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8C_410/2014 (f) du 02.11.2015 – Revenu d’invalide selon ESS (total secteur privé, niveau qualification 4) – 16 LPGA / Prise en compte du tableau TA1, total secteur privé, niveau qualification 4, non critiquable

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_410/2014 (f) du 02.11.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1XYKWhm

 

Revenu d’invalide selon ESS  / 16 LPGA

Prise en compte du tableau TA1, total secteur privé, niveau qualification 4, non critiquable

 

Assuré, aide-maçon, est victime d’un accident professionnel le 10.04.1987 : entorse du genou droit en tombant d’une échelle. Cinq arthroscopies réalisées en 1987, 2003, 2004, 2005 et 2009.

Demande AI déposée le 01.12.2005. Par projet puis décision, octroi d’un quart de rente d’invalidité, pour les périodes du 01.07.2006 au 30.11.2007 et du 01.05.2009 au 31.07.2009, fondé sur des taux de 41%, respectivement 40%.

De son côté, l’assureur-accidents LAA a alloué à l’assuré, à partir du 01.09.2012, une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 35% et une indemnité pour atteinte à l’intégrité fondée sur un taux de 20%. Saisi d’un recours en matière de droit public contre le jugement cantonal, le Tribunal fédéral a statué par arrêt du 02.11.2015 (cause 8C_799/2014).

 

 

Procédure cantonale

La cour cantonale a fixé le revenu d’invalide pour les périodes du 01.02.2008 au 30.04.2009, ainsi qu’à partir du 01.11.2009, en se fondant sur le tableau TA1 (total secteur privé), niveau de qualification 4 (activités simples et répétitives) de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) éditée par l’Office fédéral de la statistique, selon laquelle le salaire mensuel obtenu par un homme en 2008 était de 4’806 fr. pour une durée hebdomadaire de travail de quarante heures, soit 57’672 fr. par année. Ce montant a été fixé ensuite à 53’981 fr., compte tenu d’une durée hebdomadaire moyenne de travail de 41,6 heures et d’un abattement de 10 % sur le salaire statistique.

Par jugement du 29.09.2014, admission partielle par le tribunal cantonal (droit de l’assuré à une rente entière d’invalidité pour la période du 01.08.2009 au 31.10.2009 en lieu et place d’un quart de rente alloué du 01.05.2009 au 31.07.2009).

 

TF

 

L’assuré invoque une violation du droit en tant que la cour cantonale s’est fondée sur le tableau TA1 (total secteur privé), niveau de qualification 4 (activités simples et répétitives) de l’ESS. Il fait valoir que, dans la mesure où il a exercé la profession de maçon durant seize ans environ et a travaillé ensuite cinq ans en qualité d’employé dans une entreprise de vente et location de matériel et de machines de terrassement, la juridiction précédente aurait dû se référer à une branche économique particulière, à savoir celle du commerce de détail, réparation d’articles domestiques (tableau TA1, n° 52).

Lorsque le revenu d’invalide est calculé sur la base de l’ESS, on se réfère, en règle générale, au tableau TA1, et à la catégorie « total secteur privé ». Ce n’est qu’à titre exceptionnel que le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances se sont fondés sur le salaire médian statistique d’une branche économique particulière. Tel est le cas pour les assurés qui ont travaillé durant une longue période dans cette branche et dont on ne peut exiger qu’ils exercent une autre activité (arrêts du Tribunal fédéral 8C_710/2014 du 12 mai 2015 consid. 4.1; 9C_237/2007 du 24 août 2007 consid. 5.1, non publié in ATF 133 V 545; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 289/01 du 19 octobre 2001 consid. 3c).

En l’espèce, l’assuré n’expose pas en quoi l’atteinte à la santé l’empêche d’exercer une activité professionnelle ressortissant à la catégorie « total secteur privé », dans laquelle il est à même de réaliser un revenu d’invalide sensiblement supérieur au gain de référence de la branche du commerce de détail, réparation d’articles domestiques.

