9C_80/2017 (f) du 31.05.2017 – Responsabilité de l’employeur en raison du non-paiement des cotisations sociales – 52 LAVS / Administrateur et directeur avec signature individuelle – « Homme de paille »

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_80/2017 (f) du 31.05.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2FApcXU

 

Responsabilité de l’employeur en raison du non-paiement des cotisations sociales / 52 LAVS

Administrateur et directeur avec signature individuelle – « Homme de paille »

 

La société « C.__ LTD., succursale de U.__, en liquidation » (ci-après : la société) a été affiliée en qualité d’employeur à la caisse de compensation entre les 01.01.2007 et 31.10.2011. Elle a été dissoute par suite de faillite prononcée par jugement du 18.10.2011. A.__ en était l’administrateur et le directeur avec signature individuelle et D.__ l’administrateur sans signature.

La caisse de compensation a réclamé à A.__ la somme de 57’160 fr. 10, correspondant aux dommages-intérêts pour les cotisations sociales (yc frais et intérêts impayés) afférentes à la période courant du 01.01.2007 au 30.04.2011.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1049/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2mBZYQq)

La cour cantonale a considéré que A.__ avait commis en sa qualité d’organe formel de la société faillie une négligence grave entraînant son obligation de réparer le dommage subi par la caisse de compensation intimée. A.__ aurait violé son obligation de diligence en n’exerçant aucune surveillance pendant l’activité de la société, ni en n’ayant rien entrepris pour s’assurer du paiement des cotisations sociales. S’il avait correctement exercé son mandat, il aurait pu veiller au paiement desdites cotisations ou, à tout le moins, pu constater que celles-ci étaient impayées et exercer une pression sur B.__ qui dirigeait en fait la société, afin que ce dernier s’en acquitte dans les meilleurs délais. Quant au fait qu’il avait été trompé par B.__ – qui lui aurait présenté seulement en octobre 2010 les documents comptables pour les années 2007 à 2009 ne mentionnant pas les dettes de cotisations à l’égard de la caisse de compensation intimée – cet élément n’était pas pertinent. Il était en effet établi que A.__ était au courant du retard dans le paiement des cotisations, ainsi que des problèmes de trésorerie de la société et, compte tenu des pouvoirs liés à sa fonction d’administrateur avec signature individuelle, il aurait pu par exemple révoquer la procuration en faveur de B.__ et s’assurer du paiement des cotisations sociales. De surcroît, le retard dans le paiement des cotisations a sensiblement augmenté après 2010 et, à cette date, la société n’avait plus présenté de comptabilité, ce qui constituait une violation supplémentaire des obligations incombant à un administrateur de sociétés.

Par jugement du 15.12.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Recevabilité du recours

La recevabilité du recours en matière de droit public contre un jugement statuant sur la responsabilité d’un employeur envers une caisse de compensation fondée sur l’art. 52 al. 1 LAVS n’est ouverte que si la valeur litigieuse atteint la somme de 30’000 fr. (art. 85 al. 1 let. a LTF; ATF 137 V 51 consid. 4.3 p. 56; JEAN-MAURICE FRÉSARD, in Commentaire de la LTF, 2ème éd., 2014, n° 31 ad art. 113 LTF). Le recours est recevable de ce chef.

 

Responsabilité de l’employeur en raison du non-paiement des cotisations sociales

Les montants litigieux se référant à une période allant jusqu’au 30.04.2011, il convient néanmoins de préciser que l’art. 52 al. 1 LAVS est applicable dans le cas d’espèce dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31.12.2011, selon laquelle l’employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n’observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l’assurance, est tenu à réparation (RO 2002 3371). Du point de vue matériel, cette disposition ne diffère pas de celle en vigueur depuis le 01.01.2012 qui l’a remplacée (arrêt 9C_83/2015 du 20 avril 2015 consid. 3).

La responsabilité au sens de l’art. 52 LAVS, tant dans la version en vigueur jusqu’au 31.12.2011 que dans sa version actuelle, suppose un rapport de causalité adéquate entre la violation intentionnelle ou par négligence grave de l’employeur (ou d’un organe) des devoirs lui incombant et la survenance du dommage.

La causalité est adéquate si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance. Celle-ci peut être exclue, c’est-à-dire interrompue, l’enchaînement des faits perdant alors sa portée juridique, lorsqu’une autre cause concomitante – la force majeure, la faute ou le fait d’un tiers, la faute ou le fait de la victime – constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l’on ne pouvait pas s’y attendre. L’imprévisibilité de l’acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate; il faut encore que cet acte ait une importance telle qu’il s’impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l’événement considéré, reléguant à l’arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l’amener, en particulier le comportement de l’auteur (ATF 132 III 523 consid. 4.6 p. 529 s.; arrêt H 95/05 du 10 janvier 2007 consid. 4).

Les fautes que A.__ impute à B.__ ne sont pas de nature à interrompre le lien de causalité entre ses négligences – du reste admises – et le dommage encouru par la caisse de compensation.

Tout d’abord, du point de vue formel, A.__ était administrateur unique de la société avec un droit de signature individuelle. Ainsi, il aurait pu aisément se renseigner périodiquement sur la marche des affaires, ce qui inclut notamment la surveillance du paiement des cotisations sociales paritaires (arrêt 9C_657/2015 du 19 janvier 2016 consid. 5.3 et les références), et prendre les mesures appropriées pour effectuer ces paiements. Le fait que les comptes individuels 2007-2009 n’indiquaient pas de dette concernant les cotisations arriérées ne lui est d’aucun secours. En effet, celui-ci n’établit pas qu’il a été empêché de prendre connaissance autrement de la situation comptable de la société. Au contraire, il apparaît qu’il était bel et bien au courant des difficultés financières de la société, ce qui aurait dû l’inciter à vérifier si les paiements litigieux avaient été effectués.

Ensuite, on ne peut pas suivre A.__ lorsqu’il affirme avoir été trompé par des manœuvres fallacieuses de B.__ dans la mesure où celui-ci lui a présenté des comptes 2007-2009 erronés visant à lui cacher le défaut de paiement à l’égard de la caisse de compensation. A.__ aurait dû se renseigner bien avant sur la situation comptable de la société sans attendre la transmission de ces documents en octobre 2010, ce qui démontre qu’il ne s’est à aucun moment soucié de la situation comptable de la société. En outre, le fait que B.__ ait opéré – sans raison apparente – des versements au propriétaire allégué de la société n’est pas non plus un argument en faveur de A.__. Compte tenu de ses pouvoirs, une fois remarquée l’existence de ces versements, il aurait pu sans difficultés retirer la procuration en faveur de B.__.

 

Le TF rejette le recours de A.__.

 

 

Arrêt 9C_80/2017 consultable ici : http://bit.ly/2FApcXU

 

 

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