Conditions d’assurance / 36 al. 1 LAI (en vigueur jusqu’au 31.12.2007) Incapacité de travail avant l’arrivée en Suisse Expertise médicale sur une période remontant à plus de 30 ans – Appréciation rétrospective de la situation – Valeur probante donnée

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_291/2018 (f) du 03.08.2018

 

Consultable ici

 

Conditions d’assurance / 36 al. 1 LAI (en vigueur jusqu’au 31.12.2007)

Incapacité de travail avant l’arrivée en Suisse

Expertise médicale sur une période remontant à plus de 30 ans – Appréciation rétrospective de la situation – Valeur probante donnée

 

Assurée, née en 1954 au Brésil, arrivée en Suisse en septembre 1985, ayant épousé un citoyen suisse le 29.11.1985. Le 01.04.2010, elle a requis de l’office AI l’octroi d’une rente en raison d’une schizophrénie bipolaire chronique dont elle souffrait depuis 1983.

Après plusieurs procédures (9C_230/2012, 9C_262/2015) et expertises, de nombreux indices convergeaient pour conclure qu’au moins une incapacité de travail de 40% avait dû exister à partir de 1981, voire avant, même s’il n’était pas possible de l’affirmer « avec une certitude à 100% ». Par décision, l’office AI a rejeté la demande de prestations, les conditions générales d’assurance n’étant pas remplies.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 246/17 – 58/2018 – consultable ici)

Par jugement du 26.02.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Par son argumentation, l’assurée conteste la possibilité de faire établir, par le biais d’une expertise médicale, l’étendue de sa capacité de travail pour une période antérieure à son arrivée en Suisse, cela de manière rétrospective. Cette approche ne se concilie pourtant pas avec l’arrêt du Tribunal fédéral du 05.09.2012 (9C_230/2012), singulièrement avec les considérants 2.1 et 3, selon lesquels le renvoi pour instruction complémentaire avait précisément été ordonné afin de trancher cette question dont dépend l’issue du litige ; la mission de l’expert consistait à s’exprimer sur la situation qui prévalait dans les années quatre-vingt et à dire si l’assurée était à cette époque-là capable ou non de travailler nonobstant son affection psychique (cf. arrêt 9C_262/2015 du 08.01.2016 consid. 6.1).

Il n’est effectivement pas rare dans le domaine de l’assurance-invalidité que l’évaluation médicale de la capacité de travail doive porter sur une période remontant à plusieurs années dans le passé, ce qui suppose une appréciation rétrospective de la situation, à l’aide des données du dossier et de l’examen de la personne concernée.

L’expert a rempli la tâche qui lui était dévolue, apportant des réponses claires et motivées aux questions qui lui étaient posées. Le fait qu’il a mis en évidence la difficulté de répondre aux questions des parties quant à une incapacité de travail remontant à plus de trente ans ne permet pas de qualifier de « pures spéculations » les conclusions du médecin. Celles-ci reposent sur des explications convaincantes en fonction notamment du diagnostic posé et des données anamnestiques.

Le point de savoir si une personne subit une incapacité de travail (au sens de l’art. 28 al. 1 let. b LAI en relation, depuis le 1er janvier 2003, avec l’art. 6 LPGA) constitue une question de fait à laquelle doit répondre l’administration ou le juge, à l’aide des observations médicales recueillies. Les faits y relatifs doivent être établis selon le degré de la vraisemblance prépondérante (sur cette notion, ATF 135 V 39 consid. 6.1), « l’application par analogie de l’art. 16 CC, soit une présomption de capacité » – telle que souhaitée par l’assurée – étant incompatible avec ladite règle de preuve du droit des assurances sociales et ne trouvant, au demeurant, aucune assise normative ou jurisprudentielle.

Pour le surplus, l’expert a retenu une pathologie cyclique et récurrente, ainsi qu’une incapacité de travail totale antérieure de plusieurs années à son arrivée en Suisse. Il a fait état de la première décompensation psychique en 1981 et expliqué de manière convaincante, à la lumière également des deux hospitalisations de 1981 et de 1984 évoquées par l’assurée, les raisons pour lesquelles celle-ci devait être considérée comme « une véritable atteinte combinée sur le plan psychotique comme bipolaire avec une fragilité consécutive » ayant un caractère durable et entraînant une incapacité de travail d’au moins 40% à partir de 1981. L’affirmation de l’assurée selon laquelle sa maladie lui aurait laissé « un long répit » ensuite de la première hospitalisation ne suffit pas à démontrer en quoi la constatation d’une incapacité de travail dès 1981 serait insoutenable et procéderait d’une administration et d’une appréciation des preuves contraires au droit (art. 61 let. c LPGA et 97 al. 1 LTF).

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_291/2018 consultable ici

 

 

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