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8C_521/2023 (f) du 22.02.2024 – Assurance sociale cantonale – Réduction des primes d’assurance-maladie / 65 al. 1 LAMal – Ordonnance concernant la réduction des primes d’assurance-maladie (RS/FR 842.1.13)

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_521/2023 (f) du 22.02.2024

 

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Assurance sociale cantonale – Réduction des primes d’assurance-maladie / 65 al. 1 LAMal – Ordonnance concernant la réduction des primes d’assurance-maladie (RS/FR 842.1.13)

Frais de justice à la charge du recourant pour cause de témérité / 131 CPJA (RS/FR 150.1)

 

A.__ bénéficie depuis plusieurs années d’une réduction de ses primes d’assurance-maladie. Par décision du 25.01.2023, confirmée le 27.03.2023, la caisse cantonale de compensation a fixé le montant de la réduction des primes pour l’année 2023 à 315 fr. 90 par mois, ce qui correspond à 65% de la prime moyenne régionale.

 

Procédure cantonale (arrêt 608 2023 51 – consultable ici)

La juridiction cantonale a renvoyé à sa motivation développée dans un précédent arrêt du 6 décembre 2022 – entré en force – impliquant A.__, dans lequel elle avait retenu en substance que le plafonnement de la réduction de primes à 65% du montant de la prime moyenne régionale pouvait valablement figurer dans l’ordonnance concernant la réduction des primes d’assurance-maladie du 8 novembre 2011 (ORP; RS/FR 842.1.13), sans violer la Constitution cantonale. Elle a en outre rejeté le grief du recourant tiré d’une violation de la loi sur les subventions du 17 novembre 1999 (LSub; RS/FR 616.1), en considérant notamment que l’on ne saurait déduire de l’art. 13 LSub l’obligation, pour le législateur cantonal, de faire figurer dans une loi tous les paramètres du calcul des réductions de primes. Exposant que le recourant leur avait soumis encore une fois la même question et qu’il avait maintenu son recours malgré l’entrée en force de l’arrêt du 6 décembre 2022, les juges cantonaux l’ont condamné au paiement des frais de justice, par 400 fr., pour témérité en application de l’art. 61 LPGA, sa requête d’assistance judiciaire ayant été par ailleurs rejetée, dans la mesure où elle n’était pas sans objet.

Par jugement du 11.08.2023, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 2.3
Le Tribunal fédéral applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, il n’examine la violation de droits fondamentaux ainsi que celle de dispositions de droit cantonal et intercantonal que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c’est-à-dire s’il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée. Sauf exceptions, notamment en matière de droits constitutionnels cantonaux (cf. art. 95 let. c, d et e LTF), on ne peut pas invoquer la violation du droit cantonal ou communal en tant que tel devant le Tribunal fédéral (art. 95 LTF a contrario). En revanche, il est possible de faire valoir que sa mauvaise application consacre une violation du droit fédéral, comme la protection contre l’arbitraire (art. 9 Cst.) ou la garantie d’autres droits constitutionnels (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 143 I 321 consid. 6.1; 142 III 153 consid. 2.5).

Appelé à revoir l’application ou l’interprétation d’une norme cantonale ou communale sous l’angle de l’arbitraire, le Tribunal fédéral ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motif objectif et en violation d’un droit certain. En revanche, si l’application de la loi défendue par l’autorité cantonale ne s’avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF 148 I 145 consid. 6.1; 147 I 241 consid. 6.2.1; 145 II 32 consid. 5.1). Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 143 I 321 consid. 6.1; 141 I 49 consid. 3.4).

 

Consid. 4.1.1
Selon l’art. 12 Cst., quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. Conformément à l’art. 36 al. 1 Cst./FR, toute personne dans le besoin a le droit d’être logée de manière appropriée, d’obtenir les soins médicaux essentiels et les autres moyens indispensables au maintien de sa dignité.

