 290 personnes ayant le statut d’ami. Il s’adressait dans ce texte à ceux qui ne lui avaient pas souhaité un bon anniversaire et indiquait entre autres : (…) je vous extermine tous, vous allez le regretter (…) maintenant plus personne ne peut vous protéger Pan!!!! Pan!!!! Pan!!!! (« post » original en dialecte suisse-allemand). En 2013, le Tribunal supérieur du canton de Zurich a condamné l’homme pour ces faits pour tentative de menaces alarmant la population au sens de l’art. 258 du Code pénal (CP) à une peine pécuniaire avec sursis partiel.

Le Tribunal fédéral admet le recours de l’intéressé et annule l’arrêt du Tribunal cantonal. L’art. 258 CP n’est applicable que lorsque « la population » est alarmée, respectivement lorsqu’il est tenté de l’alarmer. Par « population », on entend dans le langage commun en premier lieu l’ensemble des habitants d’une zone déterminée plus ou moins grande. Forme également une « population » l’ensemble des personnes qui se trouvent plutôt par hasard et pour un temps court au même moment dans un lieu déterminé, par exemple dans un magasin, dans un transport public ou dans un stade sportif. Ne peut en revanche être considéré comme une « population » le cercle des personnes, avec lesquelles quelqu’un est ami ou qu’il connaît dans la vie réelle ou virtuelle, ce d’autant plus qu’il manque là un lien avec un endroit déterminé. L’intéressé ne s’adresse ainsi pas à la « population » lorsqu’il communique les déclarations litigieuses à ses environs 290 amis Facebook et par là s’adresse en particulier à ceux qui ne lui ont pas souhaité un bon anniversaire.

Le Tribunal fédéral n’avait pas à trancher la question de savoir si une déclaration à des amis Facebook devait être considérée comme « publique » ou « privée ». La notion de « population » n’est pas équivalente à celle du « caractère public », déterminante notamment s’agissant de l’infraction de discrimination raciale.

Le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de savoir si une déclaration faite dans un « post » était objectivement de nature à alarmer ses destinataires. Le Tribunal supérieur l’avait pourtant admis. Il n’avait toutefois vu aucun indice qu’un grand nombre de personnes aurait concrètement été apeuré et alarmé et avait pour cette raison admis une tentative.

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, 29.04.2015 : http://bit.ly/1PWUO9g

 

Arrêt du TF du 08.04.2015 (6B_256/2014 ; http://bit.ly/1H2Y6Fq)

 

6B_768/2014 (d) du 24.03.2014 – 16 personnes contaminées avec le VIH: condamnation confirmée

16 personnes contaminées avec le VIH: condamnation confirmée

 

Arrêt du TF du 24 mars 2015 (6B_768/2014 ; http://bit.ly/1OcWg6k)

Le Tribunal fédéral confirme la condamnation d’un bernois qui, de 2001 à 2005, a infecté intentionnellement 16 personnes avec le VIH. La contamination des victimes par le virus de l’immunodéficience humaine a été, à juste titre, qualifiée de lésion corporelle grave par la Cour suprême du canton de Berne. Celle-ci doit se prononcer à nouveau sur le montant des indemnités pour tort moral dues aux personnes concernées.

 

De mai 2001 à mai 2005, l’homme avait transmis intentionnellement le virus du SIDA à seize personnes. Pour ce faire, il avait inoculé à ses victimes du sang contaminé ou un autre matériel biologique avec le VIH, au moyen d’aiguilles ou d’objets analogues. Les piqûres dans le dos ou dans la zone de la nuque survenaient, d’une part, dans le cadre de prétendus traitements d’acupuncture, d’autre part, par surprise ou pendant une perte de conscience des personnes concernées. Au mois d’avril 2014, la Cour suprême bernoise a confirmé la condamnation, prononcée en première instance, pour lésions corporelles graves et propagation d’une maladie de l’homme à réitérées reprises et infligé une peine de 15 ans de privation de liberté. Par ailleurs, l’homme a été condamné à verser 100’000 fr. à chaque lésé pour le tort moral, respectivement 90’000 fr. dans un cas.

Le Tribunal fédéral rejette le recours de l’intéressé contre sa condamnation mais l’admet quant aux indemnités pour tort moral. Pour l’essentiel, le recourant avait invoqué qu’il ne devait être condamné que pour lésions corporelles simples et que sa peine devait être fixée par le tribunal. Le Tribunal fédéral considère la qualification juridique opérée par la Cour suprême comme conforme au droit fédéral. Le jugement contesté n’est pas non plus en contradiction avec la jurisprudence du Tribunal fédéral. En 2013, ce dernier a certes modifié sa jurisprudence et jugé que de nos jours, compte tenu des possibilités de traitement médical, une infection VIH en tant que telle ne met plus, en général, la vie en danger et ne constitue donc pas une lésion corporelle grave. Il a cependant réservé la possibilité qu’une infection volontaire avec le VIH constitue une lésion corporelle grave au sens de la clause générale, qui suppose une atteinte grave à la santé physique ou mentale de la victime. En l’espèce, le Tribunal cantonal l’a admis à juste titre. Les preuves matérielles suffisent objectivement pour qualifier les faits de lésions corporelles graves. En particulier, il ressort du rapport de l’expertise médicale ordonnée, relative aux conséquences communes d’une infection VIH, que la contamination par ce virus, constitue aujourd’hui encore un fardeau physique et psychique très pesant pour les personnes concernées et que la maladie en tant que telle demeure lourdement stigmatisante. La thérapie antivirale doit être prise à vie. Des effets secondaires à long terme sont envisageables même avec les médicaments actuels. Les personnes qui ont été infectées par le VIH-1 dans les années 2001 à 2005 ont une espérance de vie estimée nettement raccourcie, de plusieurs années. Selon les explications de l’expert, tous les lésés subissent ces conséquences de manière comparable. Quant à l’indemnisation du tort moral, la Cour suprême doit rendre un nouveau jugement. Le Tribunal fédéral juge incomplète la motivation y relative de l’autorité précédente, respectivement qu’elle différencie insuffisamment les situations individuelles.

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, 09.04.2015 : http://bit.ly/1CsDWhf

 

Arrêt du TF du 24 mars 2015 (6B_768/2014 ; http://bit.ly/1OcWg6k)