 

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_410/2014 consultable ici : http://bit.ly/1XYKWhm

 

 

9C_637/2014 (f) du 06.05.2015 – Revenu d’invalide – Abattement de 15% sur salaire statistique confirmé

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_637/2014 (f) du 06.05.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1AW96Dt

 

Revenu d’invalide / 16 LPGA

Abattement de 15% pour tout travail de type semi-sédentaire n’impliquant pas le port de charges excessives et permettant de varier les positions (CT 50%)

 

Assuré, travaillant comme chef de cuisine d’août 1989 à août 2009, souffre de cervico-lombalgies. Incapacité de travail dès le 03.10.2008, puis licencié pour le 31.08.2009.

Rapport du SMR du 15.10.2010 : diagnostics avec effet sur la capacité de travail : cervicalgies chroniques, lombosciatalgies irritatives et gonalgies bilatérales chroniques sur gonarthrose. Capacité de travail nulle dans l’activité habituelle. Capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, dès septembre 2010. Limitations fonctionnelles à prendre en compte : activité de type semi-sédentaire n’impliquant pas le port de charges excessives et permettant de varier les positions.

L’Office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (l’office AI) a fixé à 77’521 fr. le revenu (sans invalidité) que l’assuré aurait été en mesure de réaliser en 2010 (revenu annuel 2007 réactualisé) sans l’atteinte à la santé. Quant au revenu d’invalide de 31’341 fr., l’administration l’a établi sur la base des statistiques salariales de l’ESS pour l’année 2010, table TA1, niveau 3, compte tenu d’une capacité de travail de 50%, en appliquant un abattement de 15% sur le salaire statistique. La perte de gain s’élevant à 60% (31’341 / 77’521), l’office AI a alloué à l’assuré un trois-quarts de rente d’invalidité à partir du 1 er février 2010, par décision du 22.05.2013.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/801/2014 – consultable ici : http://bit.ly/1Ki7h68)

Les limitations retenues par la cour cantonal, sur avis des médecins y compris ceux du SMR, sont : éviter le port de charges de plus de 5kg, les activités en hauteur, les mouvements d’antépulsion ou d’abduction, les positions statiques prolongées en flexion-extension du rachis cervical, les mouvements brusques de rotation du rachis cervical, la position statique assise au-delà de 45mn, les montées et descentes d’escaliers, les génuflexions, la marche sur terrain instable, les positions statiques de type piétinement, alterner les positions au moins une fois par heure, limiter le périmètre de marche à environ 15-20 minutes. Selon les juges cantonaux, il faut tenir compte en l’occurrence de l’âge de l’assuré – 55 ans en 2010 -, du fait qu’il a toujours exercé comme chef de cuisine auparavant – et qu’il lui faudra donc fournir un effort conséquent pour pouvoir se réinsérer dans une autre activité, effort souligné par les Établissements pour l’intégration – et que seule une activité à taux réduit est désormais envisageable. La cour cantonale a considéré que le taux d’abattement de 25 % sollicité par l’assuré ne paraît pas exagéré.

Ainsi, le tribunal cantonal a porté le facteur d’abattement sur le revenu d’invalide de 15% à 25%, ce qui a eu pour effet de réduire le revenu d’invalide à 22’936 fr. et d’accroître le degré d’invalidité de 60 % à 70 % (22’936 / 77’521). Par jugement du 27.06.2014, le tribunal a admis le recours et mis l’assuré au bénéfice d’une rente entière d’invalidité à compter du 01.02.2010.

 

TF

Lorsque la juridiction cantonale examine l’usage qu’a fait l’administration de son pouvoir d’appréciation pour fixer l’étendue de l’abattement sur le revenu d’invalide, elle doit porter son attention sur les différentes solutions qui s’offraient à l’organe de l’exécution de l’assurance-invalidité et voir si un abattement plus ou moins élevé (mais limité à 25 % [ATF 126 V 75]) serait mieux approprié et s’imposerait pour un motif pertinent, sans toutefois substituer sa propre appréciation à celle de l’administration (ATF 137 V 71 consid. 5.2 p. 73).

Les juges cantonaux ont pris deux fois en compte les limitations fonctionnelles (dans la capacité de travail et dans l’abattement) et il est donné une importance différente suivant la phase du calcul dans laquelle on se trouve (50% au moment de fixer initialement l’incapacité de travail, mais plus de 50% lorsqu’il s’agit de déterminer l’abattement sur le salaire statistique), ce qui paraît singulier.