A teneur de l’art. 93 Cst./FR, les compétences législatives peuvent être déléguées, à moins que le droit supérieur ne l’interdise (al. 1, première phrase); la norme de délégation doit être suffisamment précise (al. 1, seconde phrase); les règles de droit d’importance doivent toutefois être édictées sous forme de loi (al. 2); le Grand Conseil peut opposer son veto aux actes de l’autorité délégataire (al. 3).

Consid. 4.1.2
Selon l’art. 65 al. 1, première phrase, LAMal, les cantons accordent une réduction de primes aux assurés de condition économique modeste. L’art. 65 al. 1bis LAMal précise que pour les bas et moyens revenus, les cantons réduisent de 80% au moins les primes des enfants et de 50% au moins celles des jeunes adultes en formation. Aux termes de l’art. 12 LALAMal, sont considérées comme assurés de condition économiquement modeste les personnes dont le revenu déterminant n’atteint pas les limites fixées par le Conseil d’Etat. L’art. 15 LALAMal dispose que la réduction [des primes d’assurance-maladie] est calculée en pour-cent d’une moyenne des primes retenues par les assureurs (al. 1, première phrase); elle ne peut dépasser 100% de la prime nette due par l’assuré pour l’assurance de base (al. 1, seconde phrase); le Conseil d’Etat définit la moyenne des primes utile pour le calcul des réductions et fixe l’échelonnement de ces dernières (al. 2).

L’art. 5 ORP porte sur le calcul du revenu déterminant. L’art. 6 ORP, qui concerne l’étendue de la réduction, prévoit notamment que les taux de la réduction des primes figurent dans le tableau 1 annexé à l’ORP (al. 1). Ce tableau instaure un plafonnement de la réduction des primes à 65% du montant de la prime moyenne régionale.

Consid. 4.2
Le recourant expose que le refus de lui octroyer une réduction entière de ses primes d’assurance-maladie le priverait de conditions minimales d’existence. Les limites de revenu déterminant, le calcul des réductions et leur échelonnement devraient figurer dans une loi formelle, en application de l’art. 93 al. 2 Cst./FR. Tel ne serait pas le cas en l’occurrence, les art. 12 et 15 LALAMal donnant un blanc-seing au Conseil d’Etat pour édicter – à travers l’ORP – des dispositions d’importance empiétant le droit de mener une existence conforme à la dignité humaine.

Consid. 4.3
Cette critique tombe à faux. Contrairement à ce que sous-entend le recourant, la réduction des primes d’assurance-maladie pour les assurés de condition économique modeste n’a pas pour vocation – contrairement à l’aide sociale – d’assurer à son bénéficiaire des conditions minimales d’existence. A ce titre, l’art. 65 LAMal et le droit cantonal prévoient uniquement une réduction des primes et non pas une prise en charge intégrale de celles-ci, même pour les assurés se trouvant dans les situations économiques les plus précaires. Le fait qu’un seuil minimal de réduction est prévu pour les enfants et les jeunes adultes (cf. art. 65 al. 1 bis LAMal et 6 al. 2 ORP) n’y change rien.

 

Consid. 5.1
Selon l’art. 9 al. 1 LSub, les subventions doivent être instituées par une loi. En vertu de l’art. 13 al. 1 LSub, les dispositions légales régissant les subventions doivent notamment définir: les objectifs visés (let. a); les tâches et les prestations pour lesquelles les subventions sont prévues (let. b); les catégories de bénéficiaires (let. c); l’existence éventuelle d’un droit à l’obtention d’aides financières (let. d); les formes de subventions, conformément à l’article 15 (let. e); les conditions spécifiques d’octroi (let. f); les bases et les modalités de calcul des subventions, selon les principes fixés aux articles 16 et 17 (let. g); quand cela est possible, le montant minimal de la subvention ou des dépenses subventionnables (let. h); l’autorité compétente pour l’octroi et pour le suivi des subventions (let. i). L’art. 13 al. 2 LSub précise que sous réserve de l’article 9 al. 2, les points visés par les lettres a à e sont fixés dans des lois. Aux termes de l’art. 16 LSub, en règle générale, les subventions doivent être fixées notamment en fonction de la capacité financière du requérant (al. 1, première phrase); les aides financières doivent en outre être déterminées en fonction de leur caractère incitatif et de l’intérêt de l’Etat à assurer ou promouvoir l’accomplissement de la tâche (al. 2).

