8C_704/2016 (f) du 29.05.2017 – Restitution de prestations indûment touchées – Bonne foi de l’assuré / 25 al. 1 LPGA / Indemnités chômage au titre de mesure de soutien aux assurés qui entreprennent une activité indépendante – 71a al. 1 LACI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_704/2016 (f) du 29.05.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2mD60RC

 

Restitution de prestations indûment touchées – Bonne foi de l’assuré / 25 al. 1 LPGA

Indemnités chômage au titre de mesure de soutien aux assurés qui entreprennent une activité indépendante – 71a al. 1 LACI

 

Assuré inscrit au chômage le 01.07.2009, avec un délai-cadre d’indemnisation ouvert à compter de cette date. L’Office régional de placement (ORP) l’a mis au bénéfice de 64 indemnités journalières au titre de mesure de soutien aux assurés qui entreprennent une activité indépendante (cf. art. 71a al. 1 LACI). Dans cette décision, il était mentionné qu’à l’expiration de la phase de planification du projet mais au plus tard lors du versement de la dernière indemnité journalière, l’assuré devait indiquer à l’autorité compétente s’il prenait ou non l’activité indépendante. Le projet élaboré par l’assuré était en relation avec la vente de piscines (sous la raison sociale « C.__ » vente de piscines et accessoires).

Le 30.03.2011, l’assuré a informé l’ORP par le biais du formulaire prévu à cet effet qu’il renonçait à se mettre à son compte. La caisse de chômage a dès lors repris le versement des indemnités ordinaires de chômage à partir du 01.04.2011. Dans les formulaires « Indications de la personne assurée » des mois de mai et juin 2011, l’assuré a annoncé avoir travaillé 45 heures, respectivement 28 heures, pour « C.__ », et a transmis à la caisse les décomptes de salaires et les attestations de gain intermédiaire y relatifs. Le 10.09.2011, la caisse a rendu une décision par laquelle elle a nié le droit de l’assuré au chômage dès le 01.04.2011, motif pris que selon les directives du Secrétariat d’Etat à l’économie (seco), l’assuré qui, après la phase d’élaboration du projet, n’entreprend pas l’activité indépendante et désire à nouveau obtenir les prestations de l’assurance-chômage, ne peut pas percevoir de gain intermédiaire dans le domaine du projet soutenu. Par décision du 12.09.2011, elle a également réclamé à l’assuré la restitution de 13’421 fr. 50 correspondant aux prestations versées à tort du 01.04.2011 au 30.06.2011.

L’assuré a fait une demande de remise de l’obligation de restituer, refusée par le Service de l’emploi (SPE), motif pris que l’assuré ne pouvait se prévaloir de sa bonne foi.

 

Procédure cantonale

Les juges cantonaux ont considéré que l’assuré n’avait pas cherché à dissimuler le fait qu’il avait continué à travailler pour « C.__ » après le 31 mars 2011 vu qu’il avait régulièrement annoncé à la caisse les revenus réalisés à ce titre. Ils ont également constaté qu’il n’était pas établi que l’assuré connaissait les conséquences que la continuation de l’activité à laquelle il avait déclaré renoncer pouvait avoir sur son droit à l’indemnité de chômage. Enfin, ils ont relevé que la caisse avait attendu plusieurs mois avant de rendre sa décision de négation du droit à l’indemnité de chômage alors qu’elle disposait, dès réception de la première fiche de salaire, de tous les éléments lui permettant de constater que l’assuré n’avait pas droit aux prestations. Or, il était vraisemblable que l’assuré se serait conformé aux directives du seco s’il avait été correctement informé, ou aurait cessé son activité pour « C.__ » si la caisse l’avait immédiatement rendu attentif au contexte légal. Eu égard à ces circonstances, ils ont admis sa bonne foi au sens de l’art. 25 LPGA.

Par jugement du 13.09.2016, admission du recours par le tribunal cantonal, annulation de la décision et remise de l’obligation accordée.

 

TF

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l’obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c p. 53; arrêt 9C_638/2014 du 13 août 2015 consid. 4.1).

Selon la jurisprudence, l’ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre sa bonne foi. Il faut bien plutôt que le requérant ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d’emblée lorsque les faits qui conduisent à l’obligation de restituer – comme par exemple une violation du devoir d’annoncer ou de renseigner – sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, le bénéficiaire peut invoquer sa bonne foi lorsque l’acte ou l’omission fautifs ne constituent qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 p. 220 s.; 112 V 97 consid. 2c p. 103; 110 V 176 consid. 3c p. 180).

Il y a négligence grave quand un ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 précité consid. 3d p. 181). L’examen de l’attention exigible d’un ayant droit qui invoque sa bonne foi relève du droit et le Tribunal fédéral revoit librement ce point (ATF 122 V 221 consid. 3 p. 223; arrêt 8C_373/2016 du 29 mars 2017 consid. 4).

Selon le TF, on ne saurait reprocher à l’assuré une éventuelle violation de son obligation de renseigner puisqu’il n’a rien caché à la caisse concernant son activité auprès de « C.__ » et les revenus qu’il en a tirés après le 31 mars 2011. La caisse de chômage disposait de toutes les informations utiles pour statuer sur le droit aux prestations de l’assuré.

La brochure à laquelle se réfère l’assurance-chômage dans son recours (brochure « Info-Service » éditée par le seco, intitulée « Mesures relatives au marché du travail ») ne reproduit pas le contenu de la directive du seco. Il y est mentionné qu’à la fin de la période de préparation, la personne assurée doit décider si elle tient à démarrer l’activité indépendante ou non. Plus loin, il est question de la prolongation du délai-cadre en cas de démarrage de l’activité indépendante et de la possibilité de bénéficier des prestations de l’assurance-chômage en cas de renonciation ultérieure au projet. Ces informations ne sont pas suffisamment explicites pour admettre que l’assuré savait ou aurait dû savoir que les prestations qu’il percevait étaient indues. Car sauf à connaître la teneur de la directive du seco, il n’apparaît pas d’emblée évident pour la personne assurée de comprendre que le fait de déclarer renoncer à exercer une activité indépendante principale et de continuer à travailler accessoirement dans cette même activité en annonçant les salaires obtenus comme un gain intermédiaire a une incidence sur le droit aux prestations de chômage. Aussi bien, dans la mesure où l’assuré n’avait visiblement pas l’intention d’induire la caisse en erreur sur sa situation, à savoir qu’il entendait pas se mettre définitivement à son compte, mais non plus dissimuler les revenus qu’il avait pu obtenir en poursuivant à un taux très faible la même activité, la juridiction cantonale n’a pas violé le droit en jugeant qu’il était de bonne foi.

 

Le TF rejette le recours du Service public de l’emploi.

 

 

Arrêt 8C_704/2016 consultable ici : http://bit.ly/2mD60RC

 

 

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