Initiative parlementaire 19.410 « Abolir le monopole partiel de la CNA » rejeté par le Conseil national

Initiative parlementaire 19.410 « Abolir le monopole partiel de la CNA » rejeté par le Conseil national

 

Initiative parlementaire 19.410 consultable ici

Bulletin officiel, session du 10.09.2020 disponible ici

 

L’initiative vise à abolir l’obligation, pour toutes les entreprises, de s’assurer auprès de la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (CNA). Plus précisément, l’objectif de l’initiative parlementaire est de permettre à tous les employeurs de choisir leur institution d’assurance-accidents, ce qui permettrait de mettre fin au monopole partiel de la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (CNA).

Lors du débat du 25.06.2020, la majorité de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-CN) a estimé que la réglementation actuelle a fait ses preuves et qu’il n’y a dès lors pas lieu de légiférer dans le domaine concerné. La majorité de la commission a considéré que la CNA, qui fait partie du système des assurances sociales, fournit du bon travail. Elle a rappelé que cette dernière investit beaucoup et avec succès dans la prévention des accidents du travail et que son monopole partiel lui permet d’assurer les mauvais risques et de proposer des primes plus basses. Selon la commission, en l’état, il manque une proposition définissant la manière dont les entreprises à hauts risques pourraient être assurées sans le monopole partiel de la CNA. Elle a ajouté que la LAA révisée n’est en vigueur que depuis le 01.01.2017 ; or, il s’agit d’une réforme qui a abouti en tant que proposition de révision consensuelle entre les partenaires sociaux, la CNA et l’Association suisse d’assurances, après un processus de plusieurs années et après l’échec d’un premier projet de révision.

La minorité de la commission a pensé que la levée du monopole partiel aurait permis d’accroître la concurrence et de baisser les primes. Elle a estimé que la CNA est solide, qu’elle peut rivaliser sur le marché et que plus de concurrence lui donnerait la possibilité de s’atteler à de nouveaux domaines. Par ailleurs, la minorité de la commission a critiqué le manque de transparence de la CNA en matière de gouvernance et de finances.

Lors de la session au Parlement du 10.09.2020, les rapporteurs de la commission (Katharina Prelicz-Huber et Benjamin Roduit) ont rappelé que la CNA faisait du bon boulot. Le rapporteur francophone a précisé que cela repose sur trois axes :

  • Premièrement, les prestations d’assurance : sa solide structure lui permet d’assurer les mauvais risques dans des branches qu’aucune assurance privée ne veut couvrir, si ce n’est avec des primes excessives.
  • Deuxièmement, la prévention des accidents du travail : la CNA s’investit avec beaucoup de visibilité, de compétence, d’efficacité. En dix ans, on assiste à une diminution des accidents mortels au travail de 90 à 60 par année.
  • Troisièmement, la rééducation : elle se situe à la pointe de ce qui se fait de mieux dans ce domaine au niveau international. Benjamin Roduit a invité ses collègues à venir en Valais, à Sion, visiter la clinique romande de réadaptation, dont le niveau est très haut. Les résultats sont là : 90 pour cent des assurés réintègrent le monde du travail et 20 pour cent pourront renoncer à la rente AI.

Katharina Prelicz-Huber a rappelé que le système obligatoire actuel a permis à la CNA d’avoir les primes les plus basses de tous les assureurs accidents, bien qu’elle assure également les « mauvais risques ». Cela signifie plus de pouvoir d’achat pour les employés et les employeurs, moins d’accidents, de meilleures prestations et des avantages plus étendus. La CNA peut également investir sur une période beaucoup plus longue et ainsi générer des réserves. La CNA ne peut pas fonctionner sur une base lucrative et ne verse pas de dividendes. Elle réalise ainsi des investissements qu’aucune compagnie d’assurance-accidents privée ne peut fournir. Elle permet une prévention efficace des accidents. Les normes de la CNA sont reconnues, efficaces et s’appliquent ensuite à tous. La sécurité des employés et du lieu de travail a été renforcée avec l’aide de la CNA, en particulier dans les cas spéciaux et complexes. C’est d’ailleurs l’une des raisons importantes qui ont motivé l’introduction de l’assurance obligatoire partielle. Elle mène également des recherches, des formations continues, gère des cliniques de réadaptation et joue un rôle de pionnier dans le domaine de la numérisation. Selon Katharina Prelicz-Huber, l’abolition du monopole entraînerait des coûts supplémentaires d’environ 1 milliard de francs. La commission veut conserver le système actuel ; en fait elle préférerait de loin voir une extension.

Lors des auditions menées par la commission le 25.06.2020, aucun partenaire n’a pu présenter une solution de rechange convaincante. Le rapporteur pose la question de savoir quelle assurance privée accepterait d’assurer de telles prestations, et cela à des prix défiants toute concurrence. Il ajoute que le nœud du problème se trouve là. La CNA, dont le monopole partiel est contrôlé par la Confédération, permet clairement de proposer des primes plus basses et stables.

Enfin, pour mémoire, la CNA concerne la moitié de la population active en Suisse, un peu plus d’une entreprise sur cinq. Elle gère aussi l’assurance militaire. Nous sommes conscients du fait qu’elle peut encore s’améliorer, en garantissant plus de transparence, en ayant moins de réserves et en assurant toujours une stabilité des primes. Cependant, il est bon de savoir que la gestion de la CNA est basée sur un vrai partenariat social, celle-ci étant dotée d’un conseil composé de seize représentants de travailleurs, seize représentants d’employeurs et huit représentants de la Confédération.

En conclusion, la majorité de la commission est d’avis que l’initiative s’appuie sur quelques mauvaises expériences liées à des cas particuliers et que, dans une démarche ultralibérale, elle remet en question l’une de nos assurances sociales, car c’en est une, des plus efficientes de notre pays.

L’initiative parlementaire a été rejetée par 104 voix contre 78 (et 3 abstentions).

 

 

Initiative parlementaire 19.410 « Abolir le monopole partiel de la CNA » consultable ici

Rapport de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du 25.06.2020 consultable ici

Bulletin officiel, session du 10.09.2020 disponible ici

 

 

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