Consid. 5.2
Le recourant soutient qu’en application de l’art. 13 al. 1 let. b et d LSub, le calcul et l’échelonnement de la réduction des primes d’assurance-maladie devraient figurer dans une loi, et non dans une ordonnance. Par ailleurs, le plafonnement à 65% du montant de la prime moyenne régionale ne tiendrait pas compte de sa capacité financière, qui ne permettrait pas de lui assurer le minimum vital, et donc des conditions minimales d’existence, en violation de l’art. 16 LSub.

Consid. 5.3
Il ne ressort pas des dispositions de la LSub dont se prévaut le recourant que le calcul de la réduction des primes devrait figurer en détail dans une loi formelle, en l’occurrence la LALAMal. En conformité avec les art. 13 al. 1, let. b et d, et al. 2 LSub, cette loi d’application définit le domaine subventionné, à savoir les primes d’assurance-maladie, et consacre l’existence d’un droit à une aide financière, sous la forme d’une réduction de la prime pour certaines catégories de personnes. Les bases et les modalités de calcul de la réduction (cf. art. 13 al. 1 let. g LSub), déjà visées par l’art. 15 LALAMal, sont réglées en détail dans l’ORP, conformément à l’art. 13 al. 2 LSub a contrario. S’agissant de l’art. 16 al. 1, première phrase, LSub, la LALAMal et l’ORP tiennent précisément compte de la capacité financière des assurés, étant entendu que la réduction des primes ne vise pas à garantir des conditions minimales d’existence. Les juges cantonaux n’ont donc pas versé dans l’arbitraire en appliquant le droit cantonal et en considérant que la LALAMal, en particulier son art. 15, fixait de manière suffisante les principes généraux pour le calcul des subventions (cf. arrêt cantonal du 6 décembre 2022 en la cause 608 2022 57, auquel renvoie l’arrêt entrepris). Les griefs du recourant s’avèrent mal fondés.

 

Consid. 10.1
Dans un dernier grief, le recourant reproche à l’instance précédente d’avoir mis les frais de justice à sa charge pour cause de témérité en application de l’art. 61 LPGA.

Consid. 10.2
Contrairement à ce qu’a retenu la cour cantonale, la LPGA – en particulier son art. 61 – n’est toutefois pas applicable au cas d’espèce. En effet, selon l’art. 1 al. 2 let. c LAMal, les dispositions de la LPGA ne s’appliquent notamment pas à l’octroi de réductions de primes en vertu des art. 65, 65a et 66a LAMal. En matière de frais de procédure, le droit cantonal est donc exclusivement applicable. L’art. 61 LPGA, auquel se sont référés les juges cantonaux, sans toutefois indiquer quelle norme cantonale y renverrait, entre tout au plus en considération à titre de droit cantonal supplétif.

Consid. 10.3
Selon l’art. 131 du Code de procédure et de juridiction administrative du 23 mai 1991 (CPJA; RS/FR 150.1), en cas de recours ou d’action, la partie qui succombe supporte les frais de procédure (al. 1, première phrase); si elle n’est que partiellement déboutée, les frais sont réduits en proportion (al. 2, seconde phrase); des frais peuvent être mis à la charge de la partie qui obtient gain de cause si elle les a occasionnés sans nécessité, par sa faute ou en violation des règles de procédure (al. 2). Selon l’art. 136 CPJA, les dispositions légales qui prévoient l’exemption totale ou partielle des frais de procédure sont réservées, notamment celles en matière d’assurances sociales. Le recourant n’expose pas quelle autre disposition de droit cantonal imposerait la gratuité de la procédure. Il n’indique pas, en particulier, quelle norme cantonale renverrait à l’art. 61 LPGA. Quoiqu’il en soit, à supposer que cette disposition soit applicable à titre de droit cantonal supplétif, on ne saurait considérer que les juges cantonaux en auraient fait une application arbitraire en qualifiant le recours de téméraire et en mettant des frais à charge du recourant. Il s’ensuit que le recours, entièrement mal fondé, doit être rejeté.

