8C_59/2018 (f) du 19.07.2018 – Droit à l’indemnité chômage – Retraite anticipée – Période de cotisation / 8 LACI – 13 al. 3 LACI – 12 OACI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_59/2018 (f) du 19.07.2018

 

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Droit à l’indemnité chômage – Retraite anticipée – Période de cotisation / 8 LACI – 13 al. 3 LACI – 12 OACI

 

Assurée, née en 1957, a travaillé depuis le 02.09.1996 au service de la société B.__ SA. A la suite de la fusion de cette société avec la société C.__ SA, son contrat de travail a été repris par celle-ci à partir du 01.07.2008. Le 24.11.2016, elle a requis l’octroi d’indemnités de chômage à compter du 01.02.2017 en indiquant avoir été licenciée par son employeur le 24.10.2016 avec effet au 31.01.2017 en raison de sa « mise en préretraite ». Dans une attestation du 06.02.2017, l’employeur a indiqué avoir lui-même résilié les rapports de travail pour « préretraite ». Par courriel du 08.02.2017, l’assurée a informé la caisse de chômage qu’elle avait accepté de bénéficier d’une retraite anticipée sur proposition de son employeur, en raison de la reprise de la société C.__ SA par la société D.__ SA.

Par décision du 10.04.2017, confirmée sur opposition, la caisse de chômage a nié le droit de l’assurée à une indemnité de chômage au motif que l’intéressée ne justifiait d’aucune période de cotisation à compter du 01.02.2017, date de sa mise à la retraite anticipée.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1070/2017 – consultable ici)

La cour cantonale a constaté que l’assurée avait choisi librement de bénéficier d’une retraite anticipée à un moment où il n’était nullement question d’un licenciement. Les juges cantonaux sont d’avis que l’intéressée ne peut se prévaloir de l’exception de l’art. 12 al. 2 OACI et qu’en vertu de l’art. 12 al. 1 OACI, seule pouvait être prise en compte, au titre de période de cotisation, l’activité soumise à cotisation exercée après la mise à la retraite.

Par jugement du 29.11.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 8 al. 1 let. e LACI, l’assuré a droit à l’indemnité de chômage s’il remplit les conditions relatives à la période de cotisation ou en est libéré. Celui qui, dans les limites du délai-cadre prévu à cet effet (art. 9 al. 3 LACI), a exercé durant douze mois au moins une activité soumise à cotisation remplit les conditions relatives à la période de cotisation (art. 13 al. 1 LACI). Afin d’empêcher le cumul injustifié de prestations de vieillesse de la prévoyance professionnelle et de l’indemnité de chômage, le Conseil fédéral peut déroger aux règles concernant la prise en compte des périodes de cotisation pour les assurés mis à la retraite avant d’avoir atteint l’âge de la retraite selon l’art. 21 al. 1 LAVS, mais qui désirent continuer à exercer une activité salariée (art. 13 al. 3 LACI).

Faisant usage de cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a édicté l’art. 12 OACI, selon lequel, pour les assurés qui ont été mis à la retraite avant d’avoir atteint l’âge donnant droit aux prestations de l’AVS, seule est prise en compte, comme période de cotisation, l’activité soumise à cotisation qu’ils ont exercée après leur mise à la retraite (al. 1). D’après l’art. 12 al. 2 OACI, cette règle n’est toutefois pas applicable lorsque l’assuré a été mis à la retraite anticipée pour des raisons d’ordre économique ou sur la base de réglementations impératives entrant dans le cadre de la prévoyance professionnelle (let. a) et qu’il a droit à des prestations de retraite inférieures à l’indemnité de chômage à laquelle il a droit en vertu de l’art. 22 LACI (let. b). Dans ce cas, les périodes de cotisation antérieures à la mise à la retraite anticipée sont prises en considération par l’assurance-chômage.

 

Selon le Tribunal fédéral, sur la base de ses constatations de fait, la cour cantonale était fondée à admettre que la résiliation des rapports de travail reposait sur des raisons autres que des motifs d’ordre économique ou qu’en vertu de réglementations impératives ressortissant à la prévoyance professionnelle au sens de l’art. 12 al. 2 let. a OACI.

Etant donné le caractère d’exception de l’art. 12 al. 2 OACI, le Conseil fédéral, selon le texte clair de la lettre a de cette disposition, a restreint son champ d’application aux cas où la résiliation des rapports de travail est fondée sur des motifs d’ordre économique ou repose sur des réglementations impératives ressortissant à la prévoyance professionnelle. C’est pourquoi toute résiliation des rapports de travail qui – sans que l’assuré ait un choix – aboutit à une retraite anticipée ne tombe pas sous le coup de cette réglementation. Les personnes qui sont licenciées par leur employeur pour des raisons autres que des motifs d’ordre économique ou qu’en vertu de réglementations impératives ressortissant à la prévoyance professionnelle ne peuvent pas se prévaloir de l’art. 12 al. 2 OACI (ATF 144 V 42 consid. 3.2 p. 44 s.; 126 V 396 consid. 3b/bb p. 398; arrêt 8C_708/2008 du 5 mars 2009 consid. 3.3).

Au surplus, le présent cas se distingue de la cause jugée dans l’arrêt ATF 144 V 42. Dans cette affaire, qui concernait un assuré qui avait choisi librement de bénéficier d’une retraite anticipée et bénéficiait d’une demi-rente de la prévoyance au moment de tomber au chômage, le Tribunal fédéral a jugé qu’aussi longtemps que l’intéressé ne perçoit pas une rente entière de la prévoyance, le cumul d’une demi-rente de la prévoyance et d’indemnités de chômage calculées en fonction d’une perte d’emploi correspondant à 50% d’un travail à plein temps n’apparaît pas injustifié et ne contrevient pas à l’art. 13 al. 3 LACI. Or, à la différence de ce cas tranché, l’assurée ne bénéficie pas d’une demi-rente de la prévoyance mais perçoit une rente entière, ainsi qu’une rente-pont.

Vu ce qui précède, l’assurée ne peut se prévaloir de l’exception de l’art. 12 al. 2 OACI et la période de cotisation déterminante pour justifier le droit éventuel à l’indemnité de chômage doit être examinée compte tenu de l’activité soumise à cotisation exercée après le 01.02.2017, date de la mise à la retraite (art. 12 al. 1 OACI). Comme l’intéressée ne justifie d’aucune période de cotisation à compter de cette date, la caisse de chômage était fondée à lui dénier tout droit à une indemnité de chômage.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_59/2018 consultable ici

 

 

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