8C_527/2021 (f) du 16.12.2021 – Droit à l’indemnité de chômage – (in)aptitude au placement d’une assurée étudiante – 8 LACI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_527/2021 (f) du 16.12.2021

 

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Droit à l’indemnité de chômage – (in)aptitude au placement d’une assurée étudiante / 8 LACI – 15 LACI

 

Assurée commençant en août 2017 une formation (25 périodes de cours et 15 périodes de travail personnel à domicile par semaine).

L’assurée a travaillé comme vendeuse auxiliaire auprès de C.__ SA du 23.03.2018 au 20.06.2018; son contrat lui garantissait 10 heures de travail par semaine. Elle a ensuite été engagée comme auxiliaire administrative pour l’association D.__ du 22.08.2018 au 22.11.2018; une durée hebdomadaire de 8 heures de travail lui était assurée.

Le 22.11.2018, l’assurée s’est inscrite en tant que demandeuse d’emploi à 50% auprès de l’ORP. Éprouvant des doutes quant à l’aptitude au placement de l’assurée, la caisse cantonale de chômage a soumis le dossier au Service de l’industrie, du commerce et du travail (ci-après: SICT). Ayant été invitée à se déterminer sur cette question, l’assurée a expliqué qu’elle avait à sa disposition trois après-midi libres en semaine ainsi que la journée du samedi, ce qui devait correspondre à un taux de 50%.

Par décision du 25.01.2019, confirmée sur opposition, le SICT a nié l’aptitude au placement de l’assurée à partir du 23.11.2018.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a entre autres considéré que la disponibilité de l’assurée ne suffisait pas à admettre son aptitude au placement ; d’après son programme d’études hebdomadaire, l’assurée terminait ses cours le mercredi à 13h40, ce qui ne lui permettait pas de commencer une activité en début d’après-midi. De plus, des oraux étaient prévus le jeudi après-midi dès la quatrième semaine de cours. Enfin, un cours était également planifié le vendredi dès 13h, sans que l’on en connût l’heure de fin. Par conséquent, l’assurée n’était véritablement disponible sans contrainte que la journée du samedi. La cour cantonale a retenu que sa disponibilité était encore restreinte eu égard à ses déplacements quotidiens entre son domicile et le lieu de sa formation, les trajets excédant deux heures par jour.

Par jugement du 14.06.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assuré n’a droit à l’indemnité de chômage que s’il est apte au placement (art. 8 al. 1 let. f LACI). Est réputé apte à être placé le chômeur qui est disposé à accepter un travail convenable et à participer à des mesures d’intégration et qui est en mesure et en droit de le faire (art. 15 al. 1 LACI). L’aptitude au placement comprend ainsi deux éléments: le premier est la capacité de travail, c’est-à-dire la faculté de fournir un travail – plus précisément d’exercer une activité lucrative salariée – sans que l’assuré en soit empêché pour des causes inhérentes à sa personne; le deuxième élément est la disposition à accepter un travail convenable au sens de l’art. 16 LACI, laquelle implique non seulement la volonté de prendre un tel travail s’il se présente, mais aussi une disponibilité suffisante quant au temps que l’assuré peut consacrer à un emploi et quant au nombre des employeurs potentiels (ATF 125 V 51 consid. 6a; 123 V 214 consid. 3; DTA 2004 n° 18 p. 186 [C 101/03] consid. 2.2).

L’aptitude au placement doit être admise avec beaucoup de retenue lorsque, en raison de l’existence d’autres obligations ou de circonstances personnelles particulières, un assuré désire seulement exercer une activité lucrative à des heures déterminées de la journée ou de la semaine. Un chômeur doit être en effet considéré comme inapte au placement lorsqu’une trop grande limitation dans le choix des postes de travail rend très incertaine la possibilité de trouver un emploi (ATF 112 V 326 consid. 1a et les références; DTA 2003 n° 14 p. 128 [C 234/01] consid. 2.1).

Partant de ces principes, le Tribunal fédéral a jugé qu’un étudiant est apte à être placé s’il est disposé et en mesure d’exercer de manière durable, tout en poursuivant ses études, une activité à plein temps ou à temps partiel. En revanche, il faut nier la disponibilité au placement d’un étudiant qui ne désire exercer une activité lucrative que pour de brèves périodes ou sporadiquement, notamment pendant les vacances (ATF 120 V 385 consid. 4, 392 consid. 2a et les références; cf. aussi BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2e éd., 2014, n° 32 ad art. 15 LACI p. 156).

Lors de son inscription le 22.11.2018 auprès de l’ORP, l’assurée avait fait mention d’une disponibilité équivalant à un taux de 50%. Elle a expliqué plus tard avoir trois après-midi libres, soit le mercredi, le jeudi et le vendredi, ainsi que la journée du samedi.

S’il est vrai que l’assurée n’a pas apporté la preuve qu’elle avait travaillé à 50% au moins avant de s’annoncer au chômage, il est cependant établi que dans son poste de vendeuse chez C.__ SA puis dans son dernier emploi auprès de l’association D.__, respectivement 10 heures et 8 heures de travail hebdomadaire lui étaient garanties, soit l’équivalent d’un taux de travail d’au moins 20%. Le fait d’avoir des doutes quant au taux auquel l’assurée était non seulement disposée mais également en mesure de travailler – à savoir 50% – ne permettait pas à l’administration, respectivement à la juridiction cantonale, de conclure à un manque de disponibilité suffisante quant au temps que l’assurée pourrait consacrer à un emploi, ni donc de conclure à son inaptitude au placement. Dès lors qu’elle avait apporté la preuve qu’avant la survenance du chômage, elle était disposée et en mesure d’exercer une activité professionnelle sinon à 50%, du moins dans une mesure suffisante – selon la jurisprudence – pour admettre l’aptitude au placement d’au moins 20% d’une activité à plein temps (art. 5 OACI; ATF 115 V 434 consid. 2c), les juges cantonaux ne pouvaient pas nier purement et simplement son aptitude au placement.

Par ailleurs, au regard des postes recherchés (secteur administratif, vente, nettoyage) et des disponibilités invoquées par l’assurée (trois après-midi consécutifs ainsi que la journée entière du samedi), la possibilité de trouver un travail à temps partiel, avec, le cas échéant, des engagements à l’heure à différents moments de la journée ne pouvait pas être qualifiée d’incertaine.

Le fait d’avoir retrouvé un emploi dès le 15.03.2019 démontre en définitive que l’assurée était disposée à accepter durablement, au sens de la jurisprudence sur l’aptitude au placement des étudiants, une activité lucrative parallèlement à sa formation. Dans de telles circonstances, l’aptitude au placement de l’assurée doit être reconnue pour la période du 23.11.2018 au 14.03.2019 et le recours se révèle ainsi bien fondé.

 

Le TF admet le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_527/2021 consultable ici

 

 

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