 

Le TF rejette le recours de A.__.

 

Arrêt 8C_521/2023 consultable ici

 

8C_308/2022 (f) du 18.08.2022 – Refus de subside pour le paiement des primes d’assurance-maladie / Assuré qui, par choix personnel, a décidé de ne pas travailler ni rechercher un emploi

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_308/2022 (f) du 18.08.2022

 

Consultable ici

 

Refus de subside pour le paiement des primes d’assurance-maladie / 65 LAMal – LVLAMal (loi d’application vaudoise de la loi fédérale sur l’assurance-maladie)

Assuré qui, par choix personnel, a décidé de ne pas travailler ni rechercher un emploi

 

Assuré, né en 1976, a bénéficié d’un subside pour le paiement de ses primes d’assurance-maladie à partir du 01.06.2015 du fait qu’il était en formation dans un premier temps, puis à l’aide sociale. Le requérant ayant renoncé à bénéficier de l’aide sociale à partir du mois d’avril 2020, l’Office vaudois de l’assurance-maladie (ci-après: l’OVAM) l’a informé de la suppression de son droit au subside dès le 30.09.2020. Le 29.09.2020, l’intéressé a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l’Agence d’assurances sociales de Nyon, expliquant qu’il ne sollicitait plus le revenu d’insertion car il ne voulait plus dépendre de l’aide sociale, qu’il vivait uniquement avec le soutien financier de sa famille et n’avait pas de fortune.

Par décision du 15.01.2021, l’OVAM a refusé de lui allouer toute aide pour le paiement de ses primes d’assurance-maladie dès le 01.10.2020. Il a confirmé ce refus par une décision sur réclamation du 27.07.2021. L’OVAM a retenu que le requérant ne pouvait pas être considéré comme étant de condition économique modeste, dès lors que par choix personnel, il n’exerçait aucune activité lucrative ni ne recherchait un emploi qui lui procurerait certainement un revenu supérieur aux limites légales applicables ou, tout au moins, conditionnerait l’octroi d’un subside.

 

Procédure cantonale (arrêt LAVAM 8/21-4/2022 – consultable ici)

Par jugement du 12.04.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Selon l’art. 65 LAMal, les cantons accordent des réductions de primes aux assurés de condition économique modeste (al. 1); les réductions sont fixées de telle manière que les subsides annuels de la Confédération et des cantons au sens de l’art. 66 LAMal soient en principe versés intégralement (al. 2). La jurisprudence rendue à propos de l’art. 65 al. 1 LAMal considère que les cantons jouissent d’une grande liberté dans l’aménagement de la réduction des primes, dans la mesure où ils peuvent définir de manière autonome ce qu’il faut entendre par « condition économique modeste ». En effet, les conditions auxquelles sont soumises les réductions des primes ne sont pas réglées par le droit fédéral, du moment que le législateur a renoncé à préciser la notion d’« assurés de condition économique modeste ». Aussi, les règles édictées par les cantons en matière de réduction des primes dans l’assurance-maladie constituent du droit cantonal autonome (ATF 131 V 202 consid. 3.2.2; 125 V 183 consid. 2b), que le Tribunal fédéral n’examine que sous l’angle restreint de l’arbitraire (cf. ATF 144 II 313 consid. 5.3; 134 II 207 consid. 2; arrêts 2C_686/2018 du 21 janvier 2019 consid. 4; 2C_1117/2018 du 17 décembre 2018 consid. 4.2).

Consid. 3.2
Selon l’art. 9 al. 2 LVLAMal, sont considérées comme étant de condition économique modeste les personnes dont le revenu calculé conformément aux art. 11 et 12 LVLAMal est égal ou inférieur aux limites fixées par le Conseil d’État ou qui remplissent les conditions d’octroi d’un subside spécifique au sens de l’art. 17a (al. 2). Aux termes de l’art. 9 al. 3 LVLAMal, n’est notamment pas considérée comme étant de condition économique modeste toute personne disposant de ressources financières insuffisantes en raison d’un choix délibéré de sa part. L’art. 17 al. 1 du règlement du Conseil d’État du 18 septembre 1996 concernant la LVLAMal (RLVLAMal; BLV 832.01.1) précise que tel est le cas, en particulier, de la personne qui, par choix personnel, a intentionnellement et librement renoncé à mettre toute sa capacité de gain à contribution (let. c).