Par ailleurs, les spécificités de l’activité exigible à 50% (tout travail de type semi-sédentaire n’impliquant pas le port de charges excessives et permettant de varier les positions) ne sauraient jouer un rôle significatif sur les perspectives salariales dans le cadre de l’exercice d’une activité adaptée, pas plus que l’âge de l’intimé (âgé de 55 ans en 2010).

Une réduction globale de 25%, qui correspond au maximum autorisé par la jurisprudence en présence de circonstances personnelles et professionnelles particulièrement défavorables, ne tient pas raisonnablement compte de la réalité de la situation. Pour retenir l’abattement de 25%, la juridiction cantonale a substitué sa propre appréciation à celle de l’assuré par le biais d’une argumentation sinon contradictoire du moins fort discutable, exerçant son pouvoir d’appréciation de manière non-conforme au droit.

Le TF admet le recours de l’Office AI, annule le jugement cantonal et confirme la décision du 22.05.2013 de l’Office AI.

 

 

Arrêt 9C_637/2014 consultable ici : http://bit.ly/1AW96Dt

 

 

 

 

 

8C_408/2014, 8C_429/2014 (f) du 23.03.2015 – Egalité des armes – Rapports des médecins employés de l’assurance / Revenu d’invalide – DPT

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_408/2014, 8C_429/2014 (f) du 23.03.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1dQuf7O

 

Egalité des armes – Rapports des médecins employés de l’assurance / 6 § 1 CEDH

Revenu d’invalide – Caractère convenable d’une DPT / 16 LPGA

 

Egalité des armes – Rapports des médecins employés de l’assurance / 6 § 1 CEDH

Selon l’art. 6 par. 1 CEDH, le principe de l’égalité des armes fait partie des droits à un procès équitable. Ce principe n’est pas uniquement destiné à sauvegarder l’égalité formelle des parties dans la procédure judiciaire mais doit en plus garantir une égalité des chances pour les parties de pouvoir faire valoir leurs moyens devant le tribunal. Toutefois, l’art. 6 par. 1 CEDH n’oblige pas les pays signataires de la Convention à prévoir une complète égalité des armes entre les parties. La Convention exige cependant qu’un assuré ne soit pas mis dans une situation procédurale dans laquelle il n’a aucune chance raisonnable de soumettre son affaire au tribunal sans être clairement défavorisé par rapport aux autres parties à la procédure. En regard de ces règles, il est en principe admissible qu’un tribunal se fonde sur les preuves obtenues de manière correcte par l’assureur et renonce ainsi à sa propre procédure probatoire.

La jurisprudence (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee p. 354) a posé le principe que le seul fait que les médecins de l’assurance sont employés de celle-ci ne permet pas de conclure à l’existence d’une prévention et d’un manque d’objectivité. Si un cas d’assurance est jugé sans rapport d’un médecin externe à l’assurance, l’appréciation des preuves doit être soumise à des exigences strictes. L’existence d’un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations du médecin de l’assurance, doit conduire le tribunal à demander des éclaircissements (ATF 122 V 157 consid. 1d p. 162).

En application du principe de l’égalité des armes, l’assuré a le droit de présenter ses propres moyens de preuve pour mettre en doute la fiabilité et la validité des constatations du médecin de l’assurance. Il s’agit souvent de rapports émanant du médecin traitant ou d’un autre médecin mandaté par l’assuré. Ces avis n’ont pas valeur d’expertise et, d’expérience, en raison de la relation de confiance liant le patient à son médecin, celui-ci va plutôt pencher, en cas de doute, en faveur de son patient. Ces constats ne libèrent cependant pas le tribunal de procéder à une appréciation complète des preuves et de prendre en considération les rapports produits par l’assuré, afin de voir s’ils sont de nature à éveiller des doutes sur la fiabilité et la validité des constatations du médecin de l’assurance.

Il résulte de ce qui précède que les rapports des médecins employés de l’assurance sont à prendre en considération tant qu’il n’existe aucun doute, même minime, sur l’exactitude de leurs conclusions (ATF 135 V 465 consid. 4.7 p. 471). L’ATF 137 V 210 n’a pas modifié cette manière de voir.

