8C_793/2013 (f) du 25.02.2015 – Indemnité journalière LAA – Restitution – Surveillance de l’assurée par des détectives

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_793/2013 (f) du 25.02.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/19EMqLn

 

Indemnité journalière LAA – Restitution – Surveillance de l’assurée par des détectives

 

Assurée, née en 1981, victime d’un accident le 17.01.2009 : un résident pris de malaise a chuté lourdement sur sa jambe droite. Les parties atteintes étaient la cheville et le genou droits. Diagnostics initiaux, posés par une spécialiste FMH en chirurgie : entorse en éversion de la cheville droite, entorse du genou droit avec déchirure de la corne postérieure du ménisque interne droit, contusion-entorse de la hanche droite sur status après arthroscopie de la hanche droite en 2005.

Mandat d’expertise le 28.08.2009 confiée par l’assureur-accidents à un spécialiste FMH en chirurgie orthopédique. Diagnostics retenus par l’expert : hanche à ressaut avec trouble antalgique de la démarche et de déchirure horizontale du ménisque interne droit. Selon le médecin-expert, le cas de l’assurée était « déroutant ».

Le médecin associé à la Clinique de chirurgie orthopédique de l’Hôpital rapportait, le 16.11.2009, que la marche de l’assurée se faisait avec une boiterie complexe et se disait perplexe vis-à-vis de la démarche très particulière de l’assurée, la lésion méniscale n’expliquant pas totalement sa démarche. Méniscectomie partielle le 10.03.2010.

Le 08.12.2010, le médecin-chef du service d’orthopédie de la Clinique H. a indiqué que les troubles de la marche n’étaient pas clairement explicables. Selon lui, il n’existait aucune pathologie anatomiquement objectivable ou mécaniquement gênante. Le 17.01.2011, le médecin-chef du Service de neurologie a exclu une éventuelle atteinte neurogène centrale ou périphérique, concluant que la démarche démonstrative de l’assurée n’était pas d’origine neurologique. Ce médecin a relevé une nette incohérence entre la façon de marcher et les résultats des investigations menées. A ce propos, il a signalé la différence entre la démarche pendant la consultation et à l’extérieur de l’établissement hospitalier ainsi que l’absence de traces d’usure sur l’extérieur du talon et de la semelle droits, alors que l’intéressée avait déclaré traîner sa jambe habituellement. Selon le neurologue, lesdites incohérences pouvaient éventuellement s’expliquer par une possible composante somatoforme et dissociative du trouble de la marche, raison pour laquelle un examen psychiatrique était indiqué.

L’assurance-invalidité, à laquelle l’assurée s’était également annoncée, a confié une expertise bi-disciplinaire, conjointement à un chirurgien-orthopédiste et à un psychiatre. Ces spécialistes ont rendu leurs conclusions dans leurs rapports des 14 et 21 avril 2011. Sur le plan somatique, le chirugien-orthopédiste a relevé certaines incohérences (par ex. le fait que l’assurée ne présentait pas la moindre atrophie musculaire alors qu’elle avait adopté depuis deux ans une démarche vicieuse de décharge qui devait entraîner une atrophie majeure). Il a conclu à une capacité de travail de 80 %, voire plus, dans une activité adaptée. Sur le plan psychiatrique, aucun trouble ou maladie psychiatrique relevé, déterminant une incapacité de travail.

L’assureur-accidents a mandaté un bureau d’investigation privé pour effectuer une surveillance de l’assurée. Dans leur rapport du 15.01.2012, les détectives ont mentionné qu’ils avaient pu observer l’assurée les 14.12.2011 et 13.01.2012. Sur la base de leurs observations, ils ont affirmé que l’assurée ne démontrait aucune limitation au niveau de sa jambe droite, qu’elle marchait très rapidement et avec énergie sur de longues distances, qu’elle montait et descendait les escaliers en sollicitant sa jambe droite autant que la gauche, qu’elle avait descendu un sommier et un matelas depuis son appartement situé au 3ème étage d’un immeuble sans ascenseur, qu’elle était restée assise sur les petits fauteuils d’un théâtre sans se lever pendant au moins une heure et demie, qu’elle montait et descendait des véhicules sans aucune gêne physique visible et enfin qu’elle était souvent absente de son domicile.

Chargé d’évaluer les résultats de la surveillance de l’assurée, le chirurgien-orthopédiste ayant réalisé l’expertise pour l’AI a précisé que ces nouveaux éléments invalidaient les limitations précédemment déterminées et expliquaient les incohérences relevées. En raison de l’arthroscopie du 10.03.2010, il a évalué à six semaines l’incapacité de travail due aux troubles du genou droit et à une période identique à partir de la date de l’accident l’incapacité en raison des troubles de la hanche droite. Un traitement d’une durée de trois à quatre mois pour le genou et de deux à trois mois pour la hanche était par ailleurs justifié.

Décision le 16.03.2012 : fin des prestations à partir du 30.04.2010 et réclamation de la restitution des indemnités journalières versées à tort du 01.05.2010 au 31.01.2012, soit un montant de 53’908 fr. 10. Quant aux frais de traitement non encore remboursés, elle a décidé qu’elle n’en assumerait plus le paiement mais qu’elle renonçait à réclamer la restitution des frais déjà réglés directement aux différents prestataires en 2010 et 2011.

Opposition de l’assurée rejetée par décision sur opposition du 07.06.2012.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a donné pleine valeur probante aux rapports du chirurgien-orthopédiste et en a suivi les conclusions. Les premiers juges ont retenu qu’il n’existait pas d’élément médical au dossier susceptible de mettre en doute les dernières conclusions de l’expert quant à l’absence de pathologie autre qu’un status après arthroscopie de la hanche droite en 2005. Les errements des divers intervenants sur les diagnostics possibles n’étaient pas déterminants en l’espèce, dans la mesure où l’anamnèse, l’examen clinique et le compte-rendu des plaintes de l’assurée étaient manifestement faussés par le comportement de celle-ci.

En ce qui concerne les prestations indûment touchées par l’assurée, les premiers juges ont retenu que la décision de restitution n’était pas critiquable.

Recours rejeté par jugement du 04.10.2013.

 

TF

Selon le TF, les conclusions du chirurgien-orthopédiste ne sont pas remises en cause par les autres médecins auxquels s’est adressée l’assurée. La juridiction cantonale était en droit de se fonder sur l’appréciation de ce médecin et les reproches de l’assurée tirés de la violation du principe inquisitoire et des règles sur la libre appréciation des preuves se révèlent mal fondés.

L’assurée fait encore valoir que l’évaluation du matériel d’observation par le chirurgien-orthopédiste ne serait pas probante au motif que la surveillance dont elle a fait l’objet n’a porté que sur quelques déplacements durant une demi-journée. Pour le TF, la surveillance de l’assurée n’a fait que confirmer les nombreuses incohérences médicales relevées auparavant tout au long de l’instruction par les divers spécialistes. Au demeurant, l’assurée ne conteste pas l’exactitude des faits constatés par les détectives.

Le TF confirme le jugement cantonal et rejette le recours de l’assurée.

 

Arrêt 8C_793/2013 consultable ici : http://bit.ly/19EMqLn

 

 

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