 

Consid. 5.1
Le recourant fait valoir qu’en faisant dépendre l’octroi d’un subside pour l’assurance-maladie de la « capacité de gain » d’une personne et en réservant le subside aux seuls assurés exerçant une activité lucrative, les dispositions vaudoises d’application de l’art. 65 al. 1 LAMal (art. 9 al. 2 LVLAMal et art. 17 al. 1 let. c RLVLAMal précités) violeraient également sa liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst.) et sa liberté économique (art. 27 Cst.), ainsi que l’interdiction d’être astreint à un travail obligatoire (art. 4 par. 2 CEDH). Il invoque en outre une violation du principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.).

Consid. 5.2.1
La liberté personnelle au sens de l’art. 10 al. 2 Cst. garantit le droit à l’intégrité physique et psychique, la liberté de mouvement et, de manière générale, toutes les facultés élémentaires dont l’exercice est indispensable à l’épanouissement de la personne humaine. Sa portée ne peut pas être définie de manière générale mais doit être déterminée de cas en cas, en tenant compte des buts de la liberté, de l’intensité de l’atteinte qui y est portée, ainsi que de la personnalité de ses destinataires (ATF 142 I 195 consid. 3.2; 134 I 214 consid. 5.1, tous deux avec références). La liberté personnelle se conçoit comme une garantie générale et subsidiaire à laquelle le citoyen peut se référer pour la protection de sa personnalité ou de sa dignité, en l’absence d’un droit fondamental plus spécifique (ATF 123 I 112 consid. 4; arrêt 2D_7/2013 du 30 mai 2013 consid. 8.1; concernant la dignité humaine, cf. ATF 132 I 49 consid. 5.1). En l’occurrence, le droit fondamental à des conditions minimales d’existence, soit à la couverture des besoins élémentaires pour survivre d’une manière conforme aux exigences de la dignité humaine, tels que la nourriture, le logement, l’habillement et les soins médicaux de base est garanti par l’art. 12 Cst. (cf. ATF 146 I 1 consid. 5.1 et les références).

Les droits fondamentaux ont avant tout une fonction de défense contre les atteintes causées par l’État (cf ATF 144 I 50 consid. 4.1; 138 I 225 consid. 3.5; 135 I 113 consid. 2.1) et peuvent également fonder un devoir étatique de protection contre des atteintes provoquées par des tiers (cf. ATF 146 IV 76 consid. 4.2; 126 II 300 consid. 5a). Cela vaut en particulier pour l’art. 10 Cst. (cf. ATF 140 II 315 consid. 4.8; 138 IV 86 consid. 3.1.2; 136 I 167 consid. 2.2; 133 I 58 consid. 6.2.1). Un droit à une prestation positive de l’État ne peut en principe pas être déduit directement des droits fondamentaux; un tel droit ne peut tout au plus exister qu’exceptionnellement et de façon ponctuelle (cf. ATF 138 I 225 consid. 3.5).

Consid. 5.2.2
Il découle de ce qui précède que le recourant ne peut pas se prévaloir de l’art. 10 al. 2 Cst. pour s’opposer à la décision de l’OVAM. Cette disposition est en effet subsidiaire à l’art. 12 Cst. et ne confère pas, dans les présentes circonstances, un droit à une prestation positive de l’État (cf. consid. 5.2.1 supra). Le recourant n’expose pas et on ne voit pas dans quelle mesure le domaine de protection de la liberté personnelle serait touché par la présente décision de l’OVAM. L’assuré demeure libre dans son choix de ne pas travailler, mais il n’appartient pas à la collectivité de le soutenir financièrement dans ce choix par l’octroi de subsides pour le paiement de ses primes d’assurance-maladie.

