Arrêt du Tribunal fédéral 9C_221/2025 (f) du 23.06.2025
Allocation pour impotent / 9 LPGA – 42 LAI – 37 RAI
Actes «se vêtir/se dévêtir», «faire sa toilette», «se déplacer à l’intérieur ou à l’extérieur, établir des contacts» et besoin d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie niés
Résumé
Assuré au bénéfice d’une rente entière depuis le 01.11.2019, a demandé une allocation pour impotent. Après enquête à domicile (rapport relevant l’aide régulière et importante d’autrui pour accomplir un acte ordinaire de la vie, soit celui de manger), l’office AI a rejeté la demande. Tant dans la procédure cantonale que fédérale, il n’a pas été établi un besoin d’aide régulier et important pour «se vêtir/se dévêtir», «faire sa toilette» ou «se déplacer/établir des contacts», ni la nécessité d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie. Selon le Tribunal fédéral, les constatations médicales et factuelles n’ont pas été jugées arbitraires et le grief de défaut de motivation a été écarté.
Faits
Assuré, né en 1970, a perçu une rente entière de l’assurance-invalidité du 01.08.2014 au 31.03. 2016. Il bénéficie à nouveau d’une rente entière depuis le 01.11.2019.
Le 16.08.2022, l’assuré a déposé une demande d’allocation pour impotent. L’office AI a notamment mis en oeuvre une enquête au domicile de l’assuré le 02.11.2023. Dans un rapport du 20.11.2023, l’enquêtrice a constaté que l’assuré avait besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir un acte ordinaire de la vie, soit celui de manger. Par décision du 21.02.2024, l’office AI a rejeté la demande d’allocation pour impotent.
Procédure cantonale (arrêt AI 94/24 – 82/2025 – consultable ici)
Par jugement du 20.03.2025, rejet du recours par le tribunal cantonal.
TF
Consid. 2.2
L’impotence est moyenne si l’assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir la plupart des actes ordinaires de la vie, d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, une surveillance personnelle permanente, ou d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l’art. 38 RAI (art. 37 al. 2 let. a à c RAI). Selon cette disposition, ce besoin existe lorsque la personne assurée ne peut pas en raison d’une atteinte à la santé vivre de manière indépendante sans l’accompagnement d’une tierce personne, faire face aux nécessités de la vie et établir des contacts sociaux sans l’accompagnement d’une tierce personne, ou éviter un risque important de s’isoler durablement du monde extérieur (art. 38 al. 1 let. a à c RAI).
Dans la première éventualité, l’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie doit permettre à la personne concernée de gérer elle-même sa vie quotidienne. Il intervient lorsque la personne nécessite de l’aide pour au moins l’une des activités suivantes: structurer la journée, faire face aux situations qui se présentent tous les jours (p. ex. problèmes de voisinage, questions de santé, d’alimentation et d’hygiène, activités administratives simples) et tenir son ménage (aide directe ou indirecte d’un tiers; ATF 133 V 450 consid. 10). Dans la deuxième éventualité (accompagnement pour les activités hors du domicile), l’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie doit permettre à la personne assurée de quitter son domicile pour certaines activités ou rendez-vous nécessaires, tels les achats, les loisirs ou les contacts avec les services officiels, le personnel médical ou le coiffeur. Dans la troisième éventualité, l’accompagnement en cause doit prévenir le risque d’isolement durable ainsi que de la perte de contacts sociaux et, par là, la péjoration subséquente de l’état de santé de la personne assurée (arrêt 9C_308/2022 du 28 mars 2023 consid. 3.3 et la référence).
Consid. 2.3
La nécessité de l’aide apportée par une tierce personne doit être examinée de manière objective, selon l’état de santé de la personne assurée, indépendamment de l’environnement dans lequel celle-ci se trouve; seul importe le point de savoir si, dans la situation où elle ne dépendrait que d’elle-même, la personne assurée aurait besoin de l’aide d’un tiers (arrêt 9C_354/2023 du 15 novembre 2023 consid. 2.3 et les références).
Consid. 4.1 [résumé]
S’agissant de l’acte «se vêtir/se dévêtir», l’assuré soutient que l’enquêtrice avait omis de cocher «se dévêtir». Les juges cantonaux ont constaté que la mention «idem» figurait pour cet acte, de sorte qu’ils pouvaient retenir sans arbitraire que les limitations étaient identiques pour «se vêtir» et «se dévêtir». Le recours ne contient aucun élément propre à démontrer l’arbitraire. Le simple rappel d’atteintes psychiatriques, notamment une majoration des symptômes physiques pour des raisons psychologiques, ne montre pas que ces aspects n’auraient pas été pris en compte. Au contraire, les limitations fonctionnelles avaient été clairement définies par le médecin du SMR avant l’enquête à domicile, ce que l’assuré ne conteste pas. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de s’écarter de l’appréciation des juges cantonaux.
Consid. 4.2 [résumé]
Pour l’acte «faire sa toilette», l’assuré se limite aux déclarations de sa fille selon lesquelles il devait être «stimulé». Il ne prétend ni ne démontre que cette stimulation dépasserait de simples rappels ponctuels. Les juges cantonaux pouvaient dès lors retenir sans arbitraire que l’aide de l’épouse ne traduisait pas un besoin d’assistance important justifié par l’état de santé. Aucun élément médical objectif ne faisait obstacle à l’accomplissement de cet acte, ce que l’assuré ne conteste pas.
Consid. 4.3 [résumé]
Pour l’acte «se déplacer à l’intérieur ou à l’extérieur, établir des contacts», contrairement à ce que soutient l’assuré, les juges cantonaux ne se sont pas fondés uniquement sur une capacité de travail résiduelle. Ils ont retenu qu’il vivait avec son épouse et leurs enfants, conservait son autonomie de déplacement dans l’appartement, utilisait une canne anglaise à la main gauche, conduisait encore une voiture automatique «à titre exceptionnel» et se rendait parfois seul aux séances de physiothérapie. Ils ont dès lors retenu sans arbitraire qu’il pouvait se déplacer et établir des contacts.
Consid. 4.4
Enfin, en ce qui concerne le besoin d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie, l’assuré se borne à nouveau à opposer sa propre appréciation à celle de la juridiction cantonale, sans toutefois démontrer en quoi celle-ci serait manifestement insoutenable. Il en va en particulier ainsi lorsqu’il fait valoir que les diagnostics psychiatriques et la structure de sa personnalité justifieraient, déjà à eux seuls, le besoin revendiqué. Ce faisant, il n’établit pas qu’il était insoutenable de la part des juges précédents, et il n’apparaît pas que tel soit le cas, de suivre les constatations concrètes de l’enquêtrice de l’office AI, et d’en tirer qu’il était capable de structurer son quotidien sans difficultés substantielles, conservait la faculté de gérer des activités ordinaires simples et n’était pas entravé par ses limitations fonctionnelles physiques ou psychiques dans la réalisation de tâches légères (éventuellement en les fractionnant et en se servant de moyens auxiliaires).
Le TF rejette le recours de l’assuré.
Arrêt 9C_221/2025 consultable ici