Par ailleurs, la violation de la maxime inquisitoire (ou, autrement dit, du devoir d’administrer les preuves nécessaires) est une question qui n’a pas de portée propre par rapport au grief tiré d’une mauvaise appréciation des preuves (voir arrêt 8C_15/2009 consid. 3.2, in SVR 2010 IV n° 42 p. 132). On rappellera que le juge peut en effet renoncer à accomplir certains actes d’instruction, sans que cela n’entraîne une violation du devoir d’administrer les preuves nécessaires (art. 61 let. c LPGA) ou plus généralement une violation du droit d’être entendu, s’il est convaincu, en se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352), que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation (sur l’appréciation anticipée des preuves en général: ATF 131 I 153 consid. 3 p. 157; 130 II 425 consid. 2 p. 428).

In casu, les avis médicaux au dossier, en plus de contenir certaines divergences, ne sont pas suffisamment étayés pour établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, le taux d’incapacité de travail de l’assuré résultant de l’accident. Ils ne se prononcent ni sur les causes des douleurs, ni sur leur incidence sur la capacité de travail, ni sur le rapport de causalité naturelle entre celles-ci et l’accident. Il y a donc lieu de considérer que la juridiction précédente ne pouvait pas statuer sur la base des avis médicaux au dossier. Elle devait ordonner une expertise pour établir si une incapacité de travail existait et, le cas échéant, si et dans quelle mesure elle était en rapport de causalité naturelle avec l’accident.

 

Revenu d’invalide – ESS et DPT / 16 LPGA

La jurisprudence de l’ATF 129 V 472 consid. 4.2.2, développée en rapport avec la violation du droit d’être entendu (art. 29 Cst.) et de l’égalité des armes (art. 6 par 1 CEDH), a déterminé à quelles conditions devait être soumise la prise en compte des DPT pour calculer le revenu d’invalide. Le Tribunal fédéral a précisé que l’assuré devait avoir la possibilité de se déterminer sur les DPT permettant de fixer le revenu dans un cas d’espèce. Pour ce faire, le Tribunal fédéral a mentionné que les critiques de l’assuré à l’encontre des DPT devaient être faites en règle générale dans son opposition à la décision de l’assureur-accidents, de façon à ce que celui-ci puisse se déterminer dans la décision sur opposition. Cette manière de faire impose donc à l’assureur-accidents de donner tous les informations et les détails sur les DPT dans la décision initiale. In casu, tel n’a pas été le cas, le détail du calcul du revenu d’invalide ayant été communiqué pour la première fois à l’assuré dans la décision sur opposition.

Sur le fond, la juridiction cantonale a refusé d’appliquer les DPT produites par la CNA. Après avoir admis que les cinq DPT concernaient des postes tenant compte des limitations fonctionnelles du recourant, elle a retenu que trois d’entre elles impliquaient des trajets difficilement compatibles avec son état de santé. Concernant les trente-deux DPT produites par la CNA pour étayer le calcul de sa décision initiale, la juridiction cantonale a relevé que huit n’étaient pas adaptées, trois étaient situées en-dehors du canton de Vaud et que seules treize étaient situées à moins de vingt kilomètres du domicile du recourant. La juridiction a donc estimé que les DPT n’avaient pas la pertinence exigée et qu’il y avait lieu de se référer aux données de l’ESS.

La CNA conteste l’appréciation de la juridiction cantonale et considère qu’une certaine mobilité peut être demandée à l’assuré en se référant à l’assurance-chômage, pour laquelle deux heures de trajet pour l’aller et deux heures de trajet pour le retour constituent un maximum. Ces critères seraient respectés dans le cas présent et aucun élément au dossier ne permettrait de considérer que les trajets seraient difficilement compatibles avec l’état de santé de l’assuré.

Selon le Tribunal fédéral (consid. 7.3), le caractère convenable d’une DPT en regard de l’éloignement entre le lieu de travail prévu et le domicile ne peut pas être déterminé à l’avance et d’une manière générale mais elle doit être examinée en fonction de la situation de santé et personnelle de l’assuré ainsi que de son obligation de réduire le dommage (ATF 134 V 109 consid. 10.2.7 p. 129).

En l’espèce, les séquelles de l’accident ainsi que leur influence sur l’état de santé de l’assuré n’ont pas été définies avec suffisamment de précision pour permettre de se déterminer sur l’admissibilité des DPT retenues par la CNA. Renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour qu’elle se prononce à nouveau sur l’admissibilité des DPT au regard des conclusions de l’expertise à ordonner.

 

 

Arrêt 8C_408/2014 consultable ici : http://bit.ly/1dQuf7O