Consid. 5.2.3
Par ailleurs, la question de la possibilité de refuser l’octroi d’un subside en lien avec l’art. 12 Cst. doit être laissée ouverte. En effet, le recourant n’invoque pas cette disposition et celle-ci ne peut pas être examinée d’office (art. 106 al. 2 LTF). Au demeurant, même s’il l’avait invoquée, il faudrait constater que le recourant n’allègue pas, ni ne démontre qu’il se trouverait dans une situation de détresse. En particulier, il n’établit pas qu’il ne disposerait pas des moyens de subvenir à son entretien et de s’acquitter de ses primes d’assurance-maladie.

Consid. 5.2.4
En matière d’aide sociale, le Tribunal fédéral a déjà constaté à plusieurs reprises que celui qui, objectivement, serait en mesure de se procurer les ressources indispensables à sa survie par ses propres moyens – en particulier en acceptant un travail convenable – ne remplit pas les conditions du droit à l’aide sociale (ATF 139 I 218 consid. 5.2; 130 I 71 consid. 4.3).

Les considérations qui sont à la base de cette jurisprudence, en particulier dans le domaine des prestations de l’aide sociale, peuvent également être invoquées en matière de subsides d’assurance-maladie, vu l’évidente analogie entre ces deux types de prestations. Dans les deux domaines, les prestations sont régies par le principe de la subsidiarité par rapport à d’autres sources de revenus (cf. ATF 134 I 313 consid. 5.6.1; voir aussi RUDOLF URSPRUNG/DOROTHEA RIEDI HUNOLD, Verfahrensgrundsätze und Grundrechtsbeschränkungen in der Sozialhilfe, ZBl 8/2015 p. 422; KATHRIN AMSTUTZ, Das Grundrecht auf Existenzsicherung: Bedeutung und inhaltliche Ausgestaltung des Art. 12 der neuen Bundesverfassung, Berne 2002, p. 169).

 

Consid. 5.3
Selon l’art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie. Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2 Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d’un gain ou d’un revenu (ATF 141 V 557 consid. 7.1 et les références). Cette disposition constitutionnelle ne confère par ailleurs aucun droit à une prestation positive de l’État (ATF 130 I 26 consid. 4.1). Par conséquent, le refus de l’OVAM d’accorder au recourant des subsides pour le paiement de ses primes d’assurance-maladie ne viole manifestement pas sa liberté économique.

 

Consid. 5.4
Le recourant invoque enfin l’art. 4 par. 2 CEDH, selon lequel « nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire ». En l’occurrence, on ne saurait voir, dans le refus de subside pour le paiement des primes d’assurance-maladie, une atteinte à l’interdiction du travail obligatoire. Le recourant demeure libre dans son choix de ne pas travailler, mais il n’appartient pas à la collectivité de le soutenir financièrement dans ce choix (cf. consid. 5.2.2 supra).

 

Consid. 6
Le recourant demande à titre subsidiaire d’être exempté de l’assurance-maladie obligatoire. Cette conclusion n’ayant pas été prise en instance cantonale, il s’agit d’une conclusion nouvelle qui est irrecevable devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 2 LTF).

Au demeurant, l’un des buts principaux de la LAMal est de rendre l’assurance-maladie obligatoire pour l’ensemble de la population en Suisse (ATF 129 V 77 consid. 4.1; 125 V 266 consid. 5b). Aussi bien l’art. 3 al. 1 LAMal pose-t-il le principe de l’obligation d’assurance pour toute personne domiciliée en Suisse (ATF 129 V 77 consid. 4.2). Or il est constant que le recourant, domicilié en Suisse, est soumis à l’assurance obligatoire des soins (art. 3 al. 1 LAMal). Il ne saurait se soustraire au principe de l’obligation d’assurance. C’est en vain qu’il invoque que la loi serait contraire à ses droits fondamentaux. En effet, selon l’art. 190 Cst., le Tribunal fédéral et les autres autorités sont tenus d’appliquer les lois fédérales et le droit international.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 8C_308/2022 consultable ici