9C_759/2019 (f) du 31.07.2020 – Nouvelle demande AI après 3 précédents refus – Conditions de la révision – 17 LPGA – 87 al. 2 RAI / Pas de notable modification malgré la modification des limitations fonctionnelles retenues lors du dernier refus – Nature de l’activité adaptée encore exigible aux limitations fonctionnelles serait inchangée

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_759/2019 (f) du 31.07.2020

 

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Nouvelle demande AI après 3 précédents refus – Conditions de la révision / 17 LPGA – 87 al. 2 RAI

Pas de notable modification malgré la modification des limitations fonctionnelles retenues lors du dernier refus – Nature de l’activité adaptée encore exigible aux limitations fonctionnelles serait inchangée

Pas de prise en compte du critère de l’âge de l’assurée (proche de l’âge donnant droit à la rente de vieillesse)

 

Assurée, née le 10.09.1956, ayant travaillé en qualité de couturière à l’étranger, ainsi qu’en tant qu’employée de maison et de concierge en Suisse. Les 14.04.2004, 27.03.2009 et 15.10.2010, elle a déposé successivement trois demandes de prestations de l’assurance-invalidité. Celles-ci ont toutes été rejetées par l’office AI, la dernière fois par décision du 04.06.2012 (confirmée par jugement du tribunal cantonal du 20.11.2012).

En juillet 2013, le médecin traitant de l’assurée a annoncé une aggravation de l’état de santé de sa patiente. L’office AI est entré en matière sur cette quatrième demande. L’administration a confié un mandat d’expertise à un spécialiste en chirurgie orthopédique. Dans son rapport du 27.08.2018, ce médecin a conclu à une capacité de travail entière dans une activité adaptée, respectivement de 50% dans l’ancienne activité. Par décision du 04.02.2019, l’office AI a fixé le taux d’invalidité à 34% et rejeté la demande.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/810/2019 – consultable ici)

Les juges cantonaux ont constaté que l’état de santé de l’assurée s’était modifié entre la 3e et la 4e demande de prestations. D’une part, il s’était amélioré s’agissant des atteintes aux épaules, mais d’autre part il s’était aggravé au niveau des membres inférieurs avec l’apparition de gonalgies, lesquelles avaient entraîné des limitations fonctionnelles supplémentaires. L’instance cantonale a aussi constaté que cette évolution de l’état de santé n’avait pas abouti à une modification de la capacité de travail qui s’élevait toujours à 50% dans l’activité habituelle et à 100% dans l’activité adaptée.

Les juges cantonaux se sont ensuite référés à la jurisprudence relative à l’évaluation de l’invalidité d’un assuré proche de l’âge donnant droit à la rente de vieillesse, laquelle prescrit de procéder à une analyse globale de la situation et de se demander si, d’une manière réaliste, l’assuré est encore en mesure de retrouver un emploi sur un marché équilibré du travail (cf. ATF 138 V 457 consid. 3.1 p. 459 et les références; arrêt 9C_899/2015 du 4 mars 2016 consid. 4.3). Dans ce contexte, ils ont considéré que la modification de l’état de santé avait eu une incidence sur la nature de l’activité adaptée encore exigible, laquelle devait épargner non seulement les membres supérieurs mais désormais également les genoux (pas d’activités en position agenouillée ou accroupie, pas de déplacements répétés dans les escaliers). Les juges ont admis que même si l’assurée avait changé d’activité à la suite de l’arrêt du 20.11.2012, un nouveau changement d’activité aurait pu être rendu nécessaire compte tenu des limitations fonctionnelles nécessitées par l’atteinte aux genoux. L’assurée pouvait ainsi invoquer son âge de 62 ans (au moment de l’expertise), considéré comme avancé. Son invalidité devait en conséquence être évaluée en fonction de la capacité de travail résiduelle de 50% dans l’activité habituelle qu’elle exerçait avant la survenance de l’atteinte à la santé, ce qui ouvrait droit à la demi-rente.

Par jugement du 10.09.2019, admission du recours par le tribunal cantonal, annulant la décision et mettant l’assurée au bénéfice d’une demi-rente d’invalidité dès le 01.01.2014, fondée sur un degré d’invalidité de 50%.

 

TF

L’art. 17 al. 1 LPGA n’exige pas une modification notable des circonstances prévalant lors de l’octroi de la rente mais une modification notable du degré d’invalidité. Selon la jurisprudence, le changement de circonstances propre à légitimer la révision des rentes d’invalidité ou des autres prestations durables peut ainsi consister en une modification sensible non seulement d’un état de santé mais aussi des conséquences sur la capacité de gain d’un état de santé inchangé (ATF 141 V 9 consid. 2.3 p. 10; 134 V 131 consid. 3 p. 132; 133 V 545 consid. 6.1 p. 546 et 7.1 p. 548 et les références; arrêt 9C_821/2018 du 4 février 2019 consid. 4.1).

Sous l’angle des conditions de la révision, on constate que le spectre légèrement modifié des limitations fonctionnelles subies par l’assurée par rapport à la situation qui prévalait en 2012, ne constitue pas une modification motivant une révision. En effet, la nature de l’activité adaptée encore exigible aux limitations fonctionnelles serait inchangée. Une telle activité ferait toujours partie des activités simples et répétitives telles que prises en compte dans les statistiques salariales de l’ESS et dont peu d’entre elles s’accomplissent à genoux, accroupi ou entraînent des déplacements répétés dans les escaliers. La capacité de gain (théorique) de l’assurée n’en serait dès lors pas modifiée ni, en conséquence, le degré d’invalidité. A défaut d’une modification notable, le taux d’invalidité n’avait pas à être fixé à nouveau en prenant en compte le critère de l’âge de l’assurée (cf. à ce sujet arrêt 9C_899/2015 précité).

 

Le TF admet le recours de l’office AI, annulant le jugement cantonal et confirmant la décision de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_759/2019 consultable ici